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équilibre à travers le cercle formé par le pont de Varole et le cervelet. Longet a rappelé que le premier auteur qui ait signalé les mouvements de rotation autour de l'axe longitudinal, à la suite de sections du pédoncule cérébelleux, est Pourfour du Petit (1766). Après une section de la racine de l'un des pédoncules comprenant la partie correspondante du cervelet, il a vu le chien ne plus pouvoir se soutenir et se rouler comme une boule ».

Longet a obtenu aussi des mouvements de rotation après section du pédoncule cérébelleux moyen, mais, dans ses expériences, la rotation a eu lieu du côté opposé à la section: « le pédoncule droit était-il coupé, l'animal roulait sur lui-même de droite à gauche ». Longet invoque à l'appui des phénomènes qu'il a constatés, les observations pathologiques : celle de Serres (1) dont le malade tournait sur lui-même de droite à gauche et la lésion siégeait sur le pédoncule droit du cervelet; de Belhomme (2): la malade qu'il a observée roulait le plus souvent à droite et une exostose comprimait surtout le pédoncule gauche; enfin un mouton, chez lequel le pédoncule moyen droit du cervelet était ramolli et comprimé par un kyste, roulait de droite à gauche selon l'axe de la longueur (pièce et observation recueillies par Gavarret à l'école d'Alfort). Lafargue (3) a constaté que la rotation selon l'axe du corps s'opère toujours du côté de la section vers le côté opposé. Dautres auteurs, et particulièrement Gratiolet et Leven (4), ont signalé ces mouvements de rotation. Schiff (5) a repris les expériences de Magendie et de Longet en employant le manuel opératoire de chacun d'eux : quand, à l'exemple de Magendie, il traversait la membrane occipito-alloïdienne pour longer le plancher du quatrième ventricule et diriger ensuite l'instrument tranchant latéralement vers le pédoncule cérébelleux moyen, il obtenait, comme Magendie, la rotation autour de l'axe longitudinal, du côté sain vers

(1) SERRES. Cité par LONGET et MAGENDIE. Journal de Phys. expérimentale, 1823, t. III.

(2) BELHOMME. Troisième mém, sur la localisation des fonctions cérébrales. Paris, 1839.

(3) LAFARGUE. Essai sur la valeur des localisations encéphaliques sensorielles et locomotrices, etc. Thèse inaug., Paris, 1838.

(4) GRATIOLET et LEVEN. Arch. des sciences, janvier, juin 1868.

(5) SCHIFF. De ri motoria baseos encephali inquisitiones experimentales. Bockenhemii, 1845.

le côté blessé : si, au contraire, comme Longet, il traversait l'occipital, puis le cervelet, pour diriger le bistouri vers le pédoncule cérébelleux moyen, la rotation se faisait du côté blessé vers le côté sain. Schiff a remarqué que, si l'animal n'était pas fixé pendant l'opération, de façon à ce qu'il eût sa liberté après la section du pédoncule, il se produisait aussitôt deux ou trois rotations vers le côté sain, puis une série de mouvements rotatoires en sens opposé vers la lésion. Les premiers mouvements de rotation seraient l'effet de l'irritation et les mouvements inverses celui de la paralysie, le pédoncule cérébelleux moyen étant une voie centrifuge au moyen de laquelle le cervelet transmet les impressions volontaires aux muscles rotateurs et fixateurs 'de l'axe vertébral.

Lafargue estime que la section d'un pédoncule détermine la paralysie du côté opposé; étant données la chute sur un côté paralysé et l'activité isolée de deux membres, leurs efforts produiront la rotation. selon l'axe, par cela même qu'ils agiront seuls, en poussant tout le corps vers le côté faible.

Longet a voulu expliquer les différences des résultats obtenus par l'anatomie normale : inutile de dire que cette explication ne tient plus devant les données nouvelles de l'anatomie : il nous suffira d'exposer les idées de Longet sur la constitution du pédoncule cérébelleux moyen. Le faisceau intermédiaire du bulbe, constitué par la portion de la colonne antéro-latérale qui ne se continue point avec la pyramide du côté opposé, situé entre l'olive et le corps restiforme remonte vers la protubérance et s'y trifurque: « La première division, non entrecroisée, s'incurve en dehors pour s'adjoindre aux fibres transverses du pédoncule cérébelleux moyen, qui, de la sorte, contient en arrière des fibres non entrecroisées des deux autres divisions, l'une forme une commissure transversale au-dessous des tubercules quadrijumeaux, l'autre longe la face postérieure de la protubérance sur laquelle elle fait saillie au-dessous de l'épendyme cette dernière division s'entrecroiserait ensuite dans la protubérance, fournirait des fibres au pédoncule cérébral opposé, et à la partie fasciculée antérieure du pédoncule cérébelleux moyen du côté opposé »; chacun des pédoncules cérébelleux moyens contient donc en avant des fibres entrecroisées. C'est pourquoi, en lésant en avant l'un des pedoncules cérébelleux moyens, on obtient des effets croisés, tandis que la section en arrière

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coupant les fibres non entrecroisées détermine des effets directs. Schiff tente, comme Longet, d'expliquer le phénomène par une disposition anatomique spéciale : les fibres du pédoncule cérébelleux moyen de chaque côté s'entrecroiseraient complètement avec celles du côté opposé à l'intérieur du cervelet or, dans le procédé de Longet, comme on intéresse le cervelet lui-même, on sectionne par là même le pédoncule du côté opposé; tandis que, dans le procédé de Magendie, on ne coupe que le pédoncule du même côté ; c'est pourquoi dans le premier cas il y aurait rotation du côté opposé à la section, et dans le second rotation du même côté. Schiff a réfuté l'opinion de Lafargue: d'après lui, le phénomène du roulement serait suffisamment expliqué par l'activité unilatérale des muscles rotateurs de la colonne vertébrale, sans faire intervenir les muscles des membres d'un seul côté. En effet, le mouvement de roulement se produit encore si on immobilise un ou deux membres postérieurs par la résection du sciatique ou si on lie les quatre membres enfin Schiff ne pense pas que ce mouvement soit le résultat d'un vertige psychique dans lequel interviendrait la vision et dont le strabisme serait un indice: le phénomène se produit encore chez les animaux rendus préalablement aveugles. D'après Rolando et Magendie, les lésions du pédoncule cérébelleux inférieur détermineraient un phénomène analogue, caractérisé par l'incurvation en arc du tronc du côté de la lésion. Luciani a repris plus tard cette question si intéressante des mouvements de rotation, qu'il a très bien analysée et critiquée nous exposerons ses idées à ce sujet en même temps que sa méthode et ses idées sur la fonction du cervelet.

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Wagner (1) est un adepte de Flourens. Il admet que le cervelet soit le siège de la faculté d'équilibration. Après l'extirpation d'une moitié du cervelet, il y aurait mouvement de manège, indifféremment d'un côté ou de l'autre s'il a été intéressé totalement, il existe des troubles généraux de l'équilibre; mais ces phénomènes immédiats observés après l'extirpation du cervelet disparaissent au bout de quelques heures : les animaux continuent tout au plus à marcher d'une façon incertaine, les pieds largement écartés, puis la faculté de

(1) WAGNER. Recherches critiques et expérimentales sur les fonctions du cerveau. Journal de phys, de l'homme, 1861.

marcher et de voler est récupérée : aussi ces phénomènes ne seraient dus qu'à des tiraillements exercés sur les pédoncules cérébelleux et sur quelques faisceaux du bulbe et de la moelle allongée. Lorsqu'ils ont disparu chez les animaux conservés plus longtemps, on constate les trois symptômes suivants :

1o Les membres se mettent en extension.

2o Il y a torsion de la tête et du cou.

3o Il se produit un tremblement particulier, tremblement analogue à celui de la paralysie agitante. Le tremblement devient très prononcé quand on saisit l'animal à pleines mains, ou qu'on l'alimente. La moindre excitation suffit pour le jeter dans une agitation extrême. La nutrition subirait aussi des modifications importantes vomissements, déjections alvines, amaigrissement, taches blanches, abaissement de la température. Ces phénomènes seraient dus à l'exaltation du pouvoir réflexe par la diminution de l'influence des centres supérieurs. La fonction du cervelet serait donc de modérer les mouvements. Wagner a eu le mérite de distinguer nettement deux espèces de phénomènes consécutifs aux mutilations cérébelleuses: des phénomènes immédiats de courte durée, des phénomènes tardifs, masqués sans doute par les premiers, mais persistant longtemps. Dalton (1), dont les travaux sur le cervelet du pigeon remontent à la même époque, et Brown-Séquard (2) ont établi la même distinction: Dalton insiste sur ce fait que, les premiers phénomènes indiqués déjà par Flourens ayant disparu au bout de 5 à 8 jours, il ne subsistait plus ensuite qu'une faiblesse de tous les mouvements.

Leven et Ollivier (3), dans leurs recherches sur la physiologie et la pathologie du cervelet, citent quelques expériences qu'ils ont faites sur les cochons d'Inde : ils divisent ces expériences en deux séries; dans la première, le cervelet seul a été lésé; dans la deuxième, il y a eu compression par un épanchement sanguin. Ils n'ont guère réalisé que des piqûres du cervelet: après un ou deux septénaires l'animal

(1) DALTON. Cit. par LUCIANI. On the cerebellum, as the centre of coordination of the voluntary movements. American Journal of medical sciences, 1861.

(2) BROWN-SÉQUARD. Remarques sur la physiologie du cervelet et du nerf auditif. Journal de physiol. de l'homme, 1862.

(3) LEVEN et OLLIVIER. Recherches sur la phys. et la path. du cervelet. Archives gén. de médecine, 1862-63.

était généralement guéri. Ils n'ont constaté qu'un seul ordre de phénomènes morbides, des troubles de la motilité: mouvements de rotation, de manège, inflexions de la tête sur le tronc, hémiplégie incomplète, lenteur de la progression. «Soient A et B les deux hémisphères cérébelleux. Si l'on pique A, l'animal restera couché sur le côté du lobe A: ce lobe innervant les muscles du côté opposé, sa piqûre paralyse momentanément ces muscles et le système musculaire, innervé par B, traversé par un courant nerveux en puissance, entraînera le côté opposé dès qu'il sera libre. » Les mouvements de rotation ont lieu presque toujours du côté lésé vers le côté sain ; les mouvements de manège ont lieu du côté sain vers le côté lésé. A la suite des piqûres, on constate encore un affaiblissement musculaire général, la marche est difficile ; quelquefois il se produit une hémiplégie, quelquefois aussi il existe une tendance irrésistible a être entraîné du côté opposé à celui de la lésion. Un symptôme presque constant est le strabisme, il est le plus souvent croisé, ordinairement simple, plus rarement double.

Vulpian (1) a constaté que les phénomènes consécutifs aux lésions expérimentales du cervelet s'accentuent à mesure qu'on intéresse des parties plus profondes de l'organe; l'hémiplégie que l'on détermine ainsi est due généralement à une compression quand elle est croisée ; quand elle est directe, elle doit s'expliquer simplement par les rapports directs entre la moelle et le cervelet; mais le plus souvent il n'y a pas d'hémiplégie d'un côté ou de l'autre, ce qui n'a rien d'étonnant, dit Vulpian, si on réfléchit que le cervelet ne préside pas à la myotilité même et qu'il est même douteux qu'il ait une influence directe sur les mouvements volontaires. Vulpian accorde la plus grande part des phénomènes observés consécutivement aux lésions cérébelleuses, à l'irritation; si on enlève des couches d'abord superficielles, puis de plus en plus profondes, le trouble du mouvement, nul l'orsqu'on n'a pas dépassé les couches superficielles, se manifeste quand on atteint les parties excitables sans qu'il se produise aucun tiraillement sur les pédoncules; aussi pour Vulpian les phénomènes cérébelleux, observés dans ces conditions, ne seraient pas dus seulement à une suppression de fonction, mais aussi à une irritation des parties profondes du cervelet et des parties de l'isthme céré

(1) VULPIAN. Leçons sur la physiologie gén, et comp. du système nerveux. Paris,

1866.

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