Page images
PDF
EPUB

tures plus saisissantes. Il éviterait ainsi ces vers faibles et cette tournure prosaïques que nous avons remarqués en quelques endroits. En un mot j'admire la grâce de son style; mais je voudrais la voir plus souvent alliée à la véhémence et à la grandeur.

Quoiqu'il en soit, les Laurentiennes sont un joli et bon livre, où l'auteur se montre à la fois bon citoyen et bon chrétien, et ce double caractère en assure le succès. C'est un éloge de la patrie et un hommage à la religion. Cette double physionomie devra lui mériter un accueil bienveillant, et ses lecteurs deviendront ses amis.

A. B. ROUTHIER.

BIBLIOGRAPHIE.

Histoire de la ville des Trois-Rivières et de ses environs, par Benjamin Sulte. Première livraison. (Depuis la découverte du Canada jusqu'à l'année 1657). Montréal, Eusèbe Senécal, Imprimeur-Editeur.

Nous avons reçu la première livraison (forte de 126 pages) de l'Histoire de la Ville des Trois-Rivières et de ses environs, par M. Benjamin Sulte. On nous promet que, d'ici à deux années, le volume (400 pages) sera complet.

Le mode de publication adopté par l'auteur s'explique par la difficulté que l'on éprouve en ce pays à couvrir les frais d'impression des livres, surtout des ouvrages d'histoire. Une souscription demandée par petites sommes a mille chances de s'élever au chiffre des dépenses encourues pour publier convenablement de bons ouvrages comme celui-là.

Bien entendu que, sous ces circonstances, l'auteur n'attend aucune rémunération pécuniaire pour le travail énorme qu'il s'est imposé.

Feuilletons son œuvre un instant, et voyons ce qu'elle contient :

La ville des Trois-Rivières est pour ainsi dire aussi antique que Québec. M. Sulte nous décrit minutieusement les premiers voyages des Français et les faits dont le bourg trifluvien a été le théâtre. Il cite très-souvent de vieux textes oubliés de nos jours; et, touchant à nombre de traits de notre ancienne histoire, il porte la lumière sur tout ce qui se rattache aux postes de traites qui avoisinaient les environs de l'embouchure du Saint-Maurice. Ces lieux, dont la ville des Trois-Rivières se trouvait être le centre naturel, étaient jadis très-fréquentés par les tribus sauvages et par les trafiquants français. On ne saurait lire sans intérêt les pages qui encadrent le récit de cette époque reculée. Le lecteur se convaincra aussi par lui-même de la grandeur du travail de l'auteur, en constatant que toutes les sources susceptibles de fournir des renseignements ont été consultées, c'est-à-dire des centaines de volumes, dont plusieurs sont rarissimes, et des manuscrits nombreux disséminés par tout le Canada.

Parvenu à l'année 1634, date de la fondation du fort des Trois-Rivières, l'intérêt s'accroît en prenant une forme nouvelle. La colonisation s'empare

de la contrée environnant immédiatement le fort, et, dans des notices biographiques très-bien faites, l'auteur nous met en présence des premiers colons de ce lieu: Godefroy, Hertel, Nicolet, Le Neuf, Pepin, Lafond, Dodier, Laframboise, Isabelle, Sauvaget, etc. C'est tout un passé perdu qui renaît sous nos yeux.

Une grande planche, traitée par le procédé de la leggotypie, représente les signatures de tous ces colons, dont la descendance existe encore dans la ville des Trois-Rivières et ses environs.

La livraison contient trois gravures. L'une d'elles est un fac-simile parfait du plus ancien manuscrit qui existe dans le pays. C'est l'entête du registre de la chapelle des Trois-Rivières, en date de mardi, 6 février 1635 il est intitulé Catalogue des trépassez au lieu nommé les Trois-Rivières." C'est une pièce d'archéologie très-précieuse.

[ocr errors]

Il serait long d'énumérer les choses instructives et curieuses que renferment ces cent vingt-six pages. Qu'il nous suffise de dire que pas une ville du Canada, et même peu de cités de l'Amérique, ne possèdent une histoire aussi complète et aussi bien ordonnée que celle dont M. Sulte vient de

doter sa ville natale.

Quelques extraits de la préface ne seront pas déplacés ici: "Renouer la chaîne des traditions locales; mettre en évidence les noms des principales et des plus anciennes familles du district des Trois-Rivières, et réunir les opinions des hommes importants qui se sont occupés de cette partie de la province de Québec,-tel est en peu de mots notre but.............

"Ce qu'il y a de vertu, d'héroïsme et de nobles actions dans les traits saillants de notre histoire se retrouve dans le cadre plus restreint, mais non moins vénérable de nos chroniques locales. Puisque le Canada a une mission à remplir sur ce continent, dans le même ordre de choses, chacune de ses villes doit avoir aussi sa mission particulière qu'il ne faut pas trop tarder à comprendre. Ce point bien saisi, tout s'élargit et prend des proportions attrayantes."

L'ouvrage est dédié à Sa Grandeur Mgr. Laflèche, qui prend toujours un vif intérêt à tout ce qui est canadien, et dont le goût pour les recherches historiques est bien connu des érudits.

Nous souhaitons de tout cœur à M. Sulte de pouvoir recouvrer ses déboursés, qui sont considérables. Quand à la récompense d'estime que méritent ses talents et sa persistance au travail, elle ne saurait lui faire défaut et le bienveillant accueil qu'a reçu ce premier fragment de son histoire en est une preuve assez significative.

JOSEPH TASSÉ.

Le Pape Honorius, réponse au Révérend Père Gratry, par M. L. Collin, prêtre de St. Sulpice. Brochure in-8° de 41 pages. Montréal, des ateliers de la Minerve.

Sans nous en rendre compte, peut-être, nous tombons dans l'habitude de traiter un peu cavalièrement les œuvres qui voient le jour dans notre pays. Ce n'est pas que les éloges fassent défaut aux ouvrages canadiens: Dieu sait si nos journaux sont chiches de leurs compliments envers ceux d'entre nous qui se font imprimer; mais on s'accoutume à considérer ces louanges

[ocr errors]

comme de simples manières de parler qui ne tirent pas plus à conséquence qu'une formule ordinaire de politesse. En cela, l'on n'a pas toujours tort, on pousse seulement la défiance trop loin. De ce que l'éloge est trompeur chez nous, on en vient à ne prendre au sérieux que les livres étrangers, et si je dis que la brochure dont je viens de réciter le titre est un opuscule que Mgr. Manning ou Mgr. Deschamps pourraient s'honorer d'avoir écrit, je suis presque certain de n'être pas cru sur parole par ceux qui ne l'ont pas encore lu. Cependant ces courtes pages sont vraiment pleines de verve et marquées au coin de l'érudition et d'une logique entraînante. Dans cette ardente polémique soulevée par le Père Gratry autour du nom du Pape Honorius, elles constituent un plaidoyer qui défie toute réplique. Et voyez notre injustice! Si cette brochure était signée d'un nom comme celui du Père Félix, par exemple, on s'écrierait après l'avoir lue: Quelle éloquence ! quelle argumentation concluante! Mais comme elle est signée de l'un d'entre nous, on dira bien bonnement: C'est un excellent travail, et l'on croira intérieurement que la fameuse Lettre du Père Gratry n'est pas encore réfutée, et l'on attendra de l'étranger une lumière nouvelle, dûtelle être moins brillante.

Estimons d'avantage nos propres forces. Chassons de notre esprit, provinciaux que nous sommes, l'idée que les hommes illustres sont plus grands que nature. Sachons bien que nous possédons au milieu de nous des hommes qui, non seulement par la vertu, mais aussi par la science et le talent, sont les égaux de plus d'une des célébrités dont la renommée nous apporte d'au-delà les mers les noms retentissants.

L'abbé Colin est l'un de ces hommes; j'en appelle au témoignage de tous ceux qui, après avoir assisté aux conférences de Notre-Dame de Paris, sont venus à celles de Notre-Dame de Montréal. Il m'a été donné d'entendre plusieurs fois le Père Félix à Paris, et si j'établissais un parallèle entre l'abbé Colin et lui, notre prédicateur ne soutiendrait pas la comparaison avec trop de désavantage. Dieu me garde d'exagérer! Le Père Félix est un vétéran déjà vieux sous le harnais, si l'on me permet l'expression, d'une science consommée, couvert de lauriers. L'abbé Colin est encore jeune ; ceux qui le connaissent s'étonnent toujours que, si faible de santé, il ait déjà pu tant apprendre. Mais ce que je veux dire, c'est que comme talent naturel, comme" esprit actif dans le champ de la pensée," selon l'expression de Montaigne, l'abbé Colin est l'égal du Père Félix, autant qu'il m'est permis d'en juger. Du reste, sa manière se rapproche beaucoup de celle de l'éloquent jésuite français: c'est le même accent de conviction, la même forme méthodique, la même clarté, la même chaleur d'action, le même entrain de logique. Hélas! que n'avons-nous une arène plus vaste à offrir au talent! Que ne sommes-nous capables de faire de grandes réputations !

La petite brochure qui nous occupe aura peut-être le sort de tant d'autres œuvres canadiennes; le bien qu'elle pourra faire sera limité au Canada Français. Pour notre part, tout ce que nous pouvons, c'est de la recommander aux lecteurs de la Revue, qui y trouveront la réfutation complète et péremptoire de cette prétention du Père Gratry, à savoir que le Pape Honorius a été coupable d'hérésie, prétention qui, si elle était fondée, empêcherait nécessairement la définition du dogme de l'Infaillibilité.

OSCAR DUNN.

Souvenirs du Jubilé Sacerdotal de MM. Clément et Joseph Aubry, célébré au Séminaire de Ste. Thérèse, le 16 Février 1870. Des presses à vapeur de la Minerve.

Sous ce titre, on vient de retracer et de réunir en une brochure de 46 pages les faits remarquables, à plus d'un titre, de la célébration de l'anniversaire de la cinquantième année de prêtrise de MM. Clément et Joseph Aubry. Conserver et perpétuer les souvenirs de ce beau jour dans toute leur fraîcheur et leur vivacité, tel est le but de cette publication.

La solennité du 16 février, par son caractère tout particulier, par les circonstances qui l'ont accompagnées et le cachet de grandeur qui la distingue, mérite une mention spéciale dans nos annales religieuses. En effet, quoi de plus rare et de plus touchant que le spectacle de deux frères blanchis au service des autels, célébrant ensemble leurs noces d'or! Aussi c'est, croyons-nous, la première fois que ce fait se produit dans ce pays.

Les nombreux amis et anciens élèves de ces vénérés vieillards s'étaient empressés de répondre à l'appel qui leur avait été fait, et de venir participer à la joie et au bonheur de cette réunion. Le clergé comptait surtout des représentants distingués. Une messe solennelle fut chantée par M. Joseph Aubry et M. Hamel donna le sermon de circonstance. L'éloquent prédicateur parla de la dignité et de la sublimité de l'apostolat et fit l'éloge des Révds. MM. Clément et Joseph Aubry, qui toujours en avaient rempli les devoirs avec amour et abnégation.

Dans l'après-midi on fit assaut d'éloquence. Sa Grandeur Mgr. de Birtha et l'Hon. M. Ouimet, procureur-général, firent entendre des paroles aussi sympathiques qu'éloquentes. Nous avons beaucoup remarqué un excellent discours sur la vieillesse, prononcé par un élève de philosophie du Séminaire de Ste. Thérèse. C'est une magnifique revendication, en même temps qu'une énergique protestation contre les injustes préjugés qui s'attachent à la condition du vieillard. La réponse du Rév. M. Joseph Aubry exhale un parfum de fraîcheur et d'humilité. Ce bon vieillard, il s'étonne de tant de bruit, de tant de démonstrations, et il se demande ce qui lui a valu ces hommages dont il se juge si indigne.

Nous avons lu à la fin de cette brochure une charmante poésie par M. Routhier. Le poète, dans un langage plein de noblesse, nous parle du prêtre, de son héroïsme, de ses belles vertus et de la sublimité de sa mission.

ELIE TASSÉ.

Canadian Biography. The last three Bishops appointed by the Crown for the Anglican Church of Canada, by Fennings Taylor. Montreal. John Lovell, Printer. 281 pages.

Comme le titre l'indique, l'auteur de ce volume a voulu écrire la biogra phie des trois derniers évêques anglicans nommés par la Couronne en Canada. Depuis la cession du pays à l'Angleterre, la nomination des évêques protestants relevait du gouvernement britannique, et l'élection de l'évêque Fulford, en 1850, à la tête du nouveau diocèse de Montréal, a été le dernier acte qui accuse la suprématie royale dans les affaires ecclésiastiques.

« PreviousContinue »