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En publiant ces beaux fruits de la grâce dont le Saint-Esprit enrichit le ministère de M. Fournet, que nous nous estimons heureux de nous faire l'écho d'une voix bien plus pure que les nôtres, et qui, sur les limites de l'autre hémisphère, les propose à l'édification d'une foule de nouvelles familles chrétiennes! Nul autre assurément n'est plus digne d'en parler, qu'un homme qui joint au bonheur d'en avoir été témoin le mérite d'en avoir si bien profité. • Quand je vois, écrit d'Oahou, M. l'abbé Désiré Maigret, préfet apostolique des missions de l'Océanie, quand je vois l'innocence, la ferveur et la sinplicité de nos néophytes, je me dis souvent ils ressemblent aux bons habitants de la paroisse de Maillé; quand je les vois assister dévotement à la sainte messe, écouter avec attention la parole de Dieu, fréquenter les sacrements, fuir jusqu'à l'ombre du péché, inspirer à leurs enfants la crainte du Seigneur et l'horreur du mal, réciter en commun la prière dans les familles, chanter des cantiques à l'église et dans les champs, s'aimer les uns les autres comme des frères; ce que je vois ici, me dis-je encore, je l'ai vu autre-. fois dans mon enfance. Ce qui me rappelle encore le souvenir de Maillé, c'est le portrait de mon ancien pasteur, M. Fournet, et une notice sur sa vie, que je lis toujours avec

un plaisir délicieux et au delà de toute expression. >

A ce que nous venons de dire de commun aux paroisses de Maillé et d'Angles, nous ajouterons seulement les particularités suivantes en l'honneur de cette dernière; de grand matin, même en hiver, et dans l'intérêt de la classe ouvrière, les portes de l'église s'ouvraient pour la prière et la méditation en commun; commençait ensuite le saint sacrifice, auquel on participait, d'effet ou de désir, par la sainte communion; on revenait à l'église, l'après-midi ou pour la la prière du soir, après avoir fait le chemin de la croix, au pied de celle qui avait été plantée sur la place, comme un monument de la foi publique. Enfin, l'office du sacré cœur s'y récitait en commun, à différentes heures du jour, par un certain nombre d'hommes et de femmes, entrés dans l'association qui en porte le nom. Ce qui soutenait l'intérêt de tous ces exercices religieux, c'étaient encore les cantiques dont le chant si agréable et si doux attendrissait les cœurs, moins à raison de la beauté des voix que de la pureté des lèvres, qui, en les faisant entendre, se purifiaient davantage. Oh! si vous eussiez vous-même entendu ce mélodieux concert, il vous eût été permis de soupçonner ce que doit être un jour au ciel le charme ineffable de celui des saints, chantant le cantique nou

veau devant le trône de l'Agneau! Que la grâce était donc grande dans la petite cité, si riche du zèle de son pasteur et de la forme évangélique de la plupart des familles dont elle se composait alors! Car on y aimait, ainsi que dans les communautés les plus régulières, à travailler, à se taire, à prier, à méditer, à se tenir caché par défiance du monde et de soi-même, enfin à pratiquer les vertus intérieures. Point d'autre joie que celle de s'entretenir à l'occasion de Dieu et des intérêts de la religion; point d'autres assemblées que celles où l'on assistait au saint sacrifice, et où l'on entendait la sainte parole; point d'autres pompes que celles des fêtes; point d'autres festins que de rares et légers repas dont la tempérance du petit nombre des convives et l'édification de leurs discours, renouvelaient les agapes des premiers chrétiens; enfin point d'autres veillées que celles où le travail, sanctifié par la présence de Dieu, se terminait par la prière domestique qui succédait à la prière publique dans l'église et qu'avaient accompagnée une lecture spirituelle et le chant des cantiques. Ne pouvant faire ici le dénombrement de tant de fidèles qui, par leur piété et leur charité, méritent que leur mémoire soit en bénédiction et que leurs os refleurissent dans leurs sépulcres, nous nous bornons à citer le nom des chefs de familles que leur zèle rendit parti

cipants de la grâce apostolique, attachée par le Saint-Esprit au ministère des pasteurs. Tels furent les Chatillon de Chasseloup père et oncle de plusieurs prêtres, et en quelque sorte prêtre lui-même par sa vie toute sacerdotale; les Dionet, père d'une race élue, médecins des prêtres proscrits et leur suppléant, au besoin, dans l'administration du baptême; les de Douce, leur généreux hôte; les Louis Berry et les Pierre Banier; les Louis Fruchon, leurs guides dévoués dans les courses apostoliques de la nuit; enfin le laboureur Brusnet, attirant sur soi tous les regards par sa religieuse tenue dans les églises et dans les processions qu'il précédait, comme un étendard, en son costume de pèlerin: il avait fait nu-pieds, par dévotion, le voyage de saint Jacques de Compostelle. Parmi les femmes on distinguait: la dame Boiberton Dionet, née Lamassière, se consolant dans son veuvage par la prière et une aussi belle œuvre que celle d'enseigner la religion aux enfants; la vierge Cathe> rine Gachard, qui, pendant quarante ans, put se dévouer dans le Seigneur 2 au même travail; enfin, la jeune dame Desfosses, encore vivante, qui, tout en élevant selon Dieu une nombreuse famille, se montrait en tout et partout l'édifica

Note à la fin de la PREMIÈRE VERTU.

2 Quæ multùm laboravit in Domino. (Rom., xvi, 12.)

tion particulière et comme l'âme des assemblées chrétiennes, dont elle animait la piété par des prières et par des lectures publiques; et cela, sans négliger le salut des pécheurs, dans lequel une foi vive semblait lui montrer la condition et l'espérance du bien. Mais par quelles louanges célébrer l'holocauste qu'offrirent un jour vingtquatre jeunes vierges de la ville, se dirigeant ensemble vers Maillé, pour s'y consacrer à Dieu, sous la main de son pieux pasteur? Nous ne pouvons nepas distinguer, parmi ces filles héroïques, quatre sœurs, nommées Turquand Defraud, mortes ainsi que leur mère, née Dionnet, de la mort des justes, et deux autres sœurs nommées aussi Dionnet et mortes aussi heureusement. Mais ce qui relevait encore cette consécration simultanée de tant de vierges, c'était que la plupart d'entre elles étaient accompagnées de leurs religieux parents, qui, se regardant comme les dépositaires plutôt que les maîtres de leurs chers enfants, avaient jugé conforme à leur amour tout chrétien pour elles de favoriser, du moins, s'ils ne l'avaient pas fait naître, leur noble émulation pour ce qu'il y a de plus parfait.

Cet heureux état de choses continua, sous la conduite de feu M. Duris, prêtre d'une foi si simple et d'un esprit si humble, qui, se regardant dans sa propre paroisse comme le vicaire de M. Fournet, n'avait rien de plus à cœur que

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