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d'exemple. Nous le félicitons, du reste, de ne point imiter la stérile abondance de son prédécesseur, feu M. Vigée, qui, dans les dernières années de sa direction, inondait son recueil de petits vers indignes de sa muse aimable et facile. E. HEREAU.

67 Le Réveil des Grecs, Épître; suivie du Chant du Barde sur la mort de Napoléon ; par G. R***. Paris, 1822. Ponthieu, au PalaisRoyal. Brochure in-8° de 28 pages. Prix: 1 fr. 50 c.

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68. Ode sur les événemens de la Grèce, Par M. J. B. COURSELles DUMONT. Paris, 1822; l'auteur, rue Mouffetard, no 90. Brochure in-12 de 15 pages; prix: 1 fr.

Nous avons déjà eu l'occasion d'annoncer plusieurs pièces de vers sur la régénération des Grecs, toutes plus ou moins faibles, et nous avons indiqué (V. T. XI, p. 609), une des causes que nous pensons avoir contribué à faire échouer leurs auteurs dans un sujet d'autant plus difficile à traiter, que la plupart des lecteurs, transportés eux-mêmes d'enthousiasme à l'aspect d'un si grand événement, demandent de nouvelles inspirations au poète qui veut le chanter. Un de nos collaborateurs, M. Michel Berr, paraît avoir été plus heureux daus le compte qu'il a eu à rendre du poëme de M. Guerrier de Dumast; Chios, la Grèce et l'Europe (Voy. T. XVI, p. 602.) Les deux pièces dont nous avons transcrit les titres en tête de cet article, ne mériteraient guère de trouver place dans un recueil des écrits pour la cause des Grecs, qu'en faveur de l'intention. La dernière, surtout, est d'une faiblesse extrême, et ne justifie nullement le nom d'Ode, que son auteur lui a donné. M. Courselles Dumont est étranger au mouvement, aux inspirations et aux images que réclame ce genre de poésie, le plus difficile de tous. Nous ne connaissons rien de lui, et nous ignorons s'il est en état de prendre sa revanche dans un autre ouvrage; mais nous en douterions, à la froideur qui règne dans celui-ci. On peut corriger des défauts; on ne remplace jamais l'inspiration, première qualité requise dans un poète. Son antagoniste doit être jeune, si nous en jugeons d'après les nombreuses incorrections qu'il a laissé subsister dans son ouvrage; mais il a eu le bon esprit de ne pas entreprendre une Ode, et nous avons trouvé, dans son Épître, quelques vers qui font espérer qu'il pourra faire mieux un jour. Nous citerons ceux-ci, qui joignent au mérite de la pensée, celui de la

correction :

D'un semblable ennemi (le musulman) que pourriez-vous attendre?
Comme vous, il n'a pas de patrie a défendre:
Insensible à la gloire, insensible à l'honneur,
Jamais la liberté n'a fait battre son cœur.

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Le chant du Barde, qui suit immédiatement cette Epître, et que l'auteur a consacré à l'homme qui, naguère encore, ne voyait dans l'Europe entière, qu'un théâtre trop étroit pour sa gloire, » est mieux écrit et mieux pensé. E. H.

69. — Chansons par trois royalistes non fanatiques. Paris, 1823; imprimerie de Setier, rue du Cimetière-Saint-André-des-Arcs, no 7. Un vol. in-52; prix : 2 fr.

Ce recueil est composé de soixante-deux chansons, dues, s'il faut en croire le titre, à trois auteurs seulement. Il ne faut pas alors s'étonner d'en trouver si peu de remarquables, puisque nous connaissons des Chansonniers, où figurent une trentaine de noms, et qui n'offrent rien de plus saillant que celui-ci. Los auteurs, pour rassurer les personnes que leur titre aurait pu éloigner, en leur faisant craindre de ne trouver dans leur recueil que des chansons dictées par l'esprit de parti ou par la circonstance, ont pris pour devise :

Dieu, le roi, les belles,

Le vin, la France, et la gaieté.

:

Ils se sont montrés fidèles à ces objets de leur culte leur philosophic est douce et indulgente; trop indulgente même, à en juger par le couplet suivant:

Se croire de l'étoffe

Dont on fait les héros,
Porter en philosophe
Tout son bien sur le dos,

Courir à pied le monde,

Pour le mieux observer,

Séduire brune et blonde,
Et puis les enlever.

Sans être rigoriste, on pouvait attendre une morale un peu moins relâchée de la part des auteurs de ce recueil. Il est précédé d'un dialogue, en forme d'introduction, entre un auteur de chansons et un faiseur de mélodrames; c'est peut-être ce qu'il renferme de meilleur. E. H.

70.—Philistis, reine de Syracuse, Tragédie en cinq actes, par M. De SAUR, maître des requêtes, reçue au Second-Théâtre Français, le 31 mars 1821 Paris, 1822; Delaunay et Ponthieu, au Palais-Royal. In-8° de 84 pages, avec une planche de médailles. Prix : 3 fr.

71. — Thycste, Tragédie en quatre actes et en vers, par M. Renard ATHANASE. Paris, 1822; Barba, Palais-Royal, galerie du Théâtre-Frangais. In-8 de 8a pages; prix: a fr. 50.

Voici deux ouvrages qui pourront bien avoir le même sort, quoiqu'ils n'aient pas tout-à-fait le même degré d'intérêt et de mérite. Le premier, après avoir été reçu une première fois par MM. les comédiens du Second-Théâtre Français, réunis en comité; puis, soumis à une nouvelle lecture, devant un nouveau comité, composé entièrement de gens de lettres; reçu une seconde fois, mais à correction, et enfin refusé à une troisième lecture, devait être représenté sur le théâtre de Versailles : il parait que de nouveaux obstacles se sont rencontrés pour M. de Saur, et que le public ne pourra juger sa pièce que par la lecture. Le second de ces deux ouvrages a été livré, par son auteur, à l'impression, avant d'être présenté aux comédiens ; nous ignorons même s'il l'a été depuis. M. Athapase a voulu pressentir auparavant le public sur le mérite de sa tragédie; il a cru simplifier ainsi les démarches à faire pour la réception de cet ouvrage. Nous craignons qu'il se soit trompé : le public français n'est pas encore mûr pour cette innovation; il n'aime pas qu'on le prive du plaisir que lui cause la surprise, à la première représentation d'un Ouvrage dramatique, dont il veut ignorer souvent jusqu'aux personnages. Tout en blâmant les mauvais procédés que l'on paraît avoir eus envers M. de Saur, nous n'osons condamner entièrement le refus que l'on a fait de sa pièce; mais nous oserions presque recommander à l'attention du jury dramatique de l'un de nos deux Théâtres-Français, celle de M. Athanase. Nous ne voyons que l'horreur du sujet qui pourrait être un obstacle à ce qu'elle fût reçue par des gens d'un goût délicat ; mais, depuis quelques années, on semble vouloir nous familiariser avec des tableaux que Crébillon, le premier, a osé montrer sur la scène française et pour lesquels il a reçu le surnom de noir. Sa tragédie d'Atrée et Thyeste a suggéré à M. Athanase l'idée de la sienne. « Quoique la famille de Pélops, dit-il dans son avant-propos, ait fourni, depuis la vengeance d'Atrée; jusqu'à l'expiation du crime d'Oreste, la matière d'une suite de tragédies qui renferment, pour ainsi dire, une histoire complète de cette famille, il est à remarquer que la chaîne de cette histoire est interrompue dans l'un de ses points. Les événemens relatifs à la naissance d'Égiste, ainsi que la mort d'Atrée, sont très-peu connus. J'ai pris à tâche de les mettre en scène. » Le sujet que M. Athanase a choisi et dont il donne l'exposé mythologique, avait déjà été traité, il y a près d'un siècle, sous le titre de Pélopée, par le fameux abbé Pellegrin, duquel on a dit :

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Cette tragédie, oubliée depuis long-tems, ne paraît avoir de commun que le sujet avec la pièce de M. Athanase, qui est bien conduite et purement versikée. Si elle est un jour représentée, peut être son auteur ne dira-t-il plus, comme il a dit dans sa préface : « Je n'étais pas destiné au malheur d'être poète. Ce n'est un malheur que pour les mauvais poètes. Le sujet de la tragédie de M. Saur, est Philistis, fille dè Gélon, roi de Syracuse, et de Démarate. Un oracle avait prédit qu'elle serait aimée de ses deux frères, Hiéron et Théron; cet oracle s'accom plit, et Philistis cause la mort de tous les deux. La même donnée dramatique avait déjà été mise en œuvre avec beaucoup de succès chez, les Allemands, par Schiller, dans sa Fiancée de Messine. M. de Saur n'a presque rien eu à souffrir de la censure, et n'aurait pu s'en prendre à elle en cas de non-succès. Nous n'avons remarqué que ce vers qu'il ait dû changer au troisième acte :

Aucun trône hérité ne vaut une victoire.

Ces deux-ci, dans le cinquième :

Les plus obscurs sujets méritent mieux le trône

Qu'un roi qui, par un crime, a fletri sa couronne.

Et enfin, la même idée à peu près, reproduite dans les deux derniers vers de la pièce :

S'il faut tant de forfaits pour parvenir au trône,

Mories, fuyez donc ceux qui portent la couronne.

La tragédie de Philistis, qui sort des presses de M. Trouvé, est parfaitement imprimée, sur très-beau papier; et l'auteur y a joint une planche très-bien gravée de médailles conservées à la Bibliothèque royale, et qui représentent les portraits de Gélon, Démarate, Hiéron, Théron et Philistis. E. HEREAU.

72. (*) — OEuvres complètes de madame De Souza, revues, corrigées, augmentées, imprimées sous les yeux de l'auteur, et ornées de gravures. Paris, 1821 et 1822; Eymery, rue Mazarine, no 3o. 6 vol. in-8°. Prix : 36 fr.; ou 12 vol. in-12; prix : 30 fr.

Ces œuvres se composent d'Adèle de Sénange, Emélie et Alphonse, Charles et Marie, Eugène de Rothelin, Eugénie et Mathilde, Mademoiselle de Tournon, et d'un ouvrage inédit, intitulé : La comtesse de Fargy.

73. ( * ) --- Mémoires de Jacques Fauvel, publiés par MM. J. DROZ et L.-B. PICARD. Paris, 1822. Renouard, rue de Tournon, no 6. 4 vol. in-12. Prix: 11 fr., et par la poste 13 fr.

Cette production remarquable, fruit de la réunion du talent aimable et de l'imagination gracieuse de deux écrivains de beaucoup d'esprit, vient fort à propos pour retenir et raffermir dans la bonne route litté raire, celle du beau et du vrai, nos jeunes auteurs, que des succès éphémères obtenus par la singularité et, pour ainsi dire, surpris à la multitude, auraient pu engager à s'en détourner. Les auteurs, comme l'ont fait observer plusieurs critiques judicieux, ont voulu mettre en action une grande pensée philosophique, qui a présidé à leurs premières conceptions, et qu'ils ont développée avec bonheur. Ils ont voulu montrer l'homme bercé par l'insouciance dans sa jeunesse, soutenu par la fermeté et la persévérance dans l'âge mûr, et dans sa vieillesse, par la resignation. Les lecteurs aimeront à retrouver dans les Mémoires de Jacques Fauvel, toute la verve comique et tout le talent d'observation qui ont placé M. Picard au rang des maîtres de la scène moderne, avec cette philosophie douce et élevée qui distingue les productions de son collaborateur M. Droz (1). En lisant cet ouvrage, on ne peut s'empêcher de regretter que le premier, paraissant en quelque sorte se défier de ses forces, se soit borné depuis quelque tems à guider de jeunes auteurs dans la carrière dramatique ; une foule de caractères habilement saisis et bien tracés, nous autorisent à penser qu'il ne serait pas inférieur à lui-même, s'il essayait de nous donner encore quelques-unes de ces productions dramatiques qui ont fait la fortune de plusieurs théâtres, et les plaisirs d'une génération qu'il a peinte par tous les côtés que la politique ombrageuse des gouvernemens lui a permis d'aborder. Jacques Fauvel jouira d'un privilége que ne peuvent plus avoir les personnages qui sont aujourd'hui du domaine de la comédie ou de la tragédie; il fera détester l'intolérance, cette ennemie du bonheur des peuples et de la gloire des rois. Mais je m'arrête; il est réservé à une main plus habile que la mienne de tracer l'analyse de cet ouvrage intéressant, que la littérature classique peut offrir avec confiance et orgueil à ceux qui assurent qu'il n'est plus possible d'émouvoir ni de plaire aujourd'hui, sans avoir recours à ces moyens extraordinaires et hors de la nature, réclamés par les besoins factices d'une classe de lecteurs malheureusement organisés. E. H.

74. — (*) Nouveaux tableaux de famille, ou la Vie d'un pauvre ministre de village et de ses enfans, traduits de l'allemand, d'Auguste LA FONTAINE, par madame De Montqlieu. Nouvelle édition, revuc et

(1) L'Essai sur l'art d'étre heureux, et les Études sur le beau dans les arts. Un vol. in-8° chacun, prix : 4 fr., chez Renouard.

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