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Les enfants barbouillés de mûres
Aux fraisiers sont tous attablés,
Les fontaines dans leurs murmures
Baisent les roseaux accouplés.

O Rosa! charmeuse et charmée,
Comme tu sens bon ce matin:
La fraise, la mûre, le thym.

Le pré t'a toute parfumée.....
Je bois à tes cheveux flottans,
La fraîche senteur des vingt ans.

LA BAIGNEUSE.

Au bout du parc, style rocaille,
Elle va d'un pas négligent;
Sur son chemin crie une caille,
Le merle siffle en voltigeant.

Elle a détourné la broussaille
Qui retenait son pied d'argent ;
Elle descend; l'onde tressaille
Et baise son beau corps nageant.

Si Coustou, demi-dieu du marbre,
Se fût trouvé là sous un arbre,
Quel chef-d'œuvre il aurait sculpté !

Moi, comme j'étais de la fêle,
Je n'ai pas détourné la tête
Un instant de l'autre côté.

chez nous. Il m'apprit ce qu'il savait. Ce fut bientôt fait. Mais il me réapprit Dieu que j'avais mal appris au collége. Je commençai alors, sans le savoir, mon livre Les destinées de l'âme, cherchant Dieu dans la nature et dans l'infini comme je cherchais des amoureuses idéales dans l'église.

Je fus toute une saison à courir les champs dès l'aube, respirant je ne sais quelle volupté délicieuse dans cette virginité de la nature, ayant encore les pâleurs, les indécisions, les innocences de la jeune fille qui s'éveille dans la jeunesse. La robe verte tout endiamantée sous le ciel bleu a des tons d'une douceur ineffable; les dernières brumes qui vont s'effranger aux grands arbres et se perdre çà et là estompent harmonieusement le paysage et font voyager l'esprit. La nature avant d'éblouir son monde garde encore les airs discrets et pudiques d'une femme qui descend du lit. Elle sourit, mais dans la dignité d'une déesse, aux aubades des merles et des rossignols.

Je battais la campagne, secouant des pieds la rosée des touffes d'herbe, troublant les hyménées des infiniment petits, agitant les branches avec mon bâton de cornouiller, cueillant des rimes et des bouquets, croyant penser quand je n'étais qu'un rêveur plus ou moins. éveillé. Voici trois sonnets de mes premières rencontres et mes premières rêveries :

ROSA.

Rosa! les cerises sont mûres,

Le soleil a doré les blés.

Il est midi: sous les ramures,

Les cœurs amoureux sont troublés;

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Au bout du parc, style rocaille,
Elle va d'un pas négligent;
Sur son chemin crie une caille,
Le merle siffle en voltigeant.

Elle a détourné la broussaille
Qui retenait son pied d'argent;
Elle descend; l'onde tressaille
Et baise son beau corps nageant.

Si Coustou, demi-dieu du marbre,
Se fût trouvé là sous un arbre,
Quel chef-d'œuvre il aurait sculpté !

Moi, comme j'étais de la fête,
Je n'ai pas détourné la tête
Un instant de l'autre côté.

LA SOIF DU CŒUR.

Ma belle Léonie, allons au fond des bois.
Là, nous nous coucherons sous la fraîche ramée,
Sur la mousse moufflue et sur l'herbe embaumée :
Tu connais les sentiers de la forêt d'Arbois?

Bien loin, vers les rochers où le cerf aux abois
Se cache poursuivi par la meule affamée;
Plus loin, plus loin encor, ma belle bien-aimée :
Ne te souviens-tu pas de la source où tu bois?

El quand nous serons seuls sous le ciel, sur la terre,
Je te dirai tout haut que la soif qui m'altère
C'est la soif de l'amour! Ne l'as-tu donc pas, toi?

Je te dirai tout bas que ma fontaine, à moi,
C'est la bouche de pourpre aux lèvres framboisées.
Viens. J'ai soif. Je veux boire à tes fraîches rosées.

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ne faut pas mal dire de l'amour platonique, puisque

Ic'est la station la plus radieuse de la passion.

J'étais depuis quelques jours en conversation pas du tout criminelle avec une jeune fille du pays, qui vivait moitié du tems à Paris et moitié du tems à la campagne. Romanesques tous les deux, nous ne songions qu'à l'A B C D de l'amour. Sa mère semblait bien comprendre cela, puisqu'elle nous laissait errer dans un rand verger où il y avait beaucoup de pommiers. Nous

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