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été la base primitive ou du moins la première occasion de la religion des Grecs. C'est ce qui devoit arriver dans un pays entrecoupé par des montagnes et entouré de la mer. Les religions antiques des grands continents ouverts et plats devoient au contraire être fondées principalement sur l'astronomie. Des traditions historiques se sont ensuite confondues avec les sentiments vagues de crainte, de reconnoissance et d'admiration, que produisoient les révolutions de la nature. Des allégories et des idées morales y ont été jointes dès les commencements de la civilisation; mais la suite des siècles, et surtout les temps de malheurs et d'oppression, ont plongé les peuples dans les superstitions les plus grossières, tandis qu'un petit nombre de sages s'élevoit à des sentiments plus purs, et à des conceptions plus vastes et plus lumi

neuses.

(4) Le grec porte : « Il se déshabille, donne sa tunique à » son esclave, et prie qu'on l'approche de la terre, pour la >> gagner à la nage, et se mettre ainsi en sûreté. »

(5) D'après le manuscrit du Vatican, il faut traduire ce passage: «S'il fait une campagne dans l'infanterie, il appelle » à soi ceux qui courent aux armes pour commencer l'atta» que, et leur dit de s'arrêter d'abord, et de regarder au» tour d'eux; car il est difficile de discerner si ce sont les D ennemis. >>

(6) Plus littéralement : « Mais quand il entend le bruit du » combat, quand il voit des hommes tomber, alors il dit à >> ceux qui l'entourent qu'à force d'empressement il a oublié › son épée, etc.

(7) Le manuscrit du Vatican ajoute : « Essaie de le porter, >> et puis s'assied à côté de lui, etc. »

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(9) Le texte porte : « Il va à la rencontre de ceux qui re» viennent du combat, et leur dit, etc. »>

(10) D'après le manuscrit du Vatican : « Il conduit vers lui » ceux de sa bourgade ou de sa tribu. »

CHAPITRE XXVI.

DES GRANDS D'UNE RÉPUBLIQUE (1).

La plus grande passion de ceux qui ont les premières places dans un état populaire n'est pas le désir du gain ou de l'accroissement de leurs revenus, mais une impatience de s'agrandir, et de se fonder, s'il se pouvoit, une souveraine puissance sur la ruine de celle du peuple (2). S'il s'est assemblé pour délibérer à qui des citoyens il donnera la commission d'aider de ses soins le premier magistrat dans la conduite d'une fête ou d'un spectacle, cet homme ambitieux, et tel que je viens de le définir, se lève, demande cet emploi, et proteste que nul autre ne peut si bien s'en acquitter (3). Il n'approuve point la domination de plusieurs (4); et de tous les vers d'Homère il n'a retenu que celui-ci :

Les peuples sont heureux quand un seul les gouverne.

Son langage le plus ordinaire est tel : Retironsnous de cette multitude qui nous environne; tenons ensemble un conseil particulier où le peuple ne soit point admis; essayons même de lui fermer le chemin à la magistrature (5). Et s'il se laisse prévenir

contre une personne d'une condition privée, de qui il croit avoir reçu quelque injure: «< Cela, dit-il, ne ›› se peut souffrir, et il faut que lui ou moi aban>>> donnions la ville. >>Vous le voyez se promener dans la place, sur le milieu du jour, avec des ongles propres, la barbe et les cheveux en bon ordre (6); repousser fièrement ceux qui se trouvent sur ses pas; dire avec chagrin aux premiers qu'il rencontre que la ville est un lieu où il n'y a plus moyen de vivre (7); qu'il ne peut plus tenir contre l'horrible foule des plaideurs, ni supporter plus long-temps les longueurs, les crieries, et les mensonges des avocats (8); qu'il commence à avoir honte de se trouver assis dans une assemblée publique, ou sur les tribunaux, auprès d'un homme mal habillé, sale, et qui dégoûte; et qu'il n'y a pas un seul de ces orateurs dévoués au peuple qui ne lui soit insupportable (9). Il ajoute que c'est Thésée qu'on peut appeler le premier auteur de tous ces maux (10); et il fait de pareils discours aux étrangers qui arrivent dans la ville, comme à ceux (11) avec qui il sympathise de mœurs et de

sentiments.

NOTES.

(1) J'aurois intitulé ce chapitre, de l'Ambition oligarchique.

(2) D'après les différentes corrections dont ce passage est susceptible, il faut traduire, ou « L'oligarchie est une ambi>>tion qui désire un pouvoir fixe, ou bien, « qui désire vi>>vement de s'enrichir. » Les deux versions présentent une

opposition à l'ambition des démagogues, qui ne briguent qu'une autorité passagère, et qui recherchent plutôt l'autorité que les richesses. Selon Aristote, l'oligarchie est une aristocratie dégénérée par le vice des gouvernants, qui administrent mal, et s'approprient injustement la plupart des droits et des biens de l'état, conservent toujours les mêmes personnes dans les places, et s'occupent surtout à s'enrichir.

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(3) La fin de cette phrase étoit très-mutilée dans l'ancien texte, et La Bruyère l'a traduite d'après les conjectures de Casaubon. Le manuscrit du Vatican, en y faisant une légère correction que le sens exige impérieusement, porte: «< Le partisan de l'oligarchie s'y oppose, et dit qu'il faut donner » à l'archonte un pouvoir illimité; et, si l'on proposoit d'adjoindre à ce magistrat dix citoyens, il persisteroit à dire qu'un seul suffit. » On peut voir dans le chap. xxxiv du Voyage du jeune Anacharsis les formalités ordinaires de la direction des cérémonies publiques.

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(4) Le traducteur a ajouté ces mots : Théophraste n'indique cette opinion que par le vers d'Homère, dont la traduction littérale est : « La multiplicité des chefs ne vant rien; >> il faut qu'un seul gouverne. » Iliad., 11, v. 204.

(5) Le grec dit : « Cessons de fréquenter les gens en place. Et d'après le manuscrit du Vatican la phrase continue, « Et, » s'il en a été offensé ou mortifié personnellement, il dit : Il » faut qu'eux ou nous abandonnions la ville. » On se rappelle que, du temps même de Théophraste, le gouvernement d'Athènes fut changé deux fois par des chefs macédoniens. L'exil des chefs du parti vaincu étoit une suite ordinaire des révo lutions de ce genre.

(6) Le grec dit : « D'une coupe moyenne. » (Voyez chapitre Iv, note 9.) Le manuscrit du Vatican ajoute : « Relevant

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