Oeuvres complètes de Mme. Riccoboni: The foundling, ou l'enfant trouvé, comédie en cinq actes

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Page xliv - Ou la façon de vivre est prodigieusement changée dans cette fameuse capitale, ou ceux qui nous l'ont peinte la connaissent mal. Je cherche inutilement ici ces êtres composés d'air et de feu, toujours actifs, que la saillie et l'enjouement caractérisent ; je trouve les Français, s'il m'est permis de le dire sans enfreindre les lois de l'hospitalité, oui ma foi, Charles, je les trouve tout aussi ennuyeux que nous. Penseurs, politiques, raisonneurs ; l'agriculture, la législation et la philosophie...
Page xliv - Penseurs, politiques, raisonneurs; l'agriculture, la législation et la philosophie, sont le sujet des entretiens de leurs cercles les plus polis. Tout le monde projette, tout le monde établit des principes, tout le monde forme des plans d'administration. Les femmes même s'occupent de ces graves objets. L'esprit de parti s'introduit à la toilette, siège à table, se mêle à tous les jeux.
Page lv - Je suis fâchée, monsieur, de n'avoir point une histoire intéressante à vous raconter. La vie d'une femme sensée offre rarement des faits dignes d'attention , la mienne n'a pas été heureuse ; ma jeunesse s'est passée dans la tristesse , peut-être est-ce un bonheur pour moi. J'entends quelquefois des hommes, sur le retour, soupirer, comparer les temps, rappeler des jours qui ne sont plus, se plaindre de ceux dont ils jouissent encore ; moi , je ne regrette rien , et mon état présent me rappelle...
Page xx - Ma taille est haute ; j'ai les yeux noirs , et le teint assez blanc ; ma physionomie annonce de la candeur, mes procédés ne l'ont point encore démentie ; en parlant à une personne que j'aime , j'ai l'air vif et gai, très-froid avec les étrangers; je traite durement ceux que je méprise, je n'ai rien à dire à ceux que je ne connais pas, et je deviens toutà-fait imbécille quand on m'ennuie. Une vie...
Page xxi - Je ne fuis pas riche, mais la modération m'a toujours paru capable de fuppléer à l'opulence; j'ai même pris l'habitude de ne pas me croire pauvre , en me comparant à ceux qui jouiflent d'une grande fortune , parce que je n'ai pas leurs defirs , & me pafle de mille chofes fans m'en priver.
Page xliii - Je le vis, sa canne à la main, poursuivant un très-joli petit nègre dont j'aimois la douceur et l'ingénuité. Je sauvai cet enfant de la fureur de son maître, et m'informai du crime qui lui attiroit un si dur châtiment. Sans le vouloir, il venoit de répandre un peu d'eau sur les papiers de l'infatigable écrivain. Eh de quoi traitent donc ces cahiers si précieux, demandai-je à mon parent irrité? Ils traitent du bonheur d'une partie des hommes, me répondit-il avec chaleur, c'est l'ouvrage...
Page xlv - Une jeune beauté choisit et protège un système politique, proscrit les autres, dispute, et quelquefois s'emporte. Chaque société a ses vues, ses idées, ses calculs. Et malheur au citoyen paisible qui demeure neutre, écoute, se tait. On l'étourdit par-tout, on ne le considère nulle part. La profondeur est devenue la folie d'une nation autrefois inspirée par les grâces et guidée par le plaisir. L'espèce de dissipation où tu m'invites à me livrer, que tu crois si propre à charmer l'ennui,...
Page xxi - ... se peignent sur mon front , je n'ai point l'art de me contraindre; en m'abordant, on lit dans mes yeux si le sérieux ou l'enjouement présidera à ma conversation. J'ai des amis; j'en ai peu; s'il était possible d'en cultiver beaucoup, je n'en pourrais chérir qu'un petit nombre. L'esprit m'amuse sans me séduire; mais les qualités du cœur m'intéressent , m'attachent , me plaisent dans tous les temps.
Page xlv - L'esprit de parti s'introduit à la toilette, siége à table, se mêle à tous les jeux. Une jeune beauté choisit et protége un système politique, proscrit les autres, dispute, et quelquefois s'emporte. Chaque société a ses vues, ses idées, ses calculs. Et malheur au citoyen paisible qui demeure neutre, écoute, se tait. On l'étourdit par-tout, on ne le considère nulle part.
Page xxv - Riccoboni court la poste à la Marivaux pendant cent douze pages, et à la fin de sa course le roman de Marianne est tout aussi avancé qu'auparavant ; mais, en vérité, sa manière d'écrire, même en se réglant sur un mauvais modèle, est très supérieure à celle de Marivaux. Cette femme a beaucoup de talent. Un ton distingué, un style élégant, léger et rapide, la mettront toujours au-dessus de toutes les femmes qui ont jugé à propos de se faire imprimer en ces derniers temps.

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