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dès 1717 et se renouvelèrent en 1754 devant les maire et jurats de Bordeaux, chargés de la police sur les quais, havres et ports de la ville. Alors furent prises contre ces bateliers les mesures suivantes :

Il leur fut enjoint:

<< De tenir leurs bateaux prêts depuis la pointe du jour jusqu'à la nuit close, à peine de 10 livres d'amende pour la première fois. »

Il leur fut fait défense:

« 1o D'empêcher ceux qui voudront passer de s'embarquer dans tel bateau que bon leur semblera, et d'alléguer aucun tour de rôle entre eux;

» 2o De mettre et de recevoir dans les plus grands bateaux au delà de 30 personnes et dans les moindres au delà de 15, à peine de 50 livres d'amende;

» 3o De faire attendre plus d'une demi-heure, sous prétexte que les bateaux n'ont pas le nombre fixé de passagers.

» 4o Enfin de prendre ni d'exiger pour le passage au delà de ce qui est marqué au tarif. »

Au commencement de 1763, et pour faciliter les abords du port de Bordeaux, on fit un chemin qui vint aboutir directement au port de La Bastide, vis-à-vis la place Bourgogne au centre de la ville; alors la poste cessa de passer par le port de Lormont, elle se dirigea sur le port de La Bastide, dont le passage devint très fréquenté. Pour le rendre aussi facile et aussi sûr que possible, les maire, lieutenant de maire et jurats de la ville de Bordeaux résolurent d'établir sur ce point un service public municipal, et en raison des frais à faire pour l'organiser sur de bonnes bases, ils demandèrent à l'État la concession de ce passage, moyennant l'autorisation de percevoir les droits jusque-là fixés par les règlements.

Ces magistrats se croyaient parfaitement fondés dans leur prétention, comme ayant toujours été maintenus, à l'exclusion même des officiers de l'amirauté, dans l'exercice de la police sur les quais et ports de la ville.

Ils faisaient observer que cette concession ne porterait aucun préjudice aux intérêts de personne, attendu que personne n'a jamais eu aucun droit sur ce passage, livré jusqu'ici aux matelots, premiers occupants, qui en faisaient le service sans y être nullement tenus.

Ils ajoutaient que ces matelots employaient à leur service des bateaux à bords relevés ne permettant qu'à grand'peine l'entrée des hommes et des bestiaux, et qu'il n'était praticable d'y introduire des voitures qu'en les démontant presque en entier, ce qui entraînait de grandes pertes de temps et exposait à la perte totale des voitures; que sous ce rapport il était donc de l'intérêt public de leur accorder une demande par laquelle ils s'engageaient à appliquer au passage de La Bastide des bacs et bateaux dont les plans seraient dressés par le sieur Grognard, habile constructeur des navires du Roi, et qui seraient de grandeur convenable, solidement construits, bien équipés et gouvernés par de bons matelots, propres à recevoir toutes sortes de voitures attelées, promettant en outre de donner chaque année au domaine une redevance de 10 livres.

Ces raisons obtinrent une approbation complète, et un arrêt du 12 juin 1763, du Roi en son Conseil, fit aux maire et jurats de Bordeaux concession du droit et permission d'établir sur la Garonne au passage de La Bastide à la ville des bateaux plats et autres pour passer et repasser toutes sortes de personnes, bestiaux et voitures, à la charge par eux d'entretenir les dits bacs et bateaux, ensemble les abords, de manière à rendre en tout temps le dit passage

sûr et commode, et leur permet en conséquence de percevoir les droits ci-après, savoir:

1. Pour une personne ou pour ceux qui voudront fréter le bateau...

2. Pour une personne avec sa charge...

.........

3. Pour un cavalier et son cheval.......

4. Pour une charrette à 1 cheval, chargée ou non...

5. Pour un cabriolet ou voiture à 2 roues et 1 cheval, y compris le conducteur et les personnes dans la voiture......

6. Pour une berline ou voiture à 4 roues et 2 chevaux, y compris le conducteur et les personnes dans la voiture....

7. Pour un tonneau de vin ou pièce d'eau-de-vie..

porté aux Chartrons, en Paludate ou à bord. 8. Pour un cent de fagots ou faissonnats, ou cent de bûches......

12 sols.

1

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<< Fait Sa Majesté très expresse défense aux maire et jurats, ainsi qu'à leurs fermiers et préposés, de percevoir de plus grands droits que ceux ci-dessus; à tous matelots, bateliers ou autres de passer des personnes, bestiaux ou voitures dans d'autres bateaux que ceux établis par les dits maire et jurats, à peine de 500 livres d'amende. »

Cet arrêt royal fut suivi le 17 janvier 1764 d'un arrêt du Parlement ainsi conçu :

<< Ordonne :

» 1° Qu'il sera établi par les maire, lieutenant de maire et jurats de la ville de Bordeaux pour le service du passage de La Bastide, 3 bacs ou bateaux plats, à rames, propres à embarquer les charrettes ou voitures attelées, armés chacun de 5 matelots faits et experts à la navigation, et en outre 12 filardières ou gabares à quille et à un mât, avec chacune 3 matelots expérimentés et connaissant la passe, lesquels ne pourront être employés à autre chose qu'au dit

passage;

» 2° Que les bateaux des propriétaires de fonds situés aux environs, et ceux appartenant aux différents ports au-dessus ou au-dessous de la ville pourront aborder vis-à-vis la place Bourgogne, et même dans l'étendue des lieux fixés pour le dit privilége, en n'y causant néanmoins point d'obstacles ni d'embarras qui puissent priver le public d'un port utile et commode vis-à-vis une des principales portes de la ville;

3o Dans le cas où les suppliants se détermineraient à affermer le dit passage, la dite ferme ne pourra être donnée qu'à des bourgeois et habitants de Bordeaux ou de la sénéchaussée de Guienne. >>

La ville de Bordeaux devenue ainsi concessionnaire du passage de La Bastide, elle l'afferma par adjudication du 26 octobre 1764, sous les conditions suivantes imposées au fermier :

<< 1o De se conformer aux règlements de 1763 et 1764;

» 2o De laisser en bon état, à la fin de son bail, les bateaux, gabares, agrès et apparaux qui lui étaient remis; » 3° De fournir à tous les frais d'entretien et exercice du dit passage;

» 4o D'entretenir pendant la nuit le nombre de bateaux nécessaire pour le passage des courriers et autres cas pressants;

» 5° De ne passer dans les plus grands bateaux que 30 personnes et au-dessous, et dans les autres en proportion; » 6o De payer le prix de son adjudication dans les mains du trésorier de la ville, quartier par quartier et d'avance.

La traversée de ce passage (') continua ainsi de se faire d'une manière assez régulière dans les bateaux de construction perfectionnée, mais non toutefois sans y éprouver des difficultés et des retards provenant soit de l'effet des vagues et des courants, soit de l'inclémence des saisons et des temps de brouillard; aussi désirait-on vivement d'en être affranchi par la construction d'un pont.

$2.

Des projets de ponts sur bateaux.

Deux projets de ponts sur bateaux furent présentés en 1776 à M. l'intendant Dupré de Saint-Maur, savoir : Par M. Sylveira, un pont sans accessoires, dont le passage

(1) Le passage de La Bastide en 1776 était servi par 28 matelots, y compris l'adjudicataire qui en est le chef, et par 12 gabares et 2 bateaux plats appartenant à la ville. Il était affermé 8,000 francs.

tant au-dessous qu'en dessus sera praticable en tout temps et présentera à la vue 35 arcades demeurant à toute marée à la hauteur de 12 à 16 pieds au-dessus de l'eau;

Par M. Chevalier, avocat, un pont haussant et baissant insensiblement sans aucun secours suivant la marée, avec achat sur la rive droite, de près de 500 journaux de terrain, qui serviront à la création, dans le quartier de La Bastide, d'un faubourg devant le disputer un jour à la façade parallèle du port, ainsi qu'à l'édification de vastes magasins et à l'ouverture de canaux, bassin à flot et forme sèche pour radoub et construction, tous établissements qui procureront à la marine des facilités inappréciables que le port de Bordeaux ne lui a pas données jusqu'ici.

10 Projet de M. SYLVEIRA.

Le pont de M. Sylveira, supposé inébranlable aux courants les plus rapides comme aux chocs les plus violents, sera porté par 36 bateaux, ayant chacun 54 pieds de long sur 24 pieds de large; ils seront à varangues plates; leur forme sera aiguë devant et derrière, ils ne caleront que 4 pieds, chacun d'eux sera tenu par 4 ancres, à chacune desquelles y aura une chaîne.

il

Le pont sera lié d'un bateau à l'autre par des charpentes et poutres, retenues par des liens de fer, qui formeront les arcades ou voûtes sur lesquelles portera le tablier.

Un garde-fou, ou galerie, règnera tout le long du pont, avec des bancs de distance en distance.

Il sera fait dans la longueur dudit pont trois bascules ou ponts-levis pour le passage des grands navires. La maîtresse bascule, placée dans le milieu, aura 36 à 40 pieds de large et sera éclairée par quatre fanaux. Les deux autres, à égale distance de la première, auront 24 pieds de large et seront éclairées par deux fanaux. Ces ponts-levis seront toujours

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