DES LETTRES DE M. DE VOLTAIRE. LETTRE PREMIERE. A M. LE COMTE DE ROCHEFORT. 1 de janvier. Je présente mes tendres et fincères respects au couple E aimable qui a honoré de sa présence, pendant quel- 1769. Je me flatte qu'un jour Dixhuitans (*) fera le meil- (*) Madame de Rochefort avait dix-huit ans. Quoiqu'on dife à Paris que la fête de la Préfen1769. tation de Notre-Dame doit fe célébrer au commencement de janvier, je n'en crois encore rien; car à qui préfenter? à des vierges? cela ne ferait pas dans l'ordre. On parle de grandes tracafferies. Je ne connais que celles de Corfe. Elles ne réuffiffent pas plus dans l'Europe que le Tacite de la Bletterie en France. Mais le mal eft médiocre; et, après la guerre de 1756, on ne peut marcher que fur des rofes. Pour le parlement, il fait naître le plus d'épines qu'il peut. LETTRE II. · A MADAME DE SAUVIGNY. MADAME, A Ferney, 3 de janvier. Il y a dans la lettre dont vous m'honorez, du 27 de décembre, un mot qui m'étonne et qui m'afflige. Vous dites que monfieur votre frère vous menace, et que vous ne devez plus rien faire pour empêcher fes menaces d'être effectuées. Je ferais inconfolable fi, ayant voulu l'engager à fe confier à vos bontés, j'avais pu laiffer échapper, dans ma dernière lettre, quelque expreffion qui pût faire foupçonner qu'il vous menaçât, et qui pût jeter l'amertume dans le cœur d'un frère et d'une fœur. Je vous ai obéi avec la plus grande exactitude. |