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reconnu pour le Dieu. On donna en fuite le nom de Neptune à des Princes inconnus, qui avoient traverfé les mers pour venir chercher des établiffemens dans de nouveaux pays, & leurs différentes aventures furent attribuées à un feul. De-là vient le grand nombre de femmes, de maîtreffes & d'enfans qu'orr met fur le compte de ce Dieu, fes métamorphofes en taureau, en fleuve, en bélier, en cheval, en oiseau, en dauphin, parce qu'on diftinguoit autrefois, comme on fait aujourd'hui, les vaiffeaux par différentes figures d'animaux, de fleuves, &c. qu'on repréfentoit fur leurs pouppes; delà les enlévemens qu'il a faits, parce que la navigation commença par des pirateries. Enfin on l'a regardé dans les fiécles fabuleux, comme l'auteur de tout ce qui s'étoit paffé de mémorable fur la mer. Ainfi Neptune qui eut de la Nymphe Libye, Bélus & Agenor, l'un Roi d'Egypte, l'autre Roi de Phoenicie, n'étoit autre chofe qu'un Prince Egyptien, qui s'étoit adonné à faire la courfe fur mer. Un autre Neptune cut d'Amymome

pour

fille de Danaus, Nauplius, pere de Palaméde, l'un des chefs qui fe trouverent au fiége de Troye. Un autrefut le pere de Cercyon, cet infigne brigand dont Théfée purgea la terre. Un autre eut Pélias, de Tyro fille de Salmonée. Un autre paffa pour le pere de Théfée : un autre enfin le pere du fameux Polyphême le chef des Cyclopes; mais le plus célébre de tous, fut le Neptune, fils de Saturne & frere de Jupiter. On lui a donné pour femme Amphitrite, fille de l'Océan & de Doris. On dit que n'ayant pu faire confentir cette Nymphe à l'époufer, il fe fervit, pour la la perfuader,de l'éloquence d'un Dauphin, qui pour récompenfe d'un fi grand fervice, fut placé parmi les aftres. Les Poëtes fe repréfentent fur un char qui roule fur la mer, & environné de toutes les Divinités des

eaux.

Il attéle fon char, & montant fiérement

Fend les flots écumeux de l'humide élément..
Dès qu'on le voit marcher fur ces liquides plaines,,.
D'aife on entend fauter les pefantes Baleines.
L'eau frémit fous le Dieu qui lui donne la loi,
Et femble avec plaifir reconnoître fon Roi.

Son fceptre, comme on l'a vû, étoit un trident armé de trois pointes, dont il ébranloit la terre jufques dans fes fondemens; car on lui attribuoit les tremblemens de terre ; c'eft dans le combat des Dieux Homère

ainfi que décrit par

L'Enfer s'émeut au bruit de Neptune en furie.
Pluton fort de fon Thrône, il pâlit, il s'écrie:
Il a peur que ce Dieu dans cet affreux séjour,
D'un coup de fon trident ne fasse entter le jour
Et par le centre ouvert de la terre ébranlée,
Ne faffe voir du Styx la rive désolée;

Ne découvre aux vivans cet empire odieux,
Abhorré des mortels, & craint même des Dieux.

Cependant Neptune encourut la difgrace de Jupiter fon frere, pour avoir trempé dans la confpiration des Titans, & fut relégué fur la terre. Il fe réfugia auprès de Laomedon, Roi des Troyens, & convint avec lui d'une fomme, pour lui bâtir les murailles de Troye, & les garantir, par de fortes digues, des inondations. Ce Prince avare lui refusa son payement, & ce Dieu non content de détruire fes ouvrages, fit fortir du fond de la mer un monftre marin pour dévorer Héfione, fille de ce Roi. Elle fut fauvée, comme on le

dit

fie

tailleurs, par Hercule qui combattit & tua le monftre. Cette fable fignique Laomédon s'étoit fervi pour fortifier Troye,des tréfors qui avoient été dépofés, fuivant l'ancien ufage, dans un temple de Neptune, fans fe mettre en peine de les remplacer. C'eft ce qui a fait dire que Neptune irrité l'avoit puni de cette perfidie par la destruction des murailles de Troye.

Neptune avoit un grand nombre de temples dans la Grèce & dans l'Italie, furtout dans les lieux maritimes. On avoit inftitué en fon honneur des fêtes & des jeux, dont les plus célébres ont été ceux de Corinthe connus fous le nom de Jeux Ifthmiques, & ceux du Cirque à Rome. Les Romains lui avoient confacré le mois de Février, & comme on croyoit qu'il avoit fait naître le premier cheval, on couronnoit les chevaux de fleurs pendant les fêtes de ce Dieu, & il n'étoit pas permis de les faire travailler.

On lui offroit pour victimes, le cheval & le taureau.

On le voit fur les monumens de

I Partie.

* I

l'antiquité, fous la figure d'un homme âgé, traîné dans un char en forme de conque marine, par deux cheveaux marins, dont la partie inférieure se termine en queue de poiffon. Quelquefois on le repréfente debout, quelquefois affis fur les flots, accompagné de deux dauphins qui nagent fur la furface de l'eau.

ARTICLE III.

NÉRÉE, LES NÉRÉIDES

ΕΤ LES TRITONS.

NÉRÉE paffoit communément pour le fils de l'Océan & de Téthys. On lui donne auffi la Terre pour mere, & quelques-uns ont dit qu'il étoit fils de Neptune; il époufa Doris l'une de fes foeurs, & en eut cinquante filles qui du nom de leur pere, prirent celui de Néréides.

Nérée étoit un Dieu bienfaifant, & il fe diftingua par fes connoiffances, furtout par le don qu'il avoit de prédire l'avenir. Il inftruifit Hercule du pays & du lieu où étoit le jardin des Hefperides. Ce Héros avoit eu

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