Page Ligne 252.-14. "Aux Tuileries," c'est-à-dire au jardin des Tuileries. Les Tuileries étaient le palais des souverains de France jusqu'en 1870. Il a été alors en partie brûlé. 17. "Aux spectacles" au théâtre. Spectacle (au sing.) est employé de nos jours le plus souvent au lieu de théâtre, pour signifier la pièce représentée. 18. "Lorgnettes dressées" opera glasses levelled. On dit aussi des jumelles pour: lorgnettes. 31. "A l'européenne" European fashion. Tournure souvent em ployée: à la française, à l'américaine, etc. 253. 7. "Mis en occasion." La phrase plus moderne est: donné l'occasion. 9. "Persan" avec P majuscule, a Persian. Notez cette nuance: persan avec p, est adjectif: il a l'air persan. De même, a French book un livre français, et a Frenchman, un Français. 16. "Ils ignorent encore plus" they still less know. 25. "Méconnaît" fails to recognize. 28. "Quelque Américaine" a NATIVE American, or Indian Squaw. C'était le sens à cette époque. Maintenant en France on donne au mot Américain le même sens qu'aux États-Unis. 254.-7. "Mouches" (blak) patches. 12. "Les Francs" (Franks) confédération de peuples Germains qui s'établirent dans la Gaule vers le Ve siècle, et donnèrent leur nom à ce pays. Les Francs ripuaires (ripa, rive) venaient des bords du Rhin et de la Meuse; les Francs saliens appartenaient à l'intérieur des terres. 14. "Clovis" (481-511) réputé le premier roi de France, et le fondateur de la première race ou dynastie appelée Mérovingienne, (du nom de Mérovée, grand-père de Clovis). 22. "Charles-Martel" sous le nom de maire du palais, gouvernait l'empire des Francs. Ce fut lui qui sauva la chrétienté en défaisant les Sarrasins envahisseurs à la bataille de Poitiers (732).-Pépin-le-Bref, son fils fut le premier roi (en 752) de la seconde race ou dynastie, dite carlovingienne. 23. "Charlemagne" (742-814) fils de Pépin-le-Bref, roi de France et empereur d'Occident. 255.- 4. "Les Bourguignons" occupèrent l'Est de la France actuelle, les Visigoths (Goths de l'Ouest) s'établirent dans le sud de la Gaule et en Espagne. 17. Les peines pécuniaires sont expliquées à la page suivante. Tout crime contre la société était puni par une amende proportionnée, rien de plus. 256.-5. "Sou" d'or. 5. "Composition" ici compensation. QUESTIONS. 1. Quelles distinctions Montesquieu obtint-il?- 2. Quels goûts avait-il?-3. Quel fut son premier ouvrage et quelle en est l'idée? -4. Comment se prépara-t-il pour ses autres écrits?-5. Quelle est la portée et le mérite de chacun?—6. Quelle est la première impression de Paris sur le prétendu Persan?-7. Que dit-il de ce qu'il voit dans la rue et que lui arrive-t-il?-8. Que pense-t-il du roi de France et de son pouvoir? de sa manière de se procurer de l'argent?—9. Comment décrit-t-il la curiosité des Parisiens?-10. Que lui arrivet-il en conséquence? et ensuite, quand il a changé d'habit? -11. Que dit-il des modes d'alors?-12. Que savez-vous des Francs et de leurs lois?-13. Quels rois de ce peuple sont nommés et qu'ont-ils faits? -14. Qu'est-il dit des mœurs des nations germaines?—15. Donnez des exemples des peines pécuniaires appliquées en ces temps. LESAGE. Lesage, né en Bretagne, vers la fin du dix-septième siècle, avait déjà écrit beaucoup de pièces de théâtres et de romans quand il composa deux bonnes comédies: Turcaret, et Crispin, et enfin le modèle des romans, Gil Blas. L'histoire du héros commence avec son éducation et le conduit jusqu'à la maturité de l'âge, à travers une foule d'incidents tantôt comiques tantôt pathétiques. "Il n'existe aucun livre au monde, dit Walter Scott, qui contienne tant de vues profondes sur le caractère de l'homme; chaque page, chaque ligne donne une peinture si exacte des faiblesses humaines que nous nous imaginerions volontiers entendre une intelligence supérieure lisant dans nos cœurs, pénétrant nos secrets motifs et trouvant un malin plaisir à déchirer le voile que nous nous efforçons d'étendre sur nos actions." Ce qui caractérise la manière de Lesage est une espèce de bonhomie ironique qui fait du livre la lecture la plus attachante. 'On trouverait du reste difficilement une censure plus vive du vice, une narration plus rapide, un style plus franc, plus vrai, plus naturel, et aussi plus de bons sens et d'esprit tout ensemble." LES AVENTURES DE GIL BLAS. De la naissance de Gil Blas, et de son éducation. Blas de Santillane, mon père, après avoir longtemps porté les armes pour le service de la monarchie espagnole, se retira dans la ville où il avait pris naissance. Il y 5 épousa une petite bourgeoise qui n'était plus dans sa première jeunesse, et je vins au monde onze mois après leur mariage. Ils allèrent ensuite demeurer à Oviedo, où ma mère se fit femme de chambre et mon père écuyer. Comme ils n'avaient pour tout bien que leurs gages, 10 j'aurais couru risque d'être assez mal élevé, si je n'eusse pas eu dans la ville un oncle chanoine. Il se nommait Gil Pérez. Il était frère aîné de ma mère, et mon parrain. Représentez-vous un petit homme haut de trois pieds et demi, avec une tête enfoncée entre les épaules: voilà mon 15 oncle. Au reste, c'était un ecclésiastique qui ne songeait qu'à faire bonne chère; et sa prébende, qui n'était pas mauvaise, lui en fournissait les moyens. Il me prit chez lui dès mon enfance, et se chargea de mon éducation. Il m'acheta un alphabet, et entreprit de 201 m'apprendre lui-même à lire; ce qui ne lui fut pas moins utile qu'à moi ; car, en me faisant connaître mes lettres, il se remit à la lecture, qu'il avait toujours fort négligée; et, à force de s'y appliquer, il parvint à lire couramment son bréviaire, ce qu'il n'avait jamais fait auparavant. Il 25 aurait encore bien voulu m'enseigner la langue latine, mais, hélas! le pauvre Gil Pérez ! il n'en avait de sa vie su les premiers principes. Il fut donc obligé de me mettre sous la férule d'un maître ; il m'envoya chez le docteur Godinez, qui passait pour 30 je plus habile précepteur d'Oviédo. Je profitai si bien des instructions qu'on me donna, qu'au bout de cinq à six années j'entendais un peu les auteurs grecs, et assez bien les poètes latins. Je m'appliquai aussi à la logique, qui m'apprit à raisonner beaucoup. J'aimais tant la dispute, que j'arrêtais les passants, connus ou inconnus, pour leur proposer des arguments. 5 Je m'acquis par-là dans la ville la réputation de savant. Mon oncle en fut ravi, parce qu'il fit réflexion que je cesserais bientôt de lui être à charge. "Ho çà, Gil Blas," me dit-il un jour, "le temps de ton enfance est passé. Tu as déjà dix-sept ans, et te voilà devenu habile garçon. Il faut 10 songer à te pousser. Je suis d'avis de t'envoyer à l'université de Salamanque; avec l'esprit que je te vois, tu ne manqueras pas de trouver un bon poste. Je te donnerai quelques ducats pour faire ton voyage, avec ma mule qui vaut bien dix à douze pistoles; tu la vendras à Salamanque, 15 et tu en emploieras l'argent à t'entretenir jusqu'à ce que tu sois placé." Il ne pouvait rien me proposer qui me fût plus agréable. Cependant j'eus assez de force sur moi pour cacher ma joie; et lorsqu'il fallut partir, ne paraissant sensible qu'à 20 la douleur de quitter un oncle à qui j'avais tant d'obliga tion, j'attendris le bonhomme, qui me donna plus d'argent qu'il ne m'en aurait donné s'il eût pu lire au fond de mon âme. Avant mon départ, j'allai embrasser mon père et ma mère, qui ne m'épargnèrent pas les remontrances. Ils 25 m'exhortèrent à prier Dieu pour mon oncle, à vivre en honnête homme, à ne me point engager dans de mauvaises affaires, et sur toute chose à ne pas prendre le bien d'autrui. Après qu'ils m'eurent longtemps harangué, ils me firent présent de leur bénédiction. Aussitôt je montai 30 sur ma mule, et sortis de la ville. Arrivée de Gil Blas à Pennaflor, et avec quel homme il soupa. J'arrivai heureusement à Pennaflor. Je m'arrêtai à la porte d'une hôtellerie d'assez bonne apparence. Je n'eus 5 pas plutôt mis pied à terre, que l'hôte vint me recevoir fort civilement. Il détacha lui-même ma valise, la chargea sur ses épaules, et me conduisit à une chambre, pendant qu'un de ses valets menait ma mule à l'écurie. Dès que je fus dans l'hôtellerie, je demandai à souper. On m'accommoda des œufs. Pendant qu'on me les apprêtait, je liai conversation avec l'hôtesse, que je n'avais point encore vue. Lorsque l'omelette fut en état de m'être servie, je m'assis tout seul à une table. Je n'avais pas encore mangé le premier morceau, que l'hôte entra, suivi d'un homme qui 10 portait une longue rapière, et qui pouvait avoir trente ans. Ce cavalier s'approcha de moi d'un air empressé: "Seigneur écolier," me dit-il, "je viens d'apprendre que vous êtes le seigneur Gil Blas de Santillane, l'ornement d'Oviedo, et le flambeau de la philosophie. Est-il bien possible que 15 vous soyez ce savantissime, ce bel esprit, dont la réputation est si grande dans ce pays-ci? Vous ne savez pas," continua-t-il, en s'adressant à l'hôte et à l'hôtesse, "vous ne savez pas ce que vous possédez. Vous avez un trésor dans votre maison. Vous voyez dans ce jeune gentilhomme la 20 huitième merveille du monde." Puis se tournant de mon côté, et me jetant les bras au cou: "Excusez mes transports," ajouta-t-il, "je ne suis point maître-de la joie. que votre présence me cause." Je ne pus lui répondre sur-le-champ, parce qu'il me 25 tenait si serré que je n'avais pas la respiration libre, et ce ne fut qu'après que j'eus la tête dégagée de l'embrassade, que je lui dis: "Seigneur cavalier, je ne croyais pas mon nom connu à Pennaflor." "Comment connu!" reprit-il sur le même ton: "nous tenons registre de tous les grands 30 personnages qui sont à vingt lieues à la ronde. Vous passez pour un prodige, et je ne doute pas que l'Espagne ne se trouve un jour aussi vaine de vous avoir produit, que la Grèce d'avoir vu naître ses sages." Mon admirateur |