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1702 à Baritel, libraire de Lyon, et en 1714 à David, libraire à Paris. La maison David le fit renouveler en 1724, 1733 et 1744. Enfin les libraires Hochereau et Panckoucke devinrent en 1764 les titulaires du privilège des Caractères.

L'année même où Michallet imprima les trois premières éditions des Caractères, il en parut une nouvelle à Lyon, une autre à Bruxelles, et ces deux éditions ne furent pas les seules que l'on publia dans l'une et l'autre ville du vivant de la Bruyère. Les réimpressions qui furent faites à Lyon de plusieurs des éditions de Paris avaient été l'objet d'un contrat entre Michallet et un libraire lyonnais, Thomas Amaulry. Il sera dit comment Thomas Amaulry trompa le public en lui présentant les exemplaires d'une même édition avec des millésimes successifs, qui étaient inexacts. Ainsi qu'Amaulry sans nul doute, Léonard de Bruxelles reproduisit l'œuvre de la Bruyère avec l'agrément de Michallet: au-dessous du titre de la première de ses éditions est inscrit le nom de Michallet comme éditeur; sur les suivantes, 1692, 1693 et 1697, n'apparaît plus que le nom de Léonard; les deux dernières, imprimées alors que les Pays-Bas espagnols subissaient l'invasion de l'armée française, furent expurgées et perdirent les passages offensants pour Guillaume d'Orange et son allié Maximilien de Bavière, gouverneur des Pays-Bas.

Il n'est entré en France qu'un petit nombre d'exemplaires imprimés à Bruxelles, et la seule correspondance du temps où j'aie rencontré la mention des éditions de Léonard est celle de Bayle : « .... Je suis bien aise, écrivait-il à son cousin, M. de Naudis, le 29 octobre 1696, que nos cousins aient du goût pour les Essais de Morale de M. Nicole; il y a un autre livre fort propre pour donner de l'esprit aux jeunes gens et à leur affiner le goût, ce sont les Caractères de ce siècle par feu M. de la Bruyère; c'est un livre incomparable, et qui a été réimprimé huit ou neuf fois à Paris en peu de temps et à Lyon et à Bruxelles autant de fois. Il faut avoir la dernière édition, qui est la plus ample1. Ce ne sont pas des caractères faits à plaisir ; il a peint l'esprit et l'humeur et les défauts de presque toute la cour et de la ville, et plusieurs personnes en ont la clef. 2 »

Et encore, le 31 octobre 1697, s'adressant à un cousin que l'on ne nomme point: « Je conseille cette lecture (de la Connoissance de soi-même) à nos deux cousins du Carla, comme aussi celle des Caractères de ce siècle par feu M. de la Bruyère; c'est un livre qui a été admiré et qui, en très peu de temps, a été imprimé huit fois à Paris, sans compter les éditions de Lyon et de Bruxelles, qui sont en grand nombre. 3 »

3

Sauf celles de Michallet, de Léonard, d'Amaulry, de Baritel, et enfin de David, toutes les éditions des Caractères qui parurent au dix-septième siècle ou dans les premières années du dix-huitième sont des contrefaçons.

Au tome I, page CXX, nous avons porté à 18 000 le nombre d'exemplaires des Caractères que Michallet imprima du vivant de la Bruyère : l'évaluation peut sembler élevée, les tirages d'une édition à cette époque n'atteignant que rarement le chiffre de deux mille, mais elle nous vient

1. Rappelons que la ge édition dont il est ici question n'a pas plus d'étendue que la 8e, dont elle est l'exacte reproduction à quelques mots près.

2. OEuvres diverses de Bayle, 1737, tome I, p. 179.

3. lbidem, p. 182.

LA BRUYÈRE. IV

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de Dom Bernard de Montfaucon, qui paraît assez exactement renseigné sur ce qui se passait à l'imprimerie Michallet, car il savait, au début de 1696, que la neuvième édition était sous presse. Montfaucon avait tort d'ajouter qu'elle avait reçu «< quelque augmentation par ci par là » : l'auteur y avait simplement fait quelques retouches «< par ci par là >>. Chacune des trois impressions d'Amaulry comptait sans doute un moindre tirage que celles de Michallet, bien que l'une d'elles ait pu fournir plusieurs émissions avec dates différentes, et d'autre part le tirage des trois premières éditions de Léonard avait dû être encore plus restreint. Du moins pouvons-nous dire que de 1688 à 1696 il fut mis en circulation de 24 000 à 30 000 exemplaires des Caractères.

OU

AVEC

1. LES CARACTÈRES DE THEOPHRASTE TRADUITS DU GREC. LES CARACTÈRES LES MOEURS DE CE SIECLE. A PARIS, Chez ESTIENNE MICHALLET, premier Imprimeur du Roy, ruë S. Jacques, à l'Image saint Paul. M.DC.LXXXVIII. Avec Privilege de Sa Majesté.

In-121.

PREMIÈRE ÉDITION. Les 30 premiers feuillets, non chiffrés, contiennent, avec le titre 2, le Discours sur Théophraste. Les Caractères du moraliste grec commencent à la page 53, qui devrait être chiffrée 61 (nous reviendrons sur cette pagination), et finissent à la page 149 ; ceux de la Bruyère remplissent les pages 151 à 360. Le volume se termine par 2 feuillets non paginés; le premier, avec la signature Q, contient le privilège; le second, dont les pontuseaux sont marqués dans un autre sens que ceux du privilège et qui a été ajouté après l'impression, manque dans un certain nombre d'exemplaires. Il porte l'Errata. La plupart des fautes que signale cet Errata sont manifestement imputables à l'imprimeur. Nous le reproduisons textuellement, en faisant remarquer qu'il s'en faut que toutes les corrections désirables y aient été relevées 3.

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1. Le même titre, sans le nom de l'auteur, a été conservé pour toutes les éditions publiées à Paris du vivant de la Bruyère. Elles ne diffèrent les unes des autres que par l'indication du numéro de l'édition, à la suite duquel, à partir de la 4o, il est dit, dans toutes, sauf la 6e, qu'il y a eu soit revision et correction; soit, de plus, augmentation; soit, simplement, augmentation: voyez ci-après les divers titres, chacun à son rang. Entre du grec et avec il y a un point sur le titre de la re édition; deux points sur ceux de la 2de à la 7o; une virgule sur ceux des 8e et ge. A partir de la 4o, les lignes du titre sont imprimées les unes en encre noire, les autres en encre rouge. Si nous laissons de côté les fleurons formés d'ornements typographiques, le monogramme du libraire, ainsi que les culs-de-lampe, qu'il n'y a d'intérêt à comparer entre eux que pour les exemplaires annoncés comme faisant partie de la « Seconde édition, » nous n'avons à relever, dans chacune des éditions de Michallet, que deux fleurons gravés, l'un en tête du Discours sur Théophraste, l'autre en tête des Caractères de la Bruyère. L'ensemble de ces fleurons ne présente, dans les diverses éditions, que trois types, l'un signé P. S., les deux autres P. L. S.

2. Le titre fait partie de la première feuille dans toutes les éditions originales des Caractères.

3. En dehors des fautes signalées déjà au bas des pages de notre texte et sans nous arrêter à celles qui se sont glisées dans les cartons, voici les corrections qu'on aurait pu ajouter dans l'Errata: 7 page, non chiffrée : cet ébauche; p. 168, ligne 21 sans, pour dans ; p. 331, lignes 8 et 9: un, deux fois imprimé ; p. 359, ligne 2: sens, pour sons. Il y a dans la première édition des Caractères des erreurs de pagination, telles que celles des pages 131, 232, 260, 285, 288, et celles des pages 165, 168, et 273; ces trois dernières sont correctement chiffrées dans la première impression et inexactement sur les cartons.

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Page 230,

Page 233,

Page 268,

Page 307,

Page 344,

Bergerat †, des Marets*, lisez : Bergerat*, des Marets †.
les uns, lisez les unes.

ne se pas suffire pas, lisez : ne se suffire pas.

Apost. ch. 13, lisez chap. 31.

par et leurs, lisez : et par leurs. >>

Nul exemplaire de la première édition ne s'est rencontré jusqu'ici qui nous offre le texte non cartonné des Caractères, tel qu'il était sorti des presses. Plusieurs volumes de ce premier état furent peut-être offerts aux amis de la Bruyère, celui par exemple qui parvint à Bussy par l'entremise du marquis de Termes; mais très vraisemblablement le libraire n'avait pas eu le temps de relier et de mettre en vente des exemplaires sans cartons lorsque l'auteur exigea l'addition de quatre feuillets nouveaux et la réimpression de six feuillets. De là une première catégorie de cartons au nombre de dix, qui caractérisent un second état et qui ont fait disparaître des leçons primitives qu'on ne retrouve nulle part. Nous ne connaissons aujourd'hui que cinq exemplaires de second état ne comptant que ces dix cartons; les autres exemplaires comprennent en sus une seconde série de cartons au nombre de seize, que nous décrirons plus loin. Ce qui fait l'intérêt des cinq exemplaires de second état, c'est qu'ils contiennent des leçons primitives que les seize cartons du troisième état avaient pour objet de remplacer. La Bibliothèque nationale possède l'un des cinq exemplaires de second état : c'est le volume de la Réserve qui porte la cote R 2056. Le second exemplaire a passé de la bibliothèque de M. Guyot de Villeneuve dans celle de M. le Souef, qui, devenue la propriété de la famille de M. Pierre Champion, a été offerte par elle à l'Etat. Le troisième, qui a fait partie de la bibliothèque de M. le baron de Claye, se trouve aujourd'hui dans celle de M. Ad. Bordes. Le quatrième, naguère dans la bibliothèque du docteur Fauvel 2, appartient maintenant à M. H. de Backer, de Bruxelles. Le cinquième a été acquis par M. Rahir à la vente des livres de M Daguin. Ces cinq exemplaires sont semblables, à deux feuillets près, 221-222 et 311-312, qui ne sont pas les mêmes dans les cinq exemplaires 3.

Si, plus haut, le nombre des cartons de second état a été évalué à dix, c'est que, pour plus de commodité, j'ai compté comme six cartons six feuillets insérés d'un seul coup dans la feuille C que tout aussi bien l'on pourrait regarder comme un carton unique. Ces dix cartons sont : six feuillets de la feuille C, laquelle, comme les feuilles A et B, n'a pas reçu de pagination et contient la fin du Discours sur Théophraste et

1. Catalogue de la bibliothèque de feu M. Guyot de Villeneuve, Paris, Rahir, 1901, première partie, p. 59, no 220.

2. Catalogue de Livres anciens et modernes composant la bibliothèque de feu M. le Dr Fauvel, Paris, H. Leclerc, 1910, p. 14.

3. Dans sa Bibliographie des principales éditions originales d'écrivains français du xve au xviie siècle publiée en 1888, M. Jules le Petit ne citait que quatre exemplaires de second état, ceux de la Bibliothèque nationale, de MM. G. de Villeneuve, de Claye, Daguin.

le commencement des Caractères du philosophe grec, puis les feuillets 61-62, 155-156, 177-178, 221-222.

Les six feuillets nouveaux du Discours sur Théophraste ont pris la place de deux feuillets supprimés, ainsi qu'il sera expliqué ci-après. Cette fourrure représentant la retouche la plus importante que la Bruyère ait fait subir au texte de son livre, il nous sera permis d'en parler avec quelque insistance.

A la fin du Discours sur Théophraste, la Bruyère avertit le lecteur qu'à sa traduction il ajoute la peinture des mœurs contemporaines, et cela « dans l'esprit de contenter ceux qui reçoivent froidement tout ce qui appartient aux étrangers et aux anciens et qui n'estiment que leurs mœurs ». Cette annonce et les réflexions qui l'accompagnent commencent à la quatorzième des vingt lignes de la dernière page de la feuille B et se poursuivent dans la première partie de la feuille C. Avec un alinéa sur les titres des chapitres de Théophraste, elles occupaient tout d'abord, outre les dernières lignes de la feuille B, les deux premiers feuillets de la feuille primitive C; mais, avant que les feuilles fussent remises au relieur, la Bruyère voulut donner plus d'extension à cette sorte de préface des Caractères ou mœurs de ce siècle qu'il mêlait ainsi à sa dissertation sur Théophraste. Peut-être dans sa première rédaction n'avait-il point parlé des Pensées de Pascal et des Maximes de la Rochefoucauld, et jugea-t-il qu'il convenait de marquer les différences qui séparaient son œuvre de celle de ses devanciers modernes. Sa seconde rédaction, deux fois plus longue que la première, devait remplir douze pages; on réimprima les deux premiers feuillets de la feuille C, et quatre feuillets nouveaux furent intercalés à la suite. De la première impression n'étaient conservées que six lignes de la feuille B. La nouvelle feuille C, qui, grossie de huit pages, compte seize feuillets au lieu de douze, se partage en deux cahiers : le premier est composé des six feuillets de second tirage, dont les quatre premiers portent, ainsi qu'il convient, les signatures C, Cij, Ciij, Ciiij; le second comprend ce qu'il restait de la feuille C primitive, c'est-à-dire les pages chiffrées 53 à 72, qui devraient être numérotées 61 à 80. Par suite de l'addition de quatre feuillets, la pagination était donc devenue inexacte, de même que les signatures C, Čij, Ciij, Ciiij, gardées sans droit par les pages 53, 55, 57, 59.

Des trois cartons suivants nous n'avons rien à dire, sinon que le premier, 61-62, contient les quinze dernières lignes du chapitre de la Dissimulation des Caractères de Théophraste et trente-deux lignes du chapitre de la Flatterie ; que le second, 155-156, a reçu au recto les huit dernières lignes de la préface qui précède les Caractères de la Bruyère, au verso la première page de la table de ses Caractères 2; et que le troisième renferme les remarques du chapitre du Mérite personnel qui sont numérotées dans notre édition 13, 15, 16, 24.

Il nous reste à parler du carton 221-222, où se trouvent les remarques 17, 18, 26 et 22 des Biens de fortune. Ce carton est dans le volume de la Bibliothèque nationale, et sans doute dans trois autres exem

1. Notons que le feuillet Cij faisant partie de ce cahier a été remplacé dans le troisième état par un nouveau carton qui sera mentionné ci-après.

2. Dans les deux premières éditions la table des chapitres de Théophraste est imprimée, sans renvois aux pages, entre la préface et le premier chapitre des Caractères; de même la table des chapitres des Caractères de la Bruyère est imprimée, également sans renvois aux pages, à la suite de la préface et avant le texte des Caractères. A partir de la 3e édition les deux tables sont réunies en une table unique qui renvoie aux pages et qui est placée à la fin du volume.

plaires de second état, un premier carton, entaché à la cinquième ligne d'une faute d'impression, «< livrer » au lieu de « livres »; un second carton sans faute a été tiré assez tôt pour prendre place dans le volume de M. de Backer, et c'est le texte de ce second carton que l'on trouvera dans les exemplaires de troisième état.

La vente du livre commença dès que les dix cartons de la première série eurent été insérés dans les exemplaires en magasin; mais, à en juger par la rareté des volumes qui nous représentent le second état, il n'en avait été mis en circulation qu'un petit nombre lorsque l'auteur demanda l'intercalation de 16 nouveaux cartons. Ce sont le feuillet C ij du premier cahier de la feuille C, et les feuillets 971, 165, 167, 185, 187, 191, 221, 251, 257, 263, 273, 311, 317, 333, 353.

Des variantes que présentent ces seize cartons il en est une qui a été relevée par M. Jouaust dans son Premier texte de la Bruyère, publié en 1868 d'après un exemplaire de troisième état, et non pas, comme il a été dit, selon l'exemplaire de la Bibliothèque nationale R 2056. Après avoir reproduit un texte de troisième état, M. Jouaust avait ouvert à la page 274 un des cinq volumes de second état. peut-être celui de la Bibliothèque nationale, et y avait aperçu une réflexion qui a été remplacée par une réflexion nouvelle dans presque tous les exemplaires 2. La rencontre était intéressante, puisqu'elle mettait en lumière pour la première fois une réflexion qui ne se trouve que dans un très petit nombre d'exemplaires. Reléguée dans les notes qui terminent son volume, la découverte de M. Jouaust n'avait appelé l'attention d'aucun des éditeurs de la Bruyère, nous compris, lorsqu'en 1877 l'examen d'un exemplaire de la première édition, celui de la bibliothèque Villeneuve, nous permit de constater un certain nombre de variantes, au milieu desquelles figurait celle qu'avait signalée M. Jouaust. Les variantes dont il s'agit nous étaient apparues trop tard pour être imprimées au bas du texte de notre première édition. Bien que chacune d'elles ait été insérée à sa place dans l'annotation de l'édition suivante, nous reproduirons ci-après, en y ajoutant quelques lignes relatives à deux cartons précédemment omis, le tableau où elles avaient été réunies dans la première partie de notre tome III de 1878.

Passant successivement en revue les pages qui nous donnent les leçons de la première impression, nous indiquerons dans le tableau suivant les corrections et les changements qu'apportent les cartons, et nous soulignerons dans nos citations les leçons des feuillets primitifs et celles des cartons.

Feuillet Cij non paginé.

Le feuillet Cij, faisant partie de la fourrure que nous avons décrite plus haut, porte à la seconde ligne du recto (tome I, Discours sur Théophraste, p. 29, ligne 2, de notre édition) la leçon: « de qui, faute d'attention »; un carton nouveau substitue à la première leçon : « d'où, faute d'attention. >>

Feuillet 97-98.

Page 97, ligne 1, chapitre de l'Impudent (Caractères de Théophraste, tome I, p. 57, ligne 2, de notre édition), le carton a corrigé une

1. Pour plus de rapidité, au lieu de désigner les feuillets par les deux pages dont ils se composent, nous nous bornerons souvent à indiquer le chiffre de la page du

recto.

2. Contrairement à l'avis de M. Jouaust, c'est un carton et non un remaniement dans la composition qui a remplacé une phrase par une autre.

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