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she; qué cette pétition supposoit que l'assemblée n'avoit pas prononcé sur le sort de Louis, mais que l'assemblée ayant implicitement décrété son innocence ou son inviolabilité dans la séance de samedi soir, la société alloit s'occuper d'une nou velle rédaction, qu'elle présenteroit incessamment à la signature. Un particulier propose d'envoyer sur le champ une députation aux amis de la constitution, pour les prier de rédiger de suite soa #dresse § et de la renvoyer aussi-tôt, afin que l'assemblée du champ de Mars put la signer shas désemparer; suit une autre proposition de faire la rédaction à l'instant sur l'autel de la patrie, et celle-là est unanimement adoptée. On nomme quatre commissaires; l'un d'eux prend la plume, les citoyens impatiens se rangent autour de lui, et il écrit: Petition à l'assemblée nationale, rédigée sur l'autel de la patrie, le 17 juillet 1791.

« REPRÉSENTANS DE LA NATION, vous touchez au terme de vos travaux; bientôt des successeurs, tous nommés par le peuple, alloient marcher sur vos traces, sans rencontrer les obstacles que vous ont présentés les députés des deux ordres privilégiés, ennemis nécessaires de tous les principes de la sainte égalité.

« Un grand crime se commet; Louis XVI fuít; il abandonne indignement son poste; l'empire est à deux doigts de l'anarchie. Des citoyens l'arrêtent à Varennes, et il est ramené à Paris. Le peuple de cette capitale vous demande instamment de ne rien prononcer sur le sort du coupable sans avoir entendu l'expression du veu des 82 autres dépar

temens.

«Vous différez; une foulé d'adresses arrivent à l'assemblée toutes les sections de l'empire demandent simultanément que Louis soit jugé. Vous, messieurs, vous avez préjugé qu'il étoit innocent et inviolable, en déclarant, par votre décret du 16, que la chartre constitutionnelle lui sera pré

sentée

sentée alors que la constitution sera achevé. Législateurs! ce n'étoit pas là le vœu du peuple, et nous avons pensé que votre plus grande gloire, que votre devoir même, consistoit à être les oiganes de la volonté publique. Sans doute, me sieurs, que vous avez été entraînés à cette décision par la foule de ces députés réfractaires, qui ont fait d'avance ur protestation contre toute Ja constitution. Mais, messieurs.... mais, représentans d'un peuple généreux et confiant, rappelez-vous que ces 29 protestaas n'avoient point de voix à l'assemblée nationale; que le décret est donc nul dans la forme et dans le fond: nul dans le fond parce qu'il est contraire au vou du souverain; nul en la forme parce qu'il est porté par 29 individus sans qualités.

« Ces considérations, toutes ces vues du bien gé néral, ce désir impérieux d'éviter l'anarchie, à laquelle nous exposeroit le défaut d'harmonie entre les représentans et les représentés, tout nous a fait la loi de vous demander, au nom de la France entière, de revenir sur ce décret, de prerdre en considération que le délit de Louis XVI est prouvé, que ce roi a abdiqué; de recevoir son abdication, et de convoquer un nouveau corps constituant pour procéder d'une manière vraiment nationale, au jugement du coupable, et surtout au remplacement et à l'organisation d'un nou veau pouvoir exécutif (1) ».

La pétition rédigée, on en fait lecture à l'assemblée : les principes de modération, le ton fier et respectueux qui y règne d'ua bout à l'autre, l'ont fait couvrir de justes applaudissemens, et l'on signoit à sept ou huit endroits différens, sur les cratères qui forment les quatre angles de l'autel de la patrie. Plus de deux mille gardes natio

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(1) Nous attestens au beuticit decotte pièce. No. 106.

B

naux de tous les bataillons de Paris et des environs, quantité d'officiers municipaux des villages voisins, ainsi que beaucoup d'électeurs, tant de la ville de Paris que du département, l'ont signée.

Il étoit deux heures: arrivent trois officiers municipaux en écharpe, et accompagnés d'une nombreuse escorte de gardes rationales. Dès qu'ils se présentent à l'entrée du Champ de Mars, une députation va les recevoir. Parmi ceux qui la composoient, le public a remarqué un maréchal des camps, décoré de la croix de Saint-Louis, attachée avec un ruban national. Les trois officiers municipaux se rendent à l'autel; oa les y reçoit avec les expressions de la joie et du patriotisme. Messieurs, disent-i's, nous sommes charmés do connoître ves dispositions; on nous avoit dit qu'il y avoit ici du tumulte, on nous avoit trompés; nous ne manquerons pas de rendre compte de ce que nous avons vu, de la tranquillité qui règne au Champ-de-Mars; et loin de vous empêcher de faire votre pétition, si l'on vous troubloit, nous vous aiderions de la force publique. Si vous doutez de nos intentions, nous vous offrons de rester en otage parmi vous jusqu'à ce que toutes les signatures soient apposées. » Un citoyen leur donna lecture de la pétition; ils la trouvèrent conforme aux principes; ils dirent même qu'ils la signeroient s'ils ne se trouvoient pas en fonctions.

Deux citoyens avoient été arrêtés précédemment à cause d'une rixe avec l'un des aides-de-camp du général ceux qui avoient été témoins de l'arrestation, représentèrent aux officiers municipaux qu'elle étoit injuste et imméritée; ceux ci engagèrent l'assemblée à nommer une députation pour aller les réclamer à la municipalité, en leur promettant justice; et douze commissaires et les of ficiers municipaux partent entourés d'un grand nombre des pétitionnaires, qui les accompagnent jusqu'au détachement; là on se prend la main, et l'on se quitte de la manière la plus amicale.

Les officiers municipaux promettent de faire retirer les troupes, et ils l'exécutent ; peu d'instans après, le champ de-Mars fut encore libre et tranquille. Il est ici un trait que nous n'omettrons pas, il faut être juste: avant que la troupe se fût retirée, un jeune homme franchi soit le glacis en présence du bataillon; et quelques grenadiers l'arrétant avec rudesse, un d'eux l'atteint de sa baïonnette; M. L feuvre d'Arles, commandant le batail on, accourt à toute bride, et renvoie les soldats à leur poste. Le peuple applaudit et crie: Bravo, commandant!

On retourne à l'autel de la patrie, et l'on continue à signer. Les jeunes gens s'amusent à des danses; ils font des ronds en chantant l'air : ça ira. Survient un orage, (le ciel vouloit-il présager celui qui alloit fondre sur la tête des citoyens?) on n'en est pas moins ardent à signer. La pluie cesse, le ciel redevient calme et serein; en moins de deux heures il se trouve plus de 50 mille personnes dans la plaine; c'étoit des mères de famille, d'intéressantes citoyennes; c'étoit une de ces assemblées majestueuses et touchantes, telles qu'on en voyoit à Athènes et à Rome.

Les commissaires députés vers le municipalité

reviennent.

Nous tenons de deux d'entre eux les détails suivans: « nous parvenons, disent-ils, à la salle » d'audience à travers une forêt de baïonnettes ; les >> trois municipaux nous avertissent d'attendre, ils »> entrent, et nous ne les revoyons plus. Le corps

municipal sort; nous sommes compromis, dit » un des membres, il faut agir sévérement. Un » d'entre nous, chevalier de Saint-Louis, annonce » au maire que l'objet de notre mission étoit de » réclamer plusieurs citoyens honnêtes pour qui » les trois municipaux avoient promis de s'intéres» ser. Le maire répond qu'il n'entre pas dans ces » promesses, et qu'il va marcher au champ de la fédération pour y mettre la paix. Le chevalier de

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»Saint-Louis veut répondre que tout y est calme; it est interrompu par un municipal,qui lui demande » d'un ton de mépris quelle étoit la croix qu'il poi-, » toit, et de quel ordre étoit le ruban qui l'atta

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choit, (c'étoit un ruben tricolore). C'est une croix » de Saint Louis, répond le chevalier, que j'ai » décorée du ruban national; je suis prét à vous » la remettre si vous voulez la porter au pouvoir exécutif pour savoir si je l'ai bien gagnée. M. le » maite dit à son collégue qu'il connoissoit ce che» valier de Saint-Louis pour un honnéte citoyen, et qu'il le prioit, ainsi que les autres, de se » retirer. Sur ces entrefaites, le capitaine de la » troupe du centre du bataillon de Bonne Nov» velle vint dir que le Champ-de-Mars n'étoit » rempli que de brigands; un de nous lui dit qu'il »en impooit. Là dessus, la municipalité ne vou » lut plus nous entendre. Descendus de l'hôt 1 de ville, nous apperçûmes à une des fenêtres le » drapeaurouge; et ce signal du massacre, qui de» voit inspirer un sentiment de douleur à ceux qui » allcient marcher à sa ruite, produisit un effet » tout contraire sur l'ame des gardes nationaux. » qui couvroient la p'ace, (ils portoient à leurs cha» peaux, le pompon rouge et bleu). A l'aspect » du drapean, ils ont poussé des cris de joie en » élevant en l'air leurs armes qu'ils ont ensuite » chargées. Nous avons vu un officier municipal. » en écharpe aller de rang en rang, et parler à l'o-. » reille des officiers. Glacés d'hor: eurs, nous som» mes retourcés au champ de la fédération aver» tir nos frères de tout ce dont nous avions été » les témoins ».

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Saus croire qu'ils en imposoient, on pensa qu'ils étoient dans l'erreur sur la destination de la force. de loi, t l'en conclut qu'il n'étoit pas possible. que l'on vint disperser des citoyens qui exerçoient paisiblement les droits qui leur soat réservés par la constitution.

On entend tout à coup le bruit du tambour, on

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