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Soupiroient de tendres chanfons.
*

Aux tombeaux de ces morts célébres
Venus répand encor des pleurs,
L'amour fur leurs urnes funébres
Attend encor leurs fucceffeurs.

Il garde leurs Lyres, muettes
Qu'aucun mortel n'ofe toucher,
Et leurs hautbois & leurs trompettes
Que l'on ne fait plus emboucher.
t

Mufes, amours, ceffez vos larmes,
Bien-tôt dans ces lieux enchantés >
Vous verrez revivre les charmes
De vos Disciples regrettés.

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Dans le morceau fuivant, le Poëte à l'occasion du retour du printems, foupire après le féjour champêtre où il a déja été, & qu'il compte bien-tôt revoir.

Il s'en forme par avance une idée char mante, & dans un enthousiasme Poëtique il en fait une peinturé des plus riantes.

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Porté par les fonges légers,

Je vois la nouvelle parure
Dont s'embelliffent vos (a) vergers,
Eléve ici de la nature,

I

L'art lui prêtant fes foins brillans,)
¡Y forme un Temple de verdureI
A la Déeffe des talens.

Sortez du fein des violettes,
Croiffez feuillages fortunés,
Couronnez ces belles retraites,
Ces détours, ces routes fecrettes~/
Aux plus doux accords deftinés.
Ma Mufe par vous attendrie,
D'une charmante rêverie

Subit déjà l'aimable loi...

Les bois, les vallons, les montagnes,

Toute la fcéne des campagnes.co
Prend une ame & s'orne pour moi.

Aux yeux de l'ignare vulgaire

.、,

Tout eft mort, tout eft folitaire,

Un bois n'est qu'un sombre réduit,
Un ruiffeau n'eft qu'une onde claire,

(a) Il parle à un ami qui étoit le Maître de cette maifon de campagne,

Les zéphirs ne font que du bruit. A
Aux yeux que Calliope éclaire)
Tout brille, tout penfe, tout vit.
Ces ondes tendres & plaintives,
Ce font des Nymphes fugitives.
Qui cherchent à se dégager
De Jupiter pour un berger.
Ces fougeres font animées,
Ces fleurs qui les parent toujours
Ge font des belles transformées
Ces papillons font des amours.
Le plaifir avec chaque aurore
Loin du tumulte qu'il abhore
Renait fur ces vallons chéris.
Des guirlandes de la jeunesse
Les ris couronnent la fageffe,
La fageffe enchaîne les ris;
Et pour mieux varier fans ceffe
L'uniformité du loifir,

Un goût guidé par la fineffe
Vient unit les arts au plaifir.
Que l'infipide fimétrie

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Régle la Ville qu'elle ennuye
Que les tems y foient concertés
Et les plaifirs même comptés.
La mode, la cérémonie,
Et l'ordre & la monotonie

Ne font point les Dieux des hameaux

Au poids de la trifte Satire

On n'y pese point tous les mots,

Et fi l'on doit blâmer ou rire,

Tout ce qui plaît vient à

vient à propos, ~

Tout y fait des plaisirs nouveaux.

Oui, chez les Bergers, fous ces hêtres J'ai vu dans la frugalité

Les dépofitaires, les maîtres

De la douce félicité.

J'ai vu dans les fêtes champêtres
J'ai vu la pure volupté

Descendre ici fur les cabanes,
Y répandre un air, de gayté

Que n'ont point les plaifirs profanes
Du luxe & de la dignité.
Feuillage antique & vénérable,
Temple des Bergers de ces lieux,
Orme heureux, monument durable
De la pauvreté respectable
Et des amours de leurs ayeux.
O toi, qui depuis la durée
De trente luftres révolus,
Couvres de ton ombre facrée
Leurs danfes, leurs jeux ingénus,
Sur ces bords depuis ta jeuneffe
Jufqu'à cette verte vieilleffe,
Vis-tu jamais changer les cœurs?
Et la félicité premiere

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Fuir devant la fauffe lumiere
De mille brillantes erreurs.
Laiffe les triftes avantages
D'orner des Palais somptueux
Au chêne, au cédre faftueux.

Les lambris couvrent les faux fages,
Les rameaux couvrent les heureux.
Tandis qu'inftruit par la nature
Et par la fimple vérité,

Mon efprit toujours enchanté
Pénétre au fein de la nature..

Hélas! par une loi trop dure
Le plaifir vole, le tems fuit
Pouffé par l'éternelle nuit.

C

Trop tôt, hélas ! les foins pénibles,
Les bienféances inflexibles
Revendiquant leurs triftes droits,
Nous feront quitter cet azyle,
Et nous arrachant de ces bois,

1

Nous replongeront pour dix mois
Dans l'affreux cahos de la Ville;
Et dans cet éternel fracas
De riens pompeux & d'embarras.
Dès qu'entraînés par l'habitude
Au féjour de la multitude,
Nous irons prendre les leçons
De la vertu toujours unie
Que la bonne Philofophie

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