J'offre ces violettes, Ces merveillettes roses, Et ces œillets aussi. De vostre douce haleine Ce pendant que j'ahanne D'AUBIGNÉ L'HYVER MES volages humeurs, plus sterilles que belles, S'en vont; et je leur dis: Vous sentez, irondelles, S'esloigner la chaleur et le froid arriver. Allez nicher ailleurs, pour ne tascher, impures, D'un seul point le soleil n'esloigne l'hemisphere; J'ayme l'hyver qui vient purger mon cœur de vice, Mon chef blanchit dessous les neiges entassées, Mais ne les peut dissoudre, au plus court de ses mois. Qu'encores il ne puisse allumer de ma cendre Mais quoi! serai-je esteint devant ma vie esteinte ? Je fais aux saints autels holocaustes des restes, Voici moins de plaisirs, mais voici moins de peines. Que la longueur en soit plus douce que le port? JEAN BERTAUT CHANSON LES Cieux inexorables Me sont si rigoureux, Que les plus miserables Se comparans à moy se trouveroient heureux. Je ne fais à toute heure Que souhaiter la mort, Prolonge dessus moy l'insolence du Sort. Mon lict est de mes larmes Et ne peuvent ses charmes, Lors mesme que je dors, endormir mes ennuis. Si je fay quelque songe J'en suis espouvanté, Car mesme son mensonge Exprime de mes maux la triste verité. Toute paix, toute joye A pris de moý congé, Laissant mon ame en proye A cent mille soucis dont mon cœur est rongé. La pitié, la justice, La constance, et la foy, Dedans les cœurs humains sont esteintes pour moy. L'ingratitude paye Ma fidelle amitié : La calomnie essaye A rendre mes tourments indignes de pitié. En un cruel orage On me laisse perir, Et courant au naufrage Je voy chacun me plaindre et nul me secourir. Et ce qui rend plus dure La misere où je vy, C'est, es maux que j'endure, La memoire de l'heur que le Ciel m'a ravi. Felicité passée Qui ne peux revenir: Tourment de ma pensée, Que n'ai-je en te perdant perdu le souvenir! Helas! il ne me reste De mes contentements Qu'un souvenir funeste, Qui me les convertit à toute heure en tourments. Ce reste un pur supplice, Je serois plus heureux si j'avois plus perdu. MATHURIN RÉGNIER ODE AMAIS ne pourray-je bannir JAMAIS Hors de moy l'ingrat souvenir De ma gloire si tost passée ? Tyran implacable des cœurs, De quels maux m'as-tu tourmenté ! Que n'a point fait la jalousie! Mes yeux, aux pleurs accoutumez, Aux caprices abandonné, Blasphemant la terre et les cieux, Pensif, frenetique et resvant, Cependant lors que je voulois, Un regret pensif et confus Rend mon ame aux douleurs ouverte; Ne se cognoist que par la perte. |