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INCURSION

Sur Nonotte ex-jéfuite.

MESSIEURS les fix juifs, monfieur leur Secrétaire, plus vous avez été redoutables à mon ami intime, plus j'ai dû le défendre. Vous étiez déjà affez forts par vous-mêmes ; j'ai été furpris que vous ayez cherché des troupes auxiliaires chez les jéfuites eft-ce parce qu'ils font aujourd'hui difperfés comme vous que vous les appelez à votre secours? Vous combattez fous le bouclier du révérend père Nonotte; vous renvoyez mon ami à ce favant homme; vous le regardez comme un de vos grands capitaines, parce qu'il a fervi de goujat, dites-vous, dans une armée levée contre l'Encyclopédie. Permettez-moi donc, Meffieurs, de vous renvoyer à un des plus braves guerriers qui ait combattu pour l'Encyclopédie contre le révérend père Nonotte; c'eft M. Damilaville, l'un de nos plus favans écrivains daignez lire ce qu'il répondit au favant Nonotte, il y a quelques années: je remets fous vos yeux ce petit écrit ; il a déjà été imprimé mais comme vous avez donné une nouvelle édition de vos œuvres judaïques, je puis aussi en donner une des œuvres chrétiennes de M. Damilaville.

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Eclairciffement hiftorique, à l'occafion d'un libelle calomnieux contre l'Effai fur les mœurs et l'esprit des nations, par M. Damilaville.

S'IL s'agit de goût, on ne doit répondre à perfonne, par la raison qu'il ne faut pas difputer des goûts: mais eft-il question d'histoire? s'agit-il de difcuter des faits intéreffans? on peut répondre au dernier des barbouilleurs, parce que l'intérêt de la vérité doit l'emporter fur le mépris des libelles. Ceci sera donc un procès pardevant le petit nombre de ceux qui étudient l'hiftoire, et qui doivent juger. (5)

Un ex-jésuite, nommé Nonotte, favant comme un prédicateur, et poli comme un homme de collége, s'avifa d'imprimer un gros livre intitulé: Les erreurs de l'auteur de l'Effai fur les mœurs et l'efprit des nations; cette entreprise était d'autant plus admirable que ce Nonotte n'avait jamais étudié l'hiftoire.

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(5) Dans les premières éditions on lifait ici le paffage fuivant:,, Il ne fera pas d'abord inutile de leur dire qu'un prétendu docteur, ayant été choifi pour combattre des vérités qui fe trouvent dans l'Effai fur les maurs et l'efprit des nations, ,, compofa fon libelle en hâte, le fit imprimer chez le libraire Fez à Avignon; qu'enfuite, fe doutant bien que fon libelle n'aurait pas grand débit, il fit propofer par ce libraire Fez, à l'auteur de l'Hiftoire générale, de lui vendre toute l'édition du libelle pour mille écus; on fe moqua un peu de la propofition. Le lecteur verra fi ce n'était pas trop payer; mais il n'est pas queftion de rire, tâchons d'inftruire.

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Pour mieux vendre fon livre, il le farcit de fottifes, les unes dévotes, les autres calomnieufes; car il avait ouï dire que ces deux chofes réuffiffent.

PREMIERE SOTTISE DE NONOTTE.

LE libelliste accuse l'auteur de l'Essai fur les mœurs, &c. d'avoir dit: L'ignorance chrétienne fe repréfente Dicclétien comme un ennemi armé fans ceffe contre les fidèles.

Il n'y a point dans le texte : L'ignorance chrétienne; il y a dans toutes les éditions: L'ignorancefe reprefente d'ordinaire Diocletien, &c. On voit affez comment un mot de plus ou de moins change la vérité en mensonge odieux. Ce premier trait peut faire juger de Nonotte.

SECONDE SOTTISE DE NONOTTE, SUR UN EDIT DE L'EMPEREUR.

Il s'agit d'un chrétien qui déchira et qui mit en pièces publiquement un édit impérial. L'auteur de l'Effai fur les mœurs, &c. appelle ce chrétien indifcret. Le libellifte le justifie, et dit: Un femblable édit n'était-il pas évidemment injufte? &c.

Je dois obferver que c'eft trop foutenir des maximes tant condamnées par tous nos

parlemens. Quelqu'injufte que puiffe paraître à un particulier un édit de fon fouverain, il eft criminel de lèfe-majefté quand il le déchire et le foule aux pieds publiquement. L'auteur du libelle devrait favoir qu'il faut respecter les rois et les lois.

Si Nonotte avait à faire à quelque favant en us, ce favant lui dirait : " Monfieur, ", vous êtes un ignorant ou un fripon : vous ,, dites dans votre pieux libelle, page 20, " que ce n'eft pas le premier édit de Diocletien, " mais le fecond, qu'un chrétien d'une » qualité diftinguée déchira publiquement.

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" Premièrement, il importe fort peu que ce ", chrétien ait été de la plus haute qualité. "Secondement, s'il était de la plus haute "' qualité, il n'en était que plus coupable.

"Troifièmement, l'hiftoire eccléfiaftique " de Fleuri dit expreffément, page 428, " tome II, que ce fut le premier édit, portant ,, feulement privation des honneurs et des dignités, que ce chrétien de la plus » haute qualité déchira publiquement, en se " moquant des victoires des Romains fur les "Goths et fur les Sarmates, dont l'édit fefait ,, mention.

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"Si vous avez lu Eusèbe, dont Fleuri a tiré ", ce fait, vous avez tort de falfifier ce paffage. " Si vous ne l'avez pas lu, vous avez plus

tort encore. Donc vous êtes un ignorant ou " un fripon. "9

Voilà ce qu'on vous dirait; mais dans un fiècle comme le nôtre, on fe gardera bien de fe fervir d'un pareil style.

TROISIEME SOTTISE DE NONOTTE,

SUR MARCEL.

UN centurion, nommé Marcel, dans une revue auprès de Tanger en Mauritanie, jeta fa ceinture militaire et fes armes, et cria: Je ne veux plus fervir ni les empereurs ni leurs dieux.

L'auteur du libelle trouve cette action fort raisonnable; et il fait un crime à l'auteur de l'Effai fur les mœurs, &c. de dire que le zèle de ce centurion n'était pas fage; mais il n'en eft pas dit un mot dans l'Effai fur les mœurs, &c.: c'est dans un autre ouvrage qu'il en eft parlé. Au refte, je demande fi un capitaine calviniste ferait bien reçu, dans une revue, à jeter ses armes, et à dire qu'il ne veut plus combattre pour le roi et pour la fainte Vierge : ne ferait-il pas mieux de fe retirer paifiblement ?

QUATRIEME

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