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de grandes actions de guerre et d'orner leur mémoire; ils s'appliquoient à démêler les causes des succès heureux ou des événemens malheureux d'une entreprise particulière ou d'une campagne entière; ils étudioient l'art d'un général pour préparer la victoire, ou ses ressources pour réparer une défaite. Armes et discipline de chaque peuple, manière différente de faire la guerre, mouvemens des armées selon la différence de leurs positions ou des terrains, rien n'échappoit à leurs médi tations. Şans être sortis de Rome, Scipion et Lucullus avoient en quelque sorte fait la guerre contre plusieurs nations différentes, et sous les plus habiles capitaines de la Grèce. Pleins ainsi du génie de ces grands hommes, ils en furent les rivaux dès qu'ils commandèrent les légions romaines.

Quel que soit l'emploi auquel on est appelé, soit qu'il n'ait rapport qu'à une branche de l'administration publique, soit qu'il en embrasse toutes les parties, il n'est pas douteux qu'on ne puise dans l'histoire les mêmes secours que Scipion et Lucullus y trouvèrent pour perfectionner leurs talens naturels et devenir de grands capitaines. Je pourrois, Monseigneur, vous en citer mille exemples, et j'espère que vous-même en serez un qu'on citera un jour aux princes qu'on voudra former aux grandes choses.

Quelques peuples ont joui pendant plusieurs siècles d'un bonheur constant; d'autres n'ont eu qu'une prospérité courte et passagère, ou n'ont existé que pour être malheureux. Quelques états n'ont jamais pu, malgré leurs efforts, sortir de leur première médiocrité; quelques-uns sont parvenus sans peine à la plus grande puissance. Combien de nations autrefois célèbres, et dont la durée sembloit en quelque sorte devoir être égale à celle du monde, ne sont plus connus que dans l'histoire? Perses, Egyptiens, Grecs, Macédoniens, Carthaginois, Romains, tous ces peuples sont détruits. Leurs prospérités, leurs disgrâces, leurs révolutions, leur ruine ne devoient-ils être considérées que comme les jeux d'une fatalité aveugle? Ne rapporterons-nous de leur histoire, Monseigneur, que la triste et fausse conviction que tout est fragile, que tout cède au coup du temps, que tout meurt, que les états ont un terme fatal, et quand il approche, qu'il n'y a plus ni sagesse, ni prudence, ni courage qui puissent les sauver?

Non. Chaque nation a eu le sort, qu'elle devoit avoir: et quoique chaque état meure, chaque état peut et doit aspirer

à l'immortalité. Ainsi que Phocion l'enseigne à Aristias *) accoûtumez-vous à voir dans la prospérité des peuples la récompense que l'auteur de la nature a attachée à la pratique de la vertu; voyez dans leurs adversités le châtiment dont il punit leurs vices. Aucun état florissant n'est déchu qu'après avoir abandonné les institutions qui l'avoient fait fleurir: aucun état n'est devenu heureux qu'en réparant ses fautes et corrigeant ses abus. La fortune n'est rien, la sagesse est tout; et ces grands événemens rapportés dans l'histoire ancienne et moderne, et qui nous effraient, seront autant de leçons salutaires si nous savons en profiter. Appliquez-vous dans vos études, Monseigneur, à démêler avec soin les causes du peu de prospérité et des malheurs infinis que les hommes ont, éprouvés, et vous conoîtrez sûrement la route que vous devez prendre pour devenir, le père de vos sujets et le bienfaiteur des générations suivantes. La connoissance du passé lévera le voile qui vous cache l'avenir. Vous verrez par quelles institutions les peuples inquiets qui déchirent aujourd'hui l'Europe, peuvent encore se rendre heureux. Vous connoîtrez le sort que chaque nation doit attendre de ses mœurs, de ses lois et de son gouvernement.

Il n'y a point d'histoire ainsi méditée, qui ne vous instruise de quelque vérité fondamentale, et ne vous préserve des préjugés de notre politique moderne, qui cherche le bonheur où il n'est pas. Les rois de Babylone, d'Assyrie, d'Égypte et de Perse, ces monarques si puissans, sembleront vous crier de dessous leurs ruines, que la vaste étendue des provinces, le nombre des esclaves, les richesses, le faste et l'orgueil du pouvoir arbitraire hâtent la décadence des empires. La Phénicie, Tyr et Carthage vous annonceront tristement que le commerce, l'avarice, les arts et l'industrie ne donnent qu'une prospérité passagère, et que les richesses accumulées avec peine, trouvent toujours des ravisseurs, parce qu'elles excitent la cupidité des étrangers. Rome vous dira: Monseigneur, apprenez par mon exemple tont ce que la vertu produit de force et de grandeur; elle m'a donné l'empire du monde. Mais, ajoutera-t-elle, en me voyant déchirée par mes propres citoyens, et la proie de quelques nations barbares, qui n'avoient que du courage, apprenez à redouter l'injustice, la mollesse, l'avarice et l'ambition.

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*) Name des jungen Mannes, mit welchem sich Phocion in dem in der Einleitung No. 6 erwähnten Werke über Politik unterhält.

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La Grèce vous offre ses fastes; lisez. C'est-là que vous pouvez faire une ample moisson de vérités politiques. Vous y apprendrez à la fois et ce que vous devez faire et ce que vous devez éviter. Les institutions de Lycurgue ne peuvent être trop étudiées; jamais on ne peut trop en méditer l'esprit, quoiqu'il soit aujourd'hui impossible de nous élever au même degré de sagesse. Ce ne sera point sans fruit, que vous découvrirez les vices des lois de Solon. La prospérité de Lacédémone vous prouvera que le plus petit état peut être très puissant, quand les lois ne tendent qu'à donner de la force et de l'énergie à nos ames. Athènes, illustrée par des efforts momentanés de courage et de magnanimité, et par son amour de la liberté et de la patrie, mais malheureuse, parce qu'elle n'avoit aucune retenue dans sa conduite, vous donnera les leçons les plus utiles, en vous montrant que des vertus et des talens mal dirigés n'ont servi qu'à la perdre. Dans les divisions des Grecs, dans les malheurs que leur causa leur ambition, vous apprendrez à connoître les erreurs de l'Europe moderne, qui se lasse, qui s'épuise, qui se déshonore par des guerres continuelles, dans lesquelles le vainqueur trouve toujours la fin de sa prospérité et le commencement de sa décadence.

Remarquez-le avec soin; les mêmes lois, les mêmes passions, les mêmes mœurs, les mêmes vertus, les mêmes vices ont constamment produit les mêmes effets; le sort des états tient donc à des principes fixes, immuables et certains. Découvrez ces principes, Monseigneur, et je prends la liberté de vous le répéter, la politique n'aura plus de secrets pour vous. Plein de l'expérience de tous les siècles, vous saurez par quelle route les hommes doivent aller au bonheur. Sans être la dupe de ce fatras de misères, de ruses, de subtilités et d'ineptie qu'on voudroit nous faire respecter, vous apprendrez à ne pas confondre les vrais biens avec ceux qui n'en ont que l'apparence Vous distinguerez les remèdes véritables des palliatifs trompeurs. Vous ressemblerez à ce pilote qui navigue sans crainte et sans dangers, parce qu'il connoît tous les écueils et tous les ports de la mer qu'il parcourt; il lit sa route dans un ciel serein, et est instruit des signes qui annoncent le calme et la tempête.

CRÉ

CRÉBILLON.

CLAUDE PROSPER-JOLYOT DE CRÉBILLON, Sohn. des berühmten Tragikers dieses Namens, wurde zu Paris im Jahre 1707 geboren. Er eröffnete seine schriftstellerische Laufbahn mit einigen Arbeiten für das Theater; nachmals legte er sich, mit ungleich glücklicherem Erfolge, auf andere belletristi sche Gegenstände. Seine vornehmsten Werke sind: 1) die Lettres de Madame la Marquise de Pompadour *) depuis 1753 jusqu'à ̧ 1762. Londres 1772, 3 Bände in 8. Diese untergeschobenen Briefe sind lange Zeit für ächt gehalten worden, ein Irrthum, der sehr verzeihlich ist, da sie der Geschichte treu und, `wenigstens der allgemeinen Vorstellung nach, die man sich von der Denkart und Handlungsweise der berüchtigten Marquise machte, ganz in die Seele derselben geschrieben sind. Wir theilen hier eine Probe von ihnen mit, die man gewiss nicht ohne Vergnügen lesen wird. 2) Lettres de la Marquise au Comte de*** 1732, 2 Bände in 12. 3) Tanzaï et Néadarné, 1734, 2 Bände in 12.; ein satyrischer Roman, der den Verfasser auf einige Zeit in die Bastille brachte. 4) Les égaremens du cœur et de l'esprit, 1736, 3 Bände in 12, ein schlüpfriger Roman. 5) Le Sopha, conte moral, 1745 und 1749, 2 Bände in 12, und 6) Ah quel conte, 1764, 8 Bände in 12, beides gleichfalls Romane, in denen die Sittlichkeit nicht selten beleidigt wird. 7) Lettres Athéniennes, 1771, 4 Bände 8) Les heureux orphelins 1754, 2 Bände in 12.

in 12.

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* Jeanne-Antoinette Poisson, Tochter eines reichen Pariser Fleischers, zog frühzeitig durch ihre Schönheit und ihre Geistesgaben die Aufmerksamkeit von Paris auf sich. Sie war mit dem Generalpächter d'Etioles verheirathet, als sie 1745 unter dem Titel einer Marquise von Pompadour der Herzogin von Chateauroux in der Gunst Ludwigs XV folgte, in der sie sich bis an ihren Tod su erhalten wusste. Es ist zu rühmen, dass sie ihren grofsen Einfluss zum Theil dazu benutzte, Künste und Wissenschaften, wovon sie Kennerin und Freun din war, zu begünstigen. Sie starb 1764 im 44sten Jahre ihres Alters, mit mehr Fassung, als man von einer Dame, die dem Anschein nach so glücklich gewesen war, hätte erwarten sollen. Nach ihrem Tode erschienen unter ihrem Namen zwei Bände Mémoires (1765; 8.), worin sie den zum Theil unrichtigen Vorstellungen des grofsen Haufens gemäfs als unumschränkte Regentin Frankreichs geschildert wird.

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9) La nuit et le moment, 1755, in 12. 10) Lettres de la Duchesse de **1768, 2 Bände in 12, und 11) le hazard dù coin du feu, 1763, in 12. Crébillon's sämmtliche Werke sind im Jahr 1779 in 11 Bänden in 12. erschienen. Sie zeichnen sich sämmtlich durch eine glückliche Leichtigkeit der Schreibart aus; nur Schade, dafs, wie schon gesagt worden ist, in denselben die Sittlichkeit so oft beleidigt, und der Leser dadurch eben so sehr zurückgeschreckt, als durch die muntere Laune des Verfassers angezogen wird. Die satirischen Züge, die in vielen seiner Schriften, insonderheit in dem Roman Tanzaï et Néadarné vorkommen, sind oft treffend, aber auch oft unverständlich. Crébillon bekleidete übrigens kein öffentliches Amt; er war nur eine Zeitlang Königlicher Censor, und starb zu Paris im Jahre 1777. Wir können nicht umhin, am Schlusse dieser biographischen Skizze folgendes Urtheil d'Alembert's über ihn unsern Lesern mitzutheilen. Crébillon le père peint du coloris le plus noir les crimes et la méchanceté des hommes. Le fils a tracé du pinceau le plus délicat et le plus vrai les rafinemens, les nuances et jusqu'aux graces de nos vices; cette légèreté séduisante, qui rend les François ce qu'on appelle aimables, et ce qui ne signifie pas dignes d'être aimés; cette activité inquiette, qui leur fait éprouver l'ennui jusqu'au sein du plaisir même; cette perversité de principes, déguisée, et comme adoucie par le masque des bienséances; enfin nos mœurs, tout à la fois corrompues et frivoles, où l'excès de la dépravation se joint à l'excès du ridicule.

I) AU MARECHAL DE SOUBISE

Novembre, 1757.

V. ous n'avez pas besoin de vous justifier avec moi, mais auprès du Roi et de la France, qui sont surpris et irrités de cette malheureuse affaire de Rosbach, Un général battu est toujours un mauvais général dans l'esprit du public; les Parisiens surtout sont furieux; ils ont commis mille insolences à la porte de votre maison. Voilà quelles sont les douceurs de ma situation, et ce que je gagne à servir mes amis. Cependant le Roi vous estime toujours, et je crois que vous conserverez votre faveur; mais vous perdrez votre commandement. On dit que le Roi de Prusse vous a tendu un piège, et que vous y avez donné mal adroitement. Il ne m'appartient pas de juger sur ces ma

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