3i Rome avoit pû voir marcher en même char Vainqueurs de leur difcorde & Pompée & Céfar! Voilà ces grands malheurs que craignoit votre zéle. O crainte ridicule autant que criminelle ! Souhaitez la plutôt, vous en avez besoin. Votre Trône lui-même en feroit le Théâtre fon. Suivant les fentimens dont vous ferez capable, Je faurai vous tenir innocent ou coupable. Cependant à Pompée élevez des Autels, Rendez lui les honneurs qu'on rend aux Immortels; Par un prompt Sacrifice expiez tous vos cris mes, Et fur-tout pensez bien au choix de vos victi mes; Allez y donner ordre & me laiffez ici Z Entretenir les miens fur quelqu'autre fouci. Dans la Scéne fuivante, c'eft la célébre Cornelie veuve de Pompée, qui après avoir été prife par Ptolomée, demande audiance à Céfar & lui parle ainfi : CORNELIE. Céfar, car le destin que dans tes fers je brave Me fait ta prifonniere & non pas ton efclave: Et tu ne prétens pas qu'il m'abatte le cœur Jufqu'à te rendre hommage & te nommer Sei gneur. De quelque rude trait qu'il m'ofe avoir frappée, Je dois bien toutefois rendre graces aux Dieux De ce qu'en arrivant je te trouve en ces lieux; Que Céfar y commande & non pas Ptolomée. Hélas! & fous quel Aftre, ô Ciel, m'as-tu formée ! Si je leur dois des vœux de ce qu'ils ont per mis Que je rencontre ici mes plus grands ennemis, Et tombe entre leurs mains plutôt qu'aux mains d'un Prince Qui doit à mon époux fon Trône & fa Provin ce. Céfar, de ta victoire écoute moins le bruit, Elle n'eft que l'effet du malheur qui me fuit, Je l'ai porté pour dot chez Pompée & chez Craffe Deux fois du monde entier j'ai caufé la difgra ce, Deux fois de mon hymen le noeud mal assorti A chaffé tous les Dieux du plus jufte parti. Heureuse en mes malheurs fi ce trifte hyme née, Pour le bonheur de Rome à Céfar m'eut don née, Et fi j'euffe avec moi porté dans ta maison Et quoique tu captive un cœur comme le mien De peur de s'oublier ne te demande rien. Ordonne, & fans vouloir qu'il tremble ou s'humilie, Souvens toi feulement que je fuis Cornelie. CE'S AR. O d'un illuftre époux noble & digne moitié! Dont le courage étonne & le fort fait pitié, Certes vos fentimens font affez reconnoître Qui vous donna la main & qui vous donna l'ê tre, Et l'on juge aifément au cœur que vous portez Où vous êtes entrée & de qui vous fortez. L'ame du jeune Craffe & celle de Pompée, L'une & l'autre vertu par le malheur trompée, Le fang des Scipions protecteur de nos Dieux, Parlent par votre bouche & brillent dans vos yeux, Et Rome dans fes murs ne voit point de famil le, Qui foit plus honorée ou de femme ou de fille. Plût au grand Jupiter, plût à ces mêmes Dieux Qu'Annibal eut bravé jadis fans vos ayeux, Que ce Héros fi cher dont le Ciel vous sépare N'eut pas fi mal connu la Cour d'un Roi bar bare, Ni mieux aimé tenter une incertaine foi, Que la vieille amitié qu'il eut trouvée en moi.. J'euffe alors regagné fon ame fatisfaite Jufqu'à lui faire aux Dieux pardonner sa défaite, Il eut fait à fon tour en me rendant fon cœur, Que Rome eut pardonné la victoire au Vain queur. Mais puifque par fa perte à jamais fans feconde re, Afin d'être témoin comme après nos débats, Choififfez lui, Lépide, un digne appartement, ne, C'eft-à-dire, un peu plus qu'on n'honnore la Reine. Commandez & chacun aura soin d'obéir. CORNELIE. Ciel, que de vertus vous me faites hair! Mort de kompée, Corne |