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graces, & elle double leur prix. Enfin on doit avoir pour but en les engageant à apprendre des Vers fonores & bien frappés, de leur faire contracter une maniere de s'exprimer corre&e, décente, pleine de dignité, qui refpire, pour ainfi dire, la belle éducation, & de joindre ainfi les graces du langage & de l'efprit à celles dont la nature les a pourvûes; car il est certain que l'efprit s'embellit les charmes de la Poëfie.

par

On s'eft donc contenté de donner un ordre clair & fuccint a tous les matériaux qui font entrés dans ce recueil. Ce font comme de beaux tableaux épars çà & là dans les ouvrages des Poëtes, & qu'on a expofé dans un même lieu; mais comme il a fallu diftinguer entre eux les divers deffeins, on a, pour ainfi dire, décomposé les piéces de Poëfie, fur-tout celles qui font

de longue haleine. Ainfi on a commencé par plufieurs morceaux tirés des fujets facrés. Cette partie eft comme hors du plan du recueil, quoiqu'elle ait un rapport immédiat avec certaines qui y ont leur place.

Les Pensées & leurs divers genres commencent l'arrangement de l'ouvrage en lui-même; après viennent les grands Sentimens, ce qui comprend, comme on peut s'imaginer, toutes les fources dont ils dérivent, comme la valeur, la générosité, la grandeur d'ame, l'amour de la vertu & de la Patrie l'équité, la compaffion, la tendref fe bien placée, &c. Il eft certain qu'ils forment de si beaux caracteres & préfentent de fi grands exemples qu'ils ne peuvent que produire un bon effet fur tous les efprits raisonnables. De là on a paffé à tous les morceaux brillans qui fe

peuvent facilement détacher d'un ouvrage, comme les Narrations, les Descriptions, les Peintures vives, les grandes Images, les Portraits, &c. ce qui forme autant de tableaux variés & amufans.

que

Enfuite on a fait voir par des. préceptes & par des exemples les trois divers genres qui entrent dans les fujets de Poësie, de même dans ceux qui font en profe, fçavoir, le Genre Sublime, le Genre Tempéré & le Genre Familier; car tous les ouvrages font dans quelqu'un de ces ftiles.

Et comme les jeunes gens dans le tems de leurs études ne peuvent pas & ne doivent pas même lire indifféremment les Poëtes en général, on a extrait quelques Scénes brillantes de nos Tragiques les plus connus pour leur donner une idée du Genre Dramatique & du caractere de ces illuftres Auteurs

qui ont fait parler leur Héros avec tant de dignité. On eft en cela du fentiment d'une Dame célébre (a) par fon efprit, qui dit que souvent les meilleures Piéces de Théâtre en nous donnant des leçons de vertu nous laiffent l'impreffion du vice Il eft bon de remarquer qu'elle parloit à fa fille, que fes leçons d'ailleurs n'ont rien de trop fevere; cependant elle penfoit ainfi.

A l'égard de l'utilité de ce Recueil en lui-même, on a pour garant le fentiment de plufieurs perfonnes refpectables & dont l'autorité doit être d'un grand poids en fait d'inftruction de la jeuneffe.

Mr. Rollin, dans fon Traité des études (6), après avoir dit qu'il doit y avoir un tems pour la lecture des Poëtes François, s'exprime de cet

(a) La Marquife de Lambert, Avis d'une mere, &c.

(b) Tom. I. pag. 365.

te forte: » Il ne feroit

pas raifon»nable que les jeunes gens uni» quement occupés de l'étude des » Auteurs Grecs & Latins, demeuraffent toujours étrangers dans >> leur propre pays. Certe lecture pour être utile demande un choix » judicieux & de fages précautions, > fur-tout pour ce qui regarde la pureté des mœurs.

Cet homme fi connu par fes obfervations périodiques, fi redoutable aux médiocres Auteurs dont il relevoit cruellement les fautes mais qui avoit le goût fi exquis, de l'aveu même de fes plus grands adverfaires, renchérit encore fur le fentiment de Mr. Rollin. Après avoir dit que les jeunes gens doivent apprendre par cœur les plus beaux endroits de nos Poëtes, il en donne de folides raisons (a): Les morceaux de Poëfie, dit-il (a) Obfervat. Tom. 32. pag. 35..

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