intéreffant, quoique nous foyons convaincus de ccs vérités; mais il ne faut pas paffer cet endroit fans remarquer la noble & jufte idée qu'il donne de l'homme après le péché: C'est du haut de fon tróne un Roi precipite. Il en eft de même de la peinture qu'il fait du cœur humain, & de ce compofé inexplicable de grandeur & de baffefle qu'on y apperçoit. On ne fera pas fâché de voir ici comment le célébre Boileau a traité un partie du même fujet, c'est-à-dire, l'état d'innocence du premier homme, & les fuites de fon péché. Le morceau eft beaucoup plus court, mais il a fes beautés. Hélas! avant ce jour qui perdit ses neveux, Tous les plaifirs couroient au-devant de fes vœux; La faim aux animaux ne faifoit point la guerre. Le bled pour se donner, fans peine ouvrant la terre, N'attendoit pas qu'un bœuf preffé de l'aiguillon Traçât à pas tardifs un pénible fillon. La vigne offroit par-tout des grappes toujours pleines, Et des ruiffeaux de lait ferpentoient dans les plaines. Mais dès ce jour Adamn déchu de fon état Le chardon importun hériffa les guérêts, La pefte en même tems, la guerre & la famine. REMARQUES. Ce qui doit frapper le plus dans ce morceau, c'est la beauté des tours & des expreffions Poëtiques. Les perfonnes de goût ne manqueront pas de faire attention à celles-ci: Traçat à pas tardifs un pénible fillon, &c. Un tribut de douleur, &c. Heriffa les guérêts, &c. Aux brebis dérober leur toifon. Il ne faut avoir pour du fentiment, & ces reque marques feroient inutiles fi elles n'étoient deftinées pour les jeunes gens à qui elles font néceffaires leur former le goût. cela pour Le Sur l'immortalité de l'Ame M. Racine, dans les Vers fuivans, fait comprendre à tous les efprits raifonnables que notre ame doit être immortelle. Quand je penfe, chargé de cet emploi fublime, Plus noble que mon corps, un autre être m'anime. Je trouve donc qu'en moi, par d'admirables nœuds, Deux êtres oppofés font réunis entr'eux. .• • L'inftant où de fes fers une ame se délivre. du, L'efprit retourne au Ciel dont il eft defcendu... rir? B. O mort! eft-il donc vrai que nos ames heureuses, N'ont rien à redouter de tes fureurs affreufes ? Et qu'au moment cruel qui nous ravit le jour, Tes victimes ne font que changer de féjour ? Quoi! même après l'inftant où tes ailes funebres M'auront enfeveli dans de noires ténébres, Je vivrois? Doux espoir ! Que j'aime à m'y livrer!. Des fiécles à venir je m'occupe fans ceffe, J'apprens que je fuis fait pour l'immortalité. Mais des biens d'ici-bas mon ame eft mécon¬ tente: Grand Dieu, c'est donc à toi de remplir mon attente.. Quand fur la Terre enfin je vois avec douleur Oui, pour un autre tems l'Etre jufte & severe Air que fa bonté réserve fa colere. Racine, Poëme de la Religione REMARQUE ́S. On ne peut qu'admirer ici l'efprit de l'Auteur qui a fçu revêtir des couleurs de la Poëfie un fujet qui fembloit n'en pou yoir pas être fufceptible; il faut certai nement du travail pour avoir pu rendre en Vers, & en Vers très-bien frappés, des vérités qui font fi fort au-deffus de l'empire de l'imagination, & qui ont toujours paffé pour abftraites, puifqu'elles font ordinairement démontrées par des raifonnemens Métaphyfiques. Les réfle-xions que l'Auteur amene avec art fur une pareille matiere, font naître dans l'efprit une.noble idée de nous-mêmes, en penfant que nous fommes faits pour l'immortalité; cette pensée infpire natu rellement un fentiment de joye lorfque nous fentons l'excellence de notre nature, que des Efprits noirs voudroient confondre avec celle de la bête brute. C'est donc avec raifon que nous devons nous écrier avec le Poëte: Doux espoir ! que· j'aime à m'y livrer, Les Vers fuivans font fur le même fu-jet, & quoique d'une main différente, ils ne méritent pas moins de trouver ici leur |