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» l'étonnement où j'étois, je m'é> criai; O mon pere, donnez moi » pour repeupler mes villes, a tant de Citoyens que je vois ici de fourmis. Dans ce moment le chêne trembla, & fes branches s'agiterent, fans qu'il y eût un fouffle de vent. Saifi d'une fainte horreur, j'embrasse la terre & le chêne; je me flatte d'une forte d'efpérance, mais que » je n'ofe avouer; la nuit vient, & comme j'étois accablé par mes inquiétudes, je me laiffe aller à un doux fommeil. Au milieu de mon repos, je vois le même chêne, la même quantité de fourmis, & j'apperçois le même tremblement des branches, dont les fecouffes font tomber les fourmis, & les répandent fur la terre. Je les vois croître toutà-coup; leur groffeur augmente » d'inftant en inftant; elles fe lévent & fe tiennent debout; elles ne font plus fi maigres, le nombre de »leurs pieds diminue, & elles quit»tent infenfiblement leur couleur > noire. Enfin elles prennent tout-à> fait la figure humaine. Je m'éveille, & je regarde mon fonge comme

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une

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sune vifion ridicule. Je me plains » même du peu de fecours que j'ai à efpérer des Dieux; cependant il s'éléve dans mon Palais un grand murmure;j'entends des voix d'hommes qui me font toutes nouvelles, & je crois rêver encore, lorfque Télamon, l'un de mes fils, accourt à moi, & m'annonce la merveille qui vient d'éclater. Je vois en effet des hommes nouveaux, dans la même pofition & en auffi grand nombre que mon fonge me les avoit représentés. Ils m'abordent tous, & me faluent comme leur fouverain. Mon premier foin eft de rendre à Jupiter des actions de graces. Après quoi je diftribue mes "nouveaux fujets dans les différens quartiers de la ville, & dans tous "les cantons de l'Ifle ; je leur donne le nom de Myrmidons, pour conferver l'idée de leur origine, & ils ont encore aujourd'hui les inclinations qu'ils avoient auparavant. Ils font ménagers, laborieux, & fort foigneux de garder ce qu'ils ont amaffé. Voilà le fecours que je yous deftine, & cette belle jeuI. Partie.

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neffe vous fuivra, lorfque le vent qui vous a conduit ici, aura fait place au vent du midi. »

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Cette fable fignifie que l'Ifle d'Egine ayant été prefqu'entiérement dépeuplée par la pefte, la réputation d'Eacus y attira de nouveaux habitans de plufieurs contrées de la Gréce, & furtout d'un canton de la Thef falie qu'habitoient les peuples appellés Myrmidons; comme ce mot reffemble au nom que les Grecs donnoient aux fourmis, on avoit imaginé la métamorphofe de fourmis en hommes. Æacus mourut fort âgé, & pour honorer fa mémoire, on lui donna dans les Enfers l'infpection fur les ames qui venoient de l'Europe, comme Rhadamanthe l'avoit fur celles de l'Afrique & de l'Afie; mais Minos comme le plus ancien, avoit la prééminence fur eux deux, & jugeoit en dernier reffort..

ARTICLE V.

PLUTON, PROSERPINE AT PLUT U S..

PLUTON étoit le plus jeune des

trois enfans de Saturne & d'Ops ou Rhéa, qui eft la même que la Terre. Il avoit eu pour fon partage le Royaume des Enfers, ce qui veut dire, selon l'hiftoire, la partie la plus occi-> dentale des états de fon pere; car Jupiter avoit eu les régions de l'Orient, & Neptune les Illes. On avoit donné à Pluton l'empire fur les morts, parce qu'il avoit, dit-on, enfeigné le premier à leur rendre des honneurs funébres, ou, felon d'autres, parce qu'il avoit le premier fait ouvrir des mines, pour en tirer For & l'argent. C'est pour cela que les Latins lui donnoient le nom de Dis, qui fignifie riche, & qu'on l'a confondu avec Plutus le Dieu des: richeffes. Cependant le plus grand nombre des Auteurs les diftinguent, & felon les plus anciens, Plutus: étoit fils de Cérès & d'un Héros nommé Jafion. Il étoit boîteux quand il s'agiffoit d'aller dans une maison pour l'enrichir, mais il avoit des ailes quand il falloit la quitter. On a dit auffi qu'il étoit aveugle & fans jugement, parce qu'il a coutume de faire part de fes richeffes à

ceux qui en font le moins dignes, & de laiffer les gens de bien dans l'indigence.

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On a vû dans l'hiftoire de Cérès, que Pluton n'ayant pu efpérer qu'aucune femme voulût l'époufer, avoit enlevé Proferpine, & on a rapporté au long l'hiftoire de cet enlévement. On repréfentoit Pluton affis fur un thrône tenant dans fa main une fourche à deux pointes qui lui fervoit de fceptre. Toutes les victimes qu'on lui offroit devoient être noires; & entre les bêtes femelles, on choififfoit celles qui étoient ftériles. Il étoit d'ufage de creufer au pied de fon autel, une foffe où l'on répandoit le fang des victimes dont on croyoit que les ombres des morts. étoient fort avides. On y ajoûtoit des effufions de lait & de miel, de vin pur & de farine détrempée dans l'eau. On faifoit les mêmes facrifices. à Proferpine, & on lui confacroit les cris, les lamentations, & les autres marques de douleur qu'on faifoit paroître pendant les cérémonies des funérailles

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