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Contretemps. (La Bruyère.) On verra dans le chapitre XII, note 4, que non-seulement « on mangeoit chez soi une partie » des viandes consacrées,» mots que La Bruyère a insérés dans le texte, mais qu'il étoit même d'usage d'inviter ce jourlà ses amis, ou de leur envoyer une portion de la victime.

(4) Dans le temps du luxe excessif de Rome, la conduite que Théophraste traite ici d'impudence auroit été très-modeste; car alors, dans les grands dîners, on faisoit emporter beaucoup de choses par son esclave, soit sur les instances du maître, soit aussi sans en être prié. Mais les savants qui ont cru voir cette coutume dans notre auteur me paroissent avoir confondu les temps et les lieux. Du temps d'Aristophane, c'est-à-dire environ un siècle avant Théophraste, c'étoient même les convives qui apportoient la plus grande partie des mets avec eux; et celui qui donnoit le repas ne fournissoit que le local, les ornements et les hors-d'œuvres, et faisoit venir des courtisanes. (Voyez Aristoph., Acharn., v. 1085 et suiv., et le Scol.)

(5) Comme le menu peuple, qui achetoit son souper chez le charcutier. (La Bruyère.) Le grec ne dit pas des viandes cuites, et la satire ne porte que sur la conduite ridicule que tient cet homme envers son boucher.

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(7) Leur pédagogue. C'étoit, comme dit M. Barthelemy, chapitre xxvi, un esclave de confiance chargé de suivre l'enfant en tous lieux, et surtout chez ses différens maîtres. On peut voir aussi à ce sujet le bas-relief représentant la mort de Niobé et de ses enfants au Musée Pio Clementino, tome IV, planche 17, et l'explication que M. Visconti en a donnée.

Les spectacles n'avoient lieu à Athènes qu'aux trois fêtes de Bacchus, et surtout aux grandes Dionysiaques, où des curieux de toute la Grèce affluoient à Athènes; et l'on sait qu'an

II.

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242 DE L'EFFRONTERIE CAUSÉE PAR L'AVARICE.

ciennement les étrangers logeoient ordinairement chez des particuliers avec lesquels ils avoient quelque liaison d'affaires ou d'amitié.

(8) Plus littéralement : « Il va dans une maison étrangère » pour emprunter de l'orge ou de la paille, et force encore >> ceux qui lui prêtent ces objets à les porter chez lui. »

(9) Les plus pauvres se lavoient ainsi pour payer moins. (La Bruyère.)

CHAPITRE X.

DE L'ÉPARGNE SORDIDE.

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CETTE espèce d'avarice est dans les hommes une passion de vouloir ménager les plus petites choses sans aucune fin honnête (1). C'est dans cet esprit que quelques-uns, recevant tous les mois le loyer de leur maison, ne négligent pas d'aller eux-mêmes demander la moitié d'une obole qui manquoit au dernier paiement qu'on leur a fait (2); que d'autres, faisant l'effort de donner à manger chez eux (3), ne sont occupés, pendant le repas, qu'à compter le nombre de fois que chacun des conviés demande à boire. Ce sont eux encore dont la portion des prémices (4) des viandes que l'on envoie sur l'autel de Diane est toujours la plus petite. Ils apprécient les choses au-dessous de ce qu'elles valent; et, de quelque bon marché qu'un autre, en leur rendant compte, veuille se prévaloir, ils lui soutiennent toujours qu'il a acheté trop cher. Implacables à l'égard d'un valet qui aura laissé tomber un pot de terre, par malheur quelque vase d'argile, ils lui déduisent cette perte sur sa nourriture:mais si leurs femmes ont perdu seulement un denier (5), il faut alors renverser toute une maison, déranger les lits,

ou cassé

transporter des coffres, et chercher dans les recoins les plus cachés. Lorsqu'ils vendent, ils n'ont que cette unique chose en vue, qu'il n'y ait qu'à perdre pour celui qui achète. Il n'est permis à personne de cueillir une figue dans leur jardin, de passer au travers de leur champ, de ramasser une petite branche de palmier (6), ou quelques olives qui seront tombées de l'arbre. Ils vont tous les jours se promener sur leurs terres, en remarquent les bornes, voient si l'on n'y a rien changé, et si elles sont toujours les mêmes. Ils tirent intérêt de l'intérêt même, et ce n'est qu'à cette condition qu'ils donnent du temps à leurs créanciers. S'ils ont invité à dîner quelquesuns de leurs amis, et qui ne sont que des personnes du peuple (7), ils ne feignent point de leur faire servir un simple hachis; et on les a vus souvent aller eux-mêmes au marché pour ces repas, y trouver tout trop cher, et en revenir sans rien acheter. Ne prenez pas l'habitude, disent-ils à leurs femmes, de prêter votre sel, votre orge, votre farine, ni même du cumin (8), de la marjolaine (9), des gâteaux pour l'autel (10), du coton (11), de la laine (12); car ces petits détails ne laissent pas de monter, à la fin d'une année, à une grosse somme. Ces avares, en un mot, ont des trousseaux de clefs rouillées dont ils ne se servent point, des cassettes où leur argent est en dépôt, qu'ils n'ouvrent jamais, et qu'ils laissent moisir dans un coin de leur cabinet; ils portent des habits qui leur sont trop courts et trop étroits; les plus petites fioles contiennent plus d'huile qu'il n'en faut

pour les oindre (13): ils ont la tête rasée jusqu'au cuir (14), se déchaussent vers le milieu du jour (15) pour épargner leurs souliers; vont trouver les fouIons pour obtenir d'eux de ne pas épargner la craie dans la laine qu'ils leur ont donnée à préparer, afin, disent-ils, que leur étoffe se tache moins (16).

NOTES.

(1) Le texte grec porte simplement, « la lésine est une épar»> gne outrée, ou déplacée, de la dépense. »

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(2) Littéralement, « Un avare est capable d'aller chez quelqu'un au bout d'un mois pour réclamer une demi-obole. » Théophraste n'ajoute pas quelle étoit la cause et la nature de cette créance, dont le peu d'importance fait précisément le sel de ce trait; elle n'est que de six liards.

(3) Dans le texte il n'est point question d'un repas que donne l'avare, mais d'un festin auquel il assiste; et le mot grec s'applique particulièrement à ces repas de confrérie que les membres d'une même curie, c'est-à-dire de la troisième partie de l'une des dix tribus, faisoient régulièrement ensemble, soit chez un des membres de cette association, soit dans des maisons publiques destinées à cet usage. (Voyez la note de M. Coray sur le chap. 1 de cet ouvrage; Pollux liv. VI, seġm. 7 et 8, et Anacharsis, chap. xxvi et LVI.)

(4) Les Grecs commençoient par ces offrandes leurs repas publics. (La Bruyère.) Les anciens regardoient en général comme une impiété de manger ou de boire sans avoir offert des prémices ou des libations à Cérès ou à Bacchus. Mais il doit y avoir quelque raison particulière pour laquelle ici les prémices sont adressées à Diane; et c'étoit peut-être l'usage

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