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noiffance de laconduite que les morts avoient tenue pendant leur vie, & d'ordonner la récompenfe ou le châtiment de leurs bonnes ou de leurs mauvaises actions. Ces Juges s'apelloient Minos, Rhadamanthe & Ea

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& on les avoit élevés à ce degré d'honneur, parce qu'ils avoient été d'excellens Juges fur la terre.

MINOS.

MINOS le premier de ce nom, étoit fils de Jupiter & d'Europe, fille d'Agénor, Roi de Phoenicie. Il regna dans l'Ile de Créte, & fe ren-> dit célébre par la fageffe de fon gouvernement. Il donna toute fon attention à policer fon peuple par des loix qui dans la fuite ont fervi de modéle à tous les législateurs de la Gré→ ce. Pour leur donner plus de poids & d'autorité, il fe retiroit de tems en tems dans un antre de l'Ile de Créte, où il feignoit que Jupiter ve noit les lui dicter, & chaque fois qu'il reparoiffoit, il rapportoit quelque nouvelle loi, comme le fruit de fes conférences avec le fouverain des Dieux. L'efprit de juftice & de dou

ceur, qui le guidoit dans toute fa conduite, le fit également aimer & refpecter de fes fujets. Ils lui rendirent après fa mort les plus grands honneurs, & l'on publia que pour le récompenfer de fa juftice & de fa piété, il avoit été établi le fouverain juge des Enfers.

Les Poëtes le repréfentent un fceptre à la main, & affis fur un tribunal au milieu des ombres qui viennent lui rendre compte de leurs actions; on lui a donné auffi le dépôt de l'urne fatale qui contenoit le fort de tous les mortels, & d'où il tiroit au hazard, & fans égard pour l'âge ni pour le rang, les noms de ceux dont le deftin avoit ordonné la mort.

RHADAMANTHE.

RHADAMANTHE étoit frere de Minos. C'étoit un Prince vertueux & éclairé,& Minos tira de fes lumiéres de grands fecours, non feulement pour composer fes loix, mais encore pour les faire exécuter. Il les porta dans plufieurs Inles de l'Archipel, & enfuite dans la Lycie, province de l'Afie mineure, où les peuples charmés

de fa douceur, fe foumirent volontairement à fa domination. Son amour pour la juftice lui fit donner après fa mort, le titre de Juge des Enfers. On lui commit, pour foulager fon frere, l'examen des ombres qui venoient de l'Afie & de l'Afrique, & la fonction de faire punir les criminels condamnés au Tartare.

EACUS.

EACUS, fils de Jupiter, & de la Nymphe Egine, fille du fleuve Afope, regnoit dans une Ifle peu éloignée de la côte de l'Argolide, qui s'appelloit Enopie, & qu'il nomma Egine du nom de fa mere. Il s'étoit rendu recommandable par fon équité, & tous les Princes de fon voifinage le prenoient pour l'arbitre de leurs différends. Minos, fecond Roi de Créte, ayant déclaré la guerre aux Athéniens, pour venger la mort d'Androgée fon fils, demanda du fecours à divers peuples, & s'adressa furtout à acus, dans la confiance que l'appui d'un Prince fi fage, feroit d'un grand poids pour la réputation de fes armes ; mais il ne put

rien

obtenir, parce qu'acus étoit liẻ avec les Athéniens par un traité dont l'observation étoit pour lui une chose facrée. A peine Minos fut-il parti, que Céphale arriva de la part des Athéniens,pour demander les fecours qu'Eacus étoit obligé de leur fournir en vertu de leur ancienne alliance. Céphale avoit été autrefois dans l'Ifle d'Egine, & il fut furpris de n'y plus retrouver un grand nombre de perfonnes qu'il y avoit connues dans sa jeuneffe. Il en demande la raison à

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acus, & ce Prince lui répond en foupirant: « La haine de Junon contre Egine ma mere & fa rivale, a » défolé cette Ifle par une pefte qui » en a fait périr prefque tous les habi» tans. Tant que nous avons pu nous » flatter que les remédes ordinaires pouvoient la faire ceffer, nous les » avons employés, mais le mal a réfifté à tous les fecours humains. » D'abord le Ciel fe couvrit d'épaif»ses ténébres, & nous fumes accablés » par une chaleur étouffante que »nuées renfermoient dans leur fein. » Pendant quatre mois entiers, le » vent du midi nous apporta de

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les

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mortelles exhalaisons ; les eaux des fontaines & des lacs en furent corrompues, & des milliers de ferpens répandus fur la terre, infecterent les fleuves de leurs poifons; les chiens, »les brebis, les oiseaux, les boeufs furent d'abord attaqués. Le mal gagna les habitans de la campagne, & pénétra bientôt dans les villes; la défolation devint générale, & je vis périr tout mon peuple, fans pouvoir le fecourir. Dans cette extrémité, j'adressai ma priére à Jupi»ter: Si vous ne rougiffez pas, Dieu puiffant, de me reconnoître pour votre fils, rendez-moi mes fujets, ou faites que je périffe avec eux. Un éclair fuivi d'un coup de ton»nerre, m'annonça que j'étois exaucé. Il y avoit auprès de moi un chêne dont les branches s'étendoient au loin. Il étoit confacré à » Jupiter, & l'on dit qu'il avoit été produit par un gland de la forêt de Dodone. L'écorce en étoit couverte de fourmis qui alloient y » dépofer dans un creux, le butin dont elles étoient chargées. Le nombre en étoit prodigieux & dans

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