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Les autres Odes de Rouffeau font dans le même goût tant les facrées que les profanes, on n'a qu'à les confulter fi on en a la facilité. Celle-ci eft un exemple pour les autres, & un modele du Genre Sublime.

Ode fur la Canonifation des Sts. Staniflas Koftka & de Louis de Gonzague.

De l'Eternel s'ouvre le Trône;
Les Anges faifis de respect

De la fplendeur qui l'environne
Ne peuvent foutenir l'afpect.
Mais quoi! vers ce Trône terrible
A tout mortel inacceffible,
Dans un char plus brillant que l'or,
Par une route de lumiere,
Quittant la Célefte carriere,

Deux mortels vont prendre l'effort.

t

Volez vertus, & fur vos ailes

Enlevez leur char radieux

Jufqu'aux demeures immortelles,
Portez ces jeunes Demi-Dieux.
Ils vont la main de la victoire
Les conduit au rang que la gloire
Au Ciel dès long-tems leur marqua

Frappé de cent voix unanimes,

L'air porte au loin les noms fublimes De Gonzague & de Koftka.

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Sur des harpes majestueuses

A l'envi les Céleftes Chours
Chantent les flammes vertueufes
Qui confumerent ces beaux cœurs,
Leur jeuneffe fanctifiée,

La fortune facrifiée,

Les Sceptres foulés fous leurs pas;
Plus Héros que ceux de leur race,
A l'Héroïsme de la grace

Ils confacrerent leurs combats.

t

Tout le Ciel ému d'allégreffe
Chante ces nouveaux Habitans;
La Religion s'intéreffe

A leurs triomphes éclatans.

La vérité leur dreffe un Trône,
La candeur forme leur couronne
De Myrthes faints toujours fleuris ;
Et dans cette Fête charmante
Chaque vertu retrouve & vante
Ses plus fideles favoris.

Qu'offrois-tu, profane Elifée ?
Des plaifirs fans vivacité

Dont la douceur bien-tôt ufée

Ne laiffoit qu'une oifiveté.
Vains fonges de la Poëfie!

Le Ciel offre à l'ame choifie

Un bonheur plus vif, plus conftant
Dans les délices éternelles

Qui confervent toujours nouvelles
Le charme du premier inftant.

t

Là goûtant de l'amour fuprême
Les plus délicieux transports,

Les cœurs dans le fein de Dieu-même...
Mais quel bras fufpend mes accords?
Une fecrette violence

Force ici ma Lyre au filence,
Tous mes efforts font fuperflus.
Sous des voiles impénétrables
Dieu cache les dons adorables
Qui font le bonheur des Elus.
t

Nouveaux Saints, Ames fortunées,
Ce Dieu l'objet de vos défirs
Abrégea vos tendres années
Pour hâter vos facrés plaifirs.
Jaloux d'une plus belle vie,
La fleur de vos jours eft ravie

Sans vous couter de vains regrets.
Vous tombez dans la nuit profonde

Trop tôt pour l'ornement du Monde, Trop tard encor pour vos fouhaits.

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Dans les Céleftes Tabernacles,
Tranfmis des portes du trépas,
Touchez, changez par vos miracles
Ceux qui n'en reconnoiffent pas.
Que Dieu par des loix glorieufes
Change en Palmes victorieufes
Les Cyprès de vos faints Tombeaux,
Et que vos cendres illuftrées,

De la Foi morte en nos Contrées
Viennent rallumer les flambeaux.

Fiers Conquérans, Héros profanes,
Pendant vos jours Dieux adorés,
Que peuvent vos coupables Manes?
Vos Sépulchres font ignorés.
Par le noir abîme engloutie,
Votre puiffance anéantie
N'a pû furvivre à votre sort,
Tandis que de leur fépulture
Les Saints régiffent la nature
Et brifent les traits de la mort.

t

Peuples, dans des Fêtes conftantes,

Renouvellez un fi beau jour,

Prenez vos Lyres éclatantes,

Chantres Saints du Célefte amour.
Répétez les chants de louanges
Que l'unanime voix des Anges
Confacre aux nouveaux immortels;
que fous ces voûtes facrées
De fleurs leurs images parées
Prennent place fur nos Autels.

Et

Greffet.

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