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naturel de supposer qu'il auroit suivi la version Samaritaine : mais on a vu que, dans plusieurs passages, Abou-Saïd ne s'accorde point avec cette version. Il ne reste donc aucun doute sur ce que nous avons avancé, que le texte Hébreu-samaritain a servi d'original à la version d'Abou - Saïd.

être, pour

Je n'ai plus qu'à examiner de quelle utilité peut être, la critique, la version d'Abou-Saïd. Pour porter à cet égard un jugement sûr, il faudroit l'avoir étudiée à fond, en la comparant avec le texte et avec les autres versions, et sur tout avec la version Samaritaine. J'avoue que je n'ai point fait ce travail, et que je ne puis par conséquent déterminer d'une manière bien précise le degré de mérite et d'utilité de la version d'Abou-Saïd; j'en citerai néanmoins quelques passages qui me semblent propres à en donner une bonne idée, et à en faire desirer la publication. Dans les bénédictions de Jacob à ses enfans, un des passages qui ont le plus embarrassé les interprètes et les commentateurs, est celui-ci, où Jacob, parlant de Joseph, dit, suivant la leçon

בֵּן כֹּרָת יוֹסֵף בֵּן פֹּרָת עֲלֵי עָיִן בָּנוֹת צָעֲדָה, du texte Hébreu des Juifs

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aux raisons que l'on a de soupçonner que le texte Samaritain a été, en quelques endroits, réformé d'après la version des Septante. Ces interprètes avoient suppléé ici une ellipse qui, peut-être, leur paroissoit jeter quelque obscurité dans le texte, et ils ont été copiés par ceux qui ont corrigé le texte Samaritain. On pourroit aussi supposer que apes est originairement une glose marginale, qui a passé ensuite dans le texte. On voit dans le livre de Ruth, chap. III, v. 13. phrase pareille à celle-ci, mais où l'ellipse pas lieu: et Daniel, chap. 111, v. is, fournit un exemple semblable à celui de l'Exode. Le P. Houbigant l'a éludé en traduisant par une interrogation.

n'a

une

Je n'ai pas besoin de dire besoin de dire que dans le passage du Deutéronome, ch. xxv11, v. 4, où le texte et la version Samaritaine substituent le mont Garizim au mont Ebal, notre version Arabe est conforme au texte Samaritain; on devine, sans que je le dise, que cela ne peut être autrement. Mais je saisis cette occasion

T

d'observer que cette leçon, taxée de corruption évidente, non-seulement par les ennemis déclarés du Pentateuque Samaritain, mais même par plusieurs de ses plus zélés défenseurs, ne me paroît pas aussi décisive contre l'autorité du texte Samaritain, que le prétend M. J. M. Lobstein, dans sa dissertation intitulée Commentatio historico-philologica de montibus Ebal et Garizim. M. Lobstein croit que du jugement que l'on porte de cette seule variante dépend nécessairement la préférence que l'on doit accorder à l'un des deux textes Hébreu ou Samaritain sur l'autre. C'est pousser, ce me semble, beaucoup trop loin la conséquence : les Samaritains pourroient avoir, à une époque très-reculée, altéré le texte en cet endroit, altération devenue trèsimportante pour eux depuis l'établissement de leur temple sur le mont Garizim, sans que pour cela on dût regarder comme autant d'altérations tous les endroits où leur texte diffère de celui des Juifs, et où ils n'avoient aucun intérêt à

עלי שור

you suivant celle du texte Samaritain azwm2v 'mamym 'más Quiconque comparera sans préjugé ces deux leçons, n'hésitera pas, je crois, à donner la préférence à celle du texte Samaritain, qui, outre qu'elle ne présente pas une anomalie grammaticale, comme celle du texte des Juifs, a encore en sa faveur l'autorité des Septante. Mais il reste toujours une difficulté dans les deux derniers mots; car soit que l'on traduise avec les Septante we's μe avάçpefov ad me convertere, soit que l'on traduise avec d'autres interprètes ascendit murum, il est difficile de lier ces idées avec ce qui précède. Abou - Saïd conserve les mots mêmes de l'original en traduisant ainsi

ابني صغيري علي سور

et comme

dans nos deux manuscrits on a eu soin de mettre un teschdid sur

de et que d'ailleurs

علي

ي le

Jest au nominatif, ces mots ne peuvent signifier autre chose que Filius meus natu minimus factus est mihi murus, c'est-à-dire, « J'ai trouvé dans le plus » jeune de mes enfans un asile, une forteresse. » Ce sens est aussi un de ceux que propose le commentateur Samaritain que possède le falsifier. Il est d'ailleurs remarquable | mise au jour par de savans critiques, tels que le texte Samaritain étant souvent que G. Whiston, dans l'ouvrage intid'accord avec les Septante quand il titulé an Essay towards restoring the true diffère du texte des Juifs, on sera souvent text of old Testament; B. Kennicott, dans obligé de supposer que les Samaritains sa seconde dissertation on the state of ont corrigé leur texte d'après une version the printed Hebrew text, et J. D. Miqui auroit dû leur être odieuse comme chaelis, dans son excellent Traité du étant l'ouvrage de leurs ennemis. Mais droit Mosaïque. Plusieurs siècles aupad'ailleurs est-il bien sûr que, dans ce ravant, Jacques d'Edesse, ou l'auteur des passage controversé, l'altération ne doive notes qui se trouvent jointes à la révipas être mise sur le compte des Juifs! Si sion de la version Syriaque des livres de elle a été faite avant la version des Moïse dans le manuscrit que j'ai fait Septante, du temps d'Alexandre par connoître ailleurs, avoit remarqué que exemple, l'argument que l'on tire de la la leçon du texte Samaritain étoit préféconformité de toutes les anciennes ver- rable à celle du texte Hébreu. C'est sions, autres que celles des Samaritains, l'objet d'une note sur le ch. XXVII, v. 4, avec le texte Hébreu des Juifs, se réduit du Deutéronome, que j'ai rapportée dans à rien. Assurément les Juifs avoient la Notice de ce manuscrit (Voy. Not. grand intérêt, quoi qu'en dise M. Lobs- et Extr. des manusc. de la Bibl. nat., tein, à faire cette altération, pour ôter tom. IV, p. 666). Le motif allégué par à leurs adversaires un argument puissant l'auteur de cette note, a frappé également en faveur du temple de Garizim. L'opi- Basnage, comme on peut le voir dans nion que je propose ici, et je l'avoue son Histoire des Juifs, tom. II, part. I, avec une grande réserve, a déjà été p. 57.

la bibliothèque d'Oxford. Voici ce qu'il dit en cet endroit, que M. Schnurrer a fait connoître. Après avoir proposé une autre explition, où by est pris simplement pour by comme dans le texte mas

sorétique, il ajoute l'azu m20 mamom máa

وقيل أن معني علي سور التحصن به من الحوادث واتوقي به الكوارث فهو جنتي

منها وسهمي الذي اصمت به الشدايد لانه يكفلني

Suivant ، واولادي في الدنيا وينفعني بدعايه في الاخرة

16,

Eichhorn's

P. 188.

«

Repertor. part. » d'autres, le sens de ces mots du texte m2 'mavy ‘máa » est celui-ci : Il sera pour moi une muraille, dans laquelle je » trouverai une défense contre les infortunes, et qui me mettra à » l'abri des malheurs ; il sera mon bouclier contre les maux ; il » sera ma flèche, par le moyen de laquelle je triompherai de » l'adversité : car il prendra soin de moi et de mes enfans dans » ce monde ; et dans l'autre, il me servira utilement

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par ses

עלי

En suivant cette idée, ne pourroit - on pas jeter un nouveau jour sur le premier membre de ce verset, et dire qu'en vertu du parallélisme ordinaire aux langues Orientales, les mots y doivent être entendus d'une manière analogue, mihi est fons! Cela me paroît d'autant plus vraisemblable, qu'on sait quel prix attachent à la découverte d'une source ou d'une citerne, des peuples nomades, qui errent avec leurs troupeaux, à la manière des Arabes Bédouins, dans les déserts et les lieux arides, et combien est précieuse pour eux la possession d'un semblable trésor. Les Septante et la version Samaritaine viennent à l'appui de cette conjecture, quoique leur traduction soit fort différente. Les Septante ont traduit μ8 (λlòs, croyant sans doute que les mots Hébreux signifioient, super me defixos habens oculos ut zelotes ; et l'interprète Samaritain a rendu le texte plus littéralement 394 mx20 super me oculus ejus mais ce qu'il faut observer, c'est que les Septante, aussi bien que cet interprète, ont pris le dans pour l'affixe de la première personne, et non pour

une lettre épenthétique. Si on adopte ces réflexions, et si l'on suit l'ouverture que présente la version d'Abou - Saïd, le sens de tout ce passage sera : « Joseph est un enfant de fécondité et d'abon>> dance; il a été pour moi comme une source d'eau vive au » milieu d'un désert aride: le plus jeune de mes enfans a été pour moi comme une muraille forte et impénétrable, qui m'a » servi d'asile contre les attaques de l'adversité. »

Au chap. xx11 du livre des Nombres, v. 5, on lit que Balac envoya des députés vers Balaam, fils de Béor, à Péthor, qui étoit sur le fleuve dans le pays de son peuple b

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version d'Abou - Saïd

porte :

فارسل رسلا الي بلعام بن بعور it envoya des » المفسر الذي علي النهر ارض بني عمان

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› députés vers Balaam, fils de Béor, l'interprète qui demeuroit près le fleuve dans le pays des enfans d'Ammon. »

Il y a ici deux choses à remarquer la première, qu'AbouSaïd, au lieu de prendre Péthor pour le nom d'une ville, comme ont fait les Septante, Onkélos, Saadias et le traducteur Arabe d'Erpénius, l'a pris pour un nom appellatif, comme ont fait aussi l'auteur de la Vulgate, le traducteur Syrien et l'interprète Samaritain; la seconde est qu'il a lu, avec le texte et la version Samaritaine, la version Syriaque et la Vulgate, y Ammon, au lieu de y son peuple, leçon qu'il est difficile de ne pas adopter, quoiqu'elle ait contre elle l'autorité des Septante.

Dans ce même chap. v. 29, Balaam, adressant la parole à l'ânesse, lui dit qu'il l'a frappée parce qu'elle s'est moquée de lui; du moins est-ce le sens qu'on donne ordinairement aux mots Hébreux Saadias, suivant l'édition de Constanti

nople, se sert du mot

3 ce qui signifie, tu t'es frottée

تمرست

suivant fauteur تمرس بالشي واسترس احتك به ) contre moi

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du Kamous). Dans les Polyglottes on lit£g)ÿ

tu t'es

roulée avec moi. Abou-Saïd donne au terme de l'original une

autre signification ; il traduit 3

parce que tu as

1

usé de violence envers moi; car c'est-là le sens de suivi

de la préposition → On lit dans le Kamous b

بطش به یبطس

ويبطش اخذه بالعنف والسطوة .ce qui fixe le sens de ce mot ويبطيش

Au v. 3 du chapitre suivant, "Abou - Saïd a adopté une traduction qui lui est particulière. Au lieu de rendre le texte comme on le fait ordinairement : « Peut-être le seigneur viendra-t-il à » moi; et ce qu'il m'aura fait voir, je vous l'annoncerai; »

pour un verbe, et il a דבר if a pris וּדְבַר מַה יַרְאֵנִי וְהִנֵּרתִּי לָךְ فعسى يصادف مالاك الله للقاى فيقول ما يرشدني traduit

Fortè obvius fiet mihi angelus Domini, et loquetur id quod me dirigat [ad veritatem cognoscendam] et nuntiabo tibi. Cette interprétation est fondée sans doute sur le qui précède le verbe

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et sur le mot conjonctif qui semble ici tenir la place de suivant l'interprétation ordinaire. Peut-être aussi AbouSaïd a-t-il lu L'interprète Samaritain, qui traduit 22 mmgam a loquar id quod ostenderit mihi, semble avoir lu 993 Je conjecture que a ici, comme en arabe, la fonction de généraliser le mot qui précède, et que le sens est, et rem quamcumque ostendet mihi et nuntiabo tibi, comme on lit dans une comparaison quelconque. Sur. II, v. 26.

مثلاً ما I'Alcoran

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le

Le texte ajoute Ce dernier mot a été diversement interprété; la version Samaritaine le rend par Буулу се que P. Morin a traduit insidians. Abou-Saïd emploie le mot L latitans. C'est aussi, je crois, le vrai sens de

et peut-être un des avantages que l'on peut retirer de la version d'AbouSaïd, est-il de mieux entendre la version Samaritaine.

Au v. 8 du chap. XXIII, on lit dans le texte Hébreu pe

-et tous les interpretes ont tra לא קבה אל וּמָה אֶזְעֹם לֹא זָעַם יְהוָה

duit littéralement

maledicam (cui) non

comme interrogatif : Cur (ou quomodo)
maledixit Dominus! cur (ou quomodo)

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