Que la porte du jour fe ferme ou qu'elle s'ou
Que le Soleil nous quitte ou qu'il vienne nous voir,
Qu'il forme un beau matin, qu'il nous montre un beau foir;
J'en fai représenter les images brillantes; Mon art s'étend fur tout, c'est par mes mains favantes
Que les champs, les déferts, les bois & les Ci
Vont en d'autres climats étaler leurs beautés. Je fais qu'avec plaifir on peut voir des naufra-
Et les malheurs de Troye ont plu dans mes ouvrages.
Tout y rit, tout y charme, on y voit fans hor
Le pâle défefpoir, la sanglante fureur, L'inhumaine Cloton qui marche sur leurs tra-
Jugez avec quels traits je fai peindre les graces. Dans les maux de l'abfence on cherche mon
Je confole un amant privé de ses amours.
Boileau parle ainfi de la Poëfie & particulierement du Poëme Épique.
Là pour nous enchanter tout eft mis en usage, Tout prend un corps, une ame, un esprit, un visage,
Chaque vertu devient une Divinité,
Minerve eft la prudence & Vénus la beauté. Ce n'eft plus la vapeur qui produit le tonnerre, C'eft Jupiter armé pour effrayer la Terre. Un orage terrible aux yeux des Matelots, C'eft Neptune en courroux qui gourmande les flots.
Echo n'est plus un son qui dans l'air retentiffe, C'est une Nymphe en pleurs qui fe plaint de Narciffe.
Ainfi dans cet amas de nobles fiâions, Le Poëte s'égaye en mille inventions, Orne, éleve, embellit, agrandit toutes chofes, Et trouve fous fa main des fleurs toujours éclo-
SUR L'ÉGLOGUE
Quelle doit être une Eglogue.
La nature fur chaque image Doit guider les traits du pinceau, Tout y doit peindre un paysage, Des jeux, des fêtes sous l'ormeau; L'œil eft choqué s'il voit reluire Les Palais, l'or, le porphire
Où l'on ne doit voir qu'un hamean. *
Il veut des grottes, des fontaines, Des pampres, des fillons dorés, Des prés fleuris, des vertes plaines Des bois, des lointains azurés. Sur ce mêlange de spectacles Ses regards volent fans obftacles Agréablement égarés.
Là dans leur course fugitive
Des ruiffeaux lui femblent plus beaux
Que les Ondes que l'art captive Dans un dédale de canaux, Et qu'avec fafte & violence Une Sirenne au Ciel élance Et fait retomber en berceaux.
Eloge de la Poefie.
C'eft elle-même que le Poëte fait ler ainfi.
Mes mains ont fait des ouvrages Qui verront les derniers âges Sans jamais fe ruiner.
Le temps a beau les combattre ; L'eau ne les fauroit miner,
Le vent ne peut les abbattre.
Sans moi tant d'œuvres fameux,
Ignorés de nos neveux,
Périroient fous la pouffiere.
Au Parnaffe feulement
On emploie une matiere Qui dure éternellement.
Si l'on conferve les noms, Ce doit être par mes fons, Et non point par des machines: Un jour, un jour l'univers Cherchera fous vos ruïnes
Ceux qui vivront dans mes vers.
La Font. Oeuvres Fofthumes.
Eloge des Poëtes Latins les plus célébres.
Le grand Virgile enfeigne à fes Bergers L'art d'emboucher les chalumeaux légers: Au Laboureur par des leçons utiles Fait de Cerès hâter les dons fertiles: Puis tout-à-coup, la trompette à la main, Dit les combats du Fondateur Romain, Ses longs travaux, couronnés de victoire; Et des Céfars prophétise la gloire. Ovide, en vers doux & mélodieux, Sût débrouiller l'histoire de fes Dieux; Trop indulgent au feu de fon génie, Mais varié, tendre, plein d'harmonie, Savant, utile, ingénieux, profond; Riche, en un mot, s'il étoit moins fécond Non moins brillant, quoique fans étincelle Le feul Horace en tous genres excelle; De Cytherée exalte les faveurs, Chante les Dieux, les Héros, les Buveurs; Des fots Auteurs berne les vers ineptes; Nous inftruifant par gracieux préceptes, Et par fermons de joie antidotés. Catulle, en grace & naïves beautés Avant Marot mérita la couronne
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