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Et les plus malheureux ofent pleurer le moins, Iphigénie de Racine.

L'Empereur Phocas dépeint de cette maniere le fardeau de la Royauté à un de fes confidens.

Crifpe, il n'eft que trop vrai, la plus belle Couronne

N'a que defaux brillans dont l'éclat l'environne, Et celui dont le Ciel pour un Sceptre fait choix, Jufqu'à ce qu'il le porte en ignore le poids. Mille & mille douceurs y femblent attachées Qui ne font qu'un amas d'amertumes cachées, Qui croit les pofféder les fent s'évanouir,

Et la

peur de les perdre empêche d'en jouir,

Heraclius de Corn.

MINISTERE,

Poids du Miniftere des Affaires
d'un Etat,

Le Poëte fait parler dans les Vers fuiyans un Miniftre d'État qui fait le por trait des foins pénibles de fon Emploi,

Hélas! que dites-vous, apparence trop vaine? Le bonheur eft-il fait pour le rang qui m'ene chaîne ?

Vous ne pénétrez point les fombres profondeurs Des maux qui font cachés sous l'éclat des gran. deurs.

Quel accablant fardeau ! tout prévoir, tout con

duire,

Entourés d'envieux unis pour nous féduire.
Refponfables du fort & des événemens,
Des miferes du Peuple & des brigues des

Grands.

Réünir feul enfin

par un trifte avantage

Tous les foins, tous les maux que l'Empire

partage.

Voilà le joug brillant auquel je fuis lié,

Sort toujours déplorable & toujours envié.

Ma fortune eft un poids que chaque jour aggrave.

Maître & Juge de tout; de tout on est esclave.
Et régir des mortels le deftin inconftant,
N'eft que le trifte droit d'apprendre à chaque
inftant

Leurs méprifables vœux, leurs peines dévoż

rantes,

Leurs vices trop réels, leurs vertus apparentes,
Et de voir de plus près l'affreufe vérité
Du néant des grandeurs & de l'humanité.

Greets Edouard III. Trag.

L'Empereur Galba parle ainfi à fes Miniftres à qui il avoit demandé leur avis, & qui étoient de différens fentimens.

Qu'un Prince eft malheureux, quand de ceux qu'il écoute

Le zéle cherche à prendre une diverse route; Et que l'attachement qu'ils ont au propre fens Pouffe jufqu'à l'aigreur des confeils différens. Ne me trompai-je point, & puis-je nommer zéle

Cette haine à tous deux obftinément fidele, Qui peut-être en dépit des maux qu'elle prévoit Seule en mes intérêts fe confulte & fe croit. Othon de Corn.

Réponse d'un Roi à un de fes Cour tifans qui lui demandoit la permiffion de fe battre en duel.

Un Roi dont la prudence a de meilleurs objets
Eft meilleur ménager du fang de fes fujets;
Je veille pour les miens, mes foucis les cone
fervent,

Comme le Chef a foin des membres qui le fers

vent;

Ainfi votre raison n'eft pas raison pour moi, Vous parlez en Soldat, je dois agir en Roi, Cid, Corn

Grimoal Comte de Bénevent qui avoit conquis le Royaume de Lombardie fur Pertharite, parle ainfi à un de ses confidens qui lui propofoit d'ufer de fon autorité & de fon pouvoir dans une circonf tance où cette voye auroit été odieuse.

Laiffons aux mauvais Rois leurs damnables maximes,

Je hais l'art de régner qui fe permet des crimes.
De quel front donnerois-je un exemple aujour-
d'hui,

Que mes loix des demain puniroient en autrui?
Le pouvoir abfolu n'a rien de redoutable,
Dont à fa conscience un Roi ne foit comptable,
L'amour l'excufe mal s'il régne injustement,
Et l'amant couronné doit n'agir qu'en amant.
Pertharite de Corn.

Que le facré caractere des Rois eft
ineffaçable.

Un véritable Roi qu'opprime un fort contraire,
Tout opprimé qu'il eft garde fon caractere;
Ce nom lui refte entier fous les plus dures lois,
I eft dans les fers même égal aux plus grands

Rois.

Attila de Corneil.

Même

Même maxime à l'occafion d'un Roi détrôné par un Ufurpateur.

Un Roi quoique vaincu garde fon caractere, Aux fideles fujets sa vûe est toujours chere; Au moment qu'il paroît les vainqueurs les plus grands,

Pour vertueux qu'ils foient, ne font que des tirans ;

Et dans le fonds des cœurs fa préfence fait naître

Un mouvement fecret qui les rend à leur maî

tre:

Le tenir dans les fers avec le nom de Roi, C'eft foulever pour lui les Peuples contre moi. Ceft Grimeal qui parle de Pertharite dans la Piéce de ce nom.

Réponse d'Arface, fondateur de l'Empire des Parthes, à fon fils qui lui confeilloit de ne pas craindre les Rois fes voifins fur ce qu'il ne tiendroit pas les Traités faits avec eux.

Prince, on n'eft pas toujours fuivi de la vic

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toire, Un Roi ne doit jamais, s'enyvrant de la gloire, Negliger l'équité parce qu'il eft heureux;

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