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Pour toi a ce sont des dieux, va donc les encenser.
Ose appeler vertu l'art de n'oser penser.
Sais-tu ce que tu perds? sais-tu que l'esclavage
Rétrécit ton esprit, énerve ton courage?

с

Eh bien! ton bonheur dure autant que ta faveur;
Mais, dis, quelle ressource as-tu dans le malheur ?
Nulle
que la douleur : j'en sonde les blessures".
Tu crois la soutenir, esclave tu l'endures.

d

Funeste ambition ! c'est en vain qu'un mortel
Cherche en toi son bonheur, fait fumer ton autel;
Ses mains t'offrent l'encens 8, son cœur est la victime.
Plus il marche aux grandeurs, et plus sa soif s'anime.
Il desirait ce rang, il vient de l'obtenir;

h

De sa passion naît un nouveau desir.

i

Un autre après le suit; jamais rien ne l'arrête;
Sa vaste ambition est un pin dont la tête
S'élève d'autant plus qu'il semble en approcher.
Va, le bonheur n'est pas où tu vas le chercher.
m Malheureux en effet, heureux en apparence,

a Pour toi ce sont. Ce n'est pas supportable. Ces idées communes ne sont pas bien amenées.

b

Beau vers qu'il faut mieux préparer.

c.d La douleur n'est point une ressource. Encore une fois, il faut que ces lieux communs soient plus pressés, touchés d'une manière plus neuve.

e

« Difficile est proprie communia dicere. »

HOR.. Art poét., 128.

Esclave ne va point avec blessures, sonder jure avec soutenir, et tout cela fait un tableau peu dessiné.

Encore une apostrophe.

8 Encore un lieu commun.

Il manque une syllabe, mais il y a là trop de vers.

1 Un autre après le suit. Sans doute quand on suit on est après. Mettez

plus de force et de précision, élaguez beaucoup.

* Ces desirs qui se suivent jurent avec ce pin. L'ambition est un pin, est une expression mauvaise.

1 La tête d'un pin ne s'élève pas d'autant plus qu'on en approche; passe

pour une montagne escarpée.

m Lieux communs encore: gardez-vous-en.

Tu n'as d'autre bonheur que ta vaine espérance.

Que tes vœux soient remplis : la crainte, aux yeux ouverts, Te présente aussitôt le miroir des revers.

Aux traits de tes rivaux tu demeures en butte;

Ton élévation te fait craindre ta chute :

Chargé de ta grandeur, tu te plains de son poids,
Et tu souffres déjà les maux que tu prévoisb.
Politiques profonds, allez ourdir vos trames;
Enfantez des projets, lisez au fond des ames;
Domptez vos passions, et maitrisez vos vœux.
Au milieu des tourments, criez: Je suis heureux *;
Et, de tous vos chagrins déguisant l'amertume,
Redoublez la douleur dont le feu vous consume.
Voyez cette montagne, où paissent les troupeaux,
Où la vigne avec pompe étale ses rameaux;
La source qui jaillit y roule l'abondance .
Tout d'un calme profond présente l'apparence:
Ses coteaux sont fleuris, sa tête est dans les airs,
Et son superbe pied sert de voûte aux enfers.
C'est là qu'avec transport, les plus tendres bergères,
Conduites par l'Amour, célèbrent ses mystères.
Ce bosquet fut témoin de leurs premiers soupirs.
Ce bosquet est témoin de leurs premiers plaisirs.
Flore vient y cueillir les robes qu'elle étale.
C'est là qu'en doux parfums la volupté s'exhale,
Et c'est là qu'on n'entend d'autres gémissements
Que les soupirs poussés par les heureux amants :

a Tu demeures, terme trop faible qui fait languir le vers.

b Cela a été trop souvent dit.

C

Domptez vos passions, n'est pas fait pour les politiques rongés de la pas

sion de l'envie, de l'ambition, de l'avarice, de l'intrigue, etc.

d Au milieu des tourments. Quels tourments? vous n'en avez pas parlé.

* Jamais politique n'a crié : Je suis heureux!

f Encore des apostrophes, encore ce manque de jointure, encore du lieu

commun.

Qu'a de commun l'abondance d'une prairie avec ces politiques? Gare l'églogue dans tout ce qui suit, non erat his locus. Quatre vers suffiront, mais il faut qu'ils disent beaucoup en peu, et il faut surtout des jointures. Flore ne cueille point des robes, cela est trop fort.

TABLE

DES MATIÈRES DU PREMIER VOLUME

DES MELANGES.

PREFACE du nouvel Éditeur.

Page

LETTRE A M. D***, au sujet du prix de poésie donné par l'académie
française en l'année 1714.

LETTRE DE M. THIERIOT A M. L'ABBÉ NADAL. 1725.

ESSAI SUR LA POÉSIE ÉPIQUE. 1726.

ESSAI SUR LES GUERRES CIVILES DE FRANCE. 1727.

I

Ibid.

A M***. 1727.

A M***. 1727.

22

34

REMARQUES (PREMIÈRES) SUR LES PENSÉES DE M. PASCAL.

1728.

36

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Et tantôt il le voit, constamment misérable,
Gémir sous le fardeau de l'ennui qui l'accable.

Étude a, en tous les temps prête-moi ton secours!
Ami de la vertu, bonheur de tous les jours,
Aliment de l'esprit, trop heureuse habitude,
Venge-moi de l'Amour, brise ma servitude;
Allume dans mon cœur un plus noble desir,
Et viens en mon printemps m'arracher au plaisir.
Je t'appelle, et déjà ton ardeur me dévore;
Tels ces flambeaux éteints, et qui fument encore,
A l'approche du feu s'embrasent de nouveau.
Leur flamme se ranime, et son jour est plus beau.
Conserve dans mon cœur le desir qui m'enflamme:
Sois mon soutien, ma joie, et l'ame de mon ame.
Étude, par toi l'homme est libre dans les fers:
Par toi l'homme est heureux au milieu des revers:
Avec toi l'homme a tout le reste est inutile,
Et sans toi ce même homme est un roseau fragile",
Jouet des passions, victime de l'ennui :

C'est un lierre rampant, qui reste sans appui '.

a Etude. Toujours même défaut, toujours une apostrophe qui n'est point

amenée.

b Trop heureuse, terme oiseux. Ce trop est de trop.

d

On ne dit point tout cru le jour d'un flambeau.

Les vers n'y viennent pas. Non erat his locus. (HOR., Art poét., 31.)

e-f S'il a tout, l'hémistiche qui suit est inutile.

8 Ce méme homme, faible et traînant.

Roseau fragile, image peu liée avec avoir tout.

i Trop de comparaisons entassées. Il ne faut prendre que la fleur d'une
idée, il faut fuir le style de déclamateur. Les vers qui ne disent pas plus, et
mieux, et plus vite, que ce que dirait la prose, sont de mauvais vers.

Enfin, il faut venir à une conclusion qui manque à l'ouvrage; il faut un
petit mot à la personne à qui il est adressé. Le milieu a besoin d'être beau-
coup élagué. Le commencement doit être retouché, et il faut finir par quel-
ques vers qui laissent des traces dans l'esprit du lecteur.

FIN

DU TOME PREMIER DES MÉLANGES.

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