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d'une armée ennemie, sera censé avoir abdiqué la royauté; 2o. que tout roi qui, après avoir prêté serment à la constitution, se rétractera, sera censé avoir abdiqué; 3°. que tout roi qui aura abdiqué sera regardé comme simple citoyen; qu'il sera accusable par les voies ordinaires, pour les faits particuliers; 4°. que tout roi qui conspirera contre la constitution, en entretenant des correspondances directes et coupables avec les ennemis de la nation, sera censé avoir abdiqué; 5°. qu'il y a lieu à accusation contre Bouillé, Klinglin et autres complices de l'évasion; 6°. que le roi restera dans l'état d'inaction prononcé par le décret du 25 juin.

Mais aucun de ces articles, dont plusieurs sont bons en eux mêmes, ne porte sur les questions précises présentées par les comités les points à décider étoient de savoir, si le roi pouvoit étre mis en cause pour le fait de son évasion; si son évasion avec sa famille étoit un délit, et ces points ne sont nulement résolus. La question n'est pas de savoir si un roi, qui désormais se mcttra à la tête d'une armée ennemie, qui conspirera contre la constitution, qui rétractera son serment, sera accusable par les voies ordinaires ; elle est de savoir, si Louis XVI, qui a conspiré, qui a rétracté son serment, est, lui personnellement, accusable, s'il peut étre mis en cause pour le fait de son evasion: voilà le point sur lequel il falloit prononcer, et voilà le point que l'assemblée nationale a cauteleusement éludé. Peu importe à la dignité de la nation que les Bouillé soient jugés, ou non; Bouillé n'est qu'uu subalterne, un impuissant complice; c'est à Louis XVI qu'on en reviendra toujours, toujours on se de

andera: Mais le roi, qu'en a t-on fait? qu'a ton décidé à son égard? On a dit qu'il restera dans l'etat d'inaction, prononcé par le décret du 25 juin. Mais qu'est-ce que cet état d'inaction,

pourquoi cet état d'inaction? Ou il est coupable, ou il ne l'est pas; ou il doit être jugé, ou il ne doit pas l'être il falloit prononcer cathegorique

ment.

:

Des milliers de citoyens, tous ceux de la capitale ont demandé qu'il ne fut rien statué sur le sort du traitre, avant que les 83 départemens n'eussent emis leur vou. L'ass mblée nationale auroit elle respecté ce mandat? Auroit elle une fois obéi à la voix de son maitre? Non; si l'as semblée nationale a déclaré que Louis XVI resteroit dans l'état d'inaction prononcé par le décret du 25 juin, ce n'est que pour lui présenter là chartre alors que la constitution sera achevée; et la perfide, qui n'a osé décréter expliciteinent que Louis ne pouvoit être mis en cause; que son évasion n'étoit point un délit ! la perfide Ta implicitement déclaré, en ordonnant ce puéril, cet absurde statu quo! Quelle infàme escobarderie! C'est un tour de gibecière, digne des valets de Comus.

aura un,

Méprisables dominateurs ! ramassis de brigands salariés par la plus infaine de toutes les cours, Vous croyez abuser le peuple, vous croyez le tromper, vous espérez l'apiteyer sur le sort de votre coupable chef, vous espérez que la trop juste indignation publique aura un terme; oui, elle en mais ce sera celui de vos crimes. Non contens d'avoir porté cent décisions incompatibles avec la liberté du peuple, non contens de l'avoir rendu constitutionnellement esclave, vous voulez encore en faire l'objet de la dérision et du mépris de l'Europe, en lui donnant un maître, et qui? Le plus abject, le plus avili des tyrans. Mais ne vous flattez pas de réussir; et rappelezvous bien que Launay n'avoit commis d'autre crime que de favoriser votre Louis XVI, en dépit de l'opinion publique.

Les quatre premiers articles du décret du vendredi 15 juillet, portent qu'un roi parjure et oons

B

pirateur sera censé avoir abdiqué, et que, pour des faits particuliers, il sera accusable par les voies ordinaires: ces dispositions n'en portent pas encore avec elles, une distinction précise de ce qu'on appelle inviolabilité; elles seroient cependant suffisantes pour faire tomber la tête da Louis XVI,si elles eussent été rendues avant l'époque du 21 de juin; mais l'on opposera aujourd'hui qu'elles n'ont et ne peuvent avoir un effet rétroactif.

Les loix ne peuvent avoir un effet rétroactif.... Non, lorsque ce sont des loix purement régiementaires, et qui n'emportent pas avec elles la déclaration d'un principe éternel et immuable. Mais les quatre articles dont il s'agit ne sont pas des loix réglementaires, ce ne sont pas des loix; ca sont de simples déclarations, des émanations né, cessaires de la raison et de la justice; on sent assez qu'un roi n'est plus roi dès qu'il est conspira teur et parjure; or, ce qui est vrai aujourd'hui, l'étoit également le 21 juin; ce n'est pas l'assem, blée nationale qui a établi cette vérité: la faculté de destituer un traître, est un droit qu'elle n'a pu donner à la nation, qu'elle ne peut lui ôter: conséquemment Louis XVI est aussi punissable aujourd'hui que si cela eût été écrit depuis des. siècles.

Qu'elle s'est trompée, cette assemblée nationale! qu'elle a fait un faut calcul, si, lorsqu'ella a posé le principe qui doit décider la cause des rois, elle a cru que le peuple n'en ordonneroit pas l'application à la personne de Louis! Aussi n'étoitce pas l'avis des 7 comités que l'on décrétât ces, quatre articles; ils savoient combien la déclaration des droits leur avoit déjà coûté de peines et d'obs tacles dans leurs projets de contre révolution; ils savoient que la déclaration des droits a toujours, servide thermomètre aux bons ou mauvais décrets: il en sera de même à l'égard des quatre artioles; et le peuple, mêine la partie la moins éclairée,

réclamera sans cesse et impérieusement l'applica tion de ces principes.

Citoyens de toutes les villes, de tous les points de la république, éveillez-vous; il en est temps encore: vous avez montré tant d'énergie à la nouvelle de l'évasion, c'est aujourd'hui qu'il faut en déployer plus que jamais. Le patriotisme ne consiste plus à faire le serment de maintenir les im mortels décrets de nos augustes législateurs; oe na sont pas des décrets qu'il nous faut, c'est la liberté. Formez-vous en assemblées primaires, or donnez à vos corps électoraux de se réunir; faites procéder à la nomination de nouveaux représen-, tans; envoyez-les sans délai prendre leur place; ordonnez,commandez à ceux-ci de se retirer; faitesleur très-expresse défense de rien décider sur le fait de l'évasion du 21 juin; donnez à vos députés des pouvoirs spéciaux de juger, et vous aurez justice. On n'a que de trop justes sujets de craindre que le sénat actuel ne veuille éterniser sa domination; s'il résiste, il est des cas où l'in surrection est le plus saint des devoirs.

Assemblée au Champ-de-Mars.

Vendredi 15 juillet, environ douze mille citoyens se sont rassemblés au Champ de Mars. Là, sur l'autel de la patrie, ils ont signé individuellement une pétition à l'assemblée nationale, ayant pour but de lui réitérer les demandes qui lui avoient été déjà faites de ne rien préjuger sur le sort de Louis XVI, sans avoir consulté le vœu général. Enfin, on a fait le procès à la royauté dans ce même Champ-de-Mars, où l'on consacra, dans des temps d'ignorance, les chefs de cette lignée de brigands, qui, depuis tant de siècles, oat écrasé la France. Un officier de la garde nationale a voulu mêler son fausset à la voix des citoyens; il a voulu parler en faveur du dernier de la race saxonne des Capets: Tais-toi, malheu

reux, lui a-t-on dit, tu blasphemes; c'est ici le lieu saint, le temple de la liberté; ne le souille pas, en y prononçant le mot de roi. Cette assemblée, véritablement nationale, est venue apporter sa pétition aux législateurs; elle a rencontré dans son chemin plusieurs patrouilles, qui toutes lui ont témoigné le plus grand respect. Une entre autres a présenté les armes à cette majestueuse section du souverain. Nous en félicitons les citoyens soldats qui composoient cette patrouille; leur action prouve qu'ils connoissent leurs devoirs, et qu'ils savent se respecter eux-mêmes dans leurs concitoyens.

Toute la soirée les rues et les places publiques ont été remplies de groupes très-nombreux. On y a pris le résolution d'abattre les bronzes. Qu'elles s'écroulent ces statues de tyrans, et que sur leurs débris s'élève l'image auguste de la divinité des Français, la liberté écrasant sous ses pieds les soixante-deux diadêmes des monstres qui ont désolé la France!

Commémoration du 14 juillet dans l'église métropolitaine.

Jamais nous n'avons eu tant besoin qu'en ce moment de nous rappeler le 14 de juillet, et peutêtre d'en donner une nouvelle représentation. At-on jamais eu rapprochement plus bizarre ? Le jour même consacré à rappeler l'époque de notre liberté, six comités réunis de l'assemblée nationale s'évertuent à nous rattacher au pied du trône.

Mais contenons notre indignation, et disons que les électeurs de 1789 n'ont eu garde de manquer à l'engagement qu'ils ont pris de célébrer, jusqu'au dernier vivant d'entre eux, une époque qui leur fait tant d'honneur. L'évêque de Paris a observé, à l'égard de la députation de l'assemblée natio nale, le même cérémonial d'usage autrefois pour les rois et les reines. Il est venu les recevoir à la

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