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L'on n'a pas ces contrats qui peuvent engager,

Et si l'on n'est pas bien, l'on peut au moins changer.
A-t-on quelque défaut, on fait tout son possible,
Lorsque l'on fait l'amour, pour le rendre invisible;
Mais est-on marié, l'on ne se contraint plus,
Et tous ces petits soins passent pour des abus.
On devient négligé dès la première année.
C'est une belle fleur qui s'est bientôt fanée.
Tous ces ajustements ne faisoient pas un pli,
Et rendoient, en un mot, un galant accompli :
Il ne lavoit ses mains qu'avecque de l'eau d'ange,
Sa perruque et ses gants n'étoient que fleur d'orange,
Et celui qui n'étoit que civette et qu'iris

Sent maintenant le bouc, au lieu de l'ambre gris.
Il semble avoir toujours mille procès en tête,
Et ce galant esprit est devenu tout bête;
Il est toujours chagrin, et ne dit pas un mot;
Depuis qu'il a pris femme il est devenu sot;
Aussi, quand on en prend, on court risque de l'être;
L'époux
en ce cas-là n'est pas toujours le maître;
Son pouvoir ne sauroit éviter ce malheur.

Si l'on ne m'en croit pas, qu'on voye le Vasseur,
Je le puis bien citer, la chose est fort publique,
On sait qu'il est cocu par arrêt authentique.
Damis est comme lui, Colin l'est en secret.
Si je les contois tous, je n'aurois jamais fait ;
Il faudroit remonter jusques au premier homme,
Savoir si le serpent ne le trompa qu'en pomme;
Peut-être le fut-il, du moins s'il ne le fut,
Il étoit très-facile, et fort peu s'en fallut .

Ce n'est pas toutefois que j'en veuille connoître, Car, s'il ne le fut pas, il pouvoit du moins l'être, Et moi, qui ne veux pas me mettre en ce danger, Je fuis le mariage et n'y veux pas songer.

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Quel est donc ce chaos, et quelle extravagance
Agite maintenant l'esprit de notre France?
Quel démon infernal a mis des changements
Et tant de nouveautés dans tous nos réglements?

On fait et l'on défait, on rétablit, on casse;
Rien ne demeure entier, quelque chose qu'on fasse :

On retranche les saints, on les refait après;
On plaide au Châtelet quand on fête au Palais;
On trouve à réformer même sur la réforme :
L'ancien droit à présent est un droit tout difforme.
On ne le connoît plus, tant on le voit changé.
Si de même on vouloit réformer le clergé,

dix autres?

Si l'on vouloit ôter la moitié de leurs dîmes,
La réforme pourroit bien réformer des crimes.
Ces trop grands revenus perdent beaucoup de gens,
Et ces riches pasteurs sont toujours indigents.
Pourquoi ceux qui devroient imiter les apôtres
Ont-ils seuls plus de bien qu'il n'en faut pour
On devroit bien régler un tel déréglement,
Et montrer aux pasteurs à vivre sobrement.
On ne voit que des gens de mitres et de crosses
Faire aujourd'hui rouler de superbes carrosses,
Sans se ressouvenir qu'autrefois l'Éternel
Ne monta qu'une ânesse en un jour solennel.
On parle des impôts dont la France est remplie,
Tout le monde en murmure et tout le monde en cric.
Qu'est-ce, en comparaison de tant d'injustes droits
Qu'aujourd'hui les pasteurs lèvent en tous endroits?
Tout le monde en naissant doit à la sacristie;
Il faut payer l'entrée, et payer la sortie.
Enfin tous les pasteurs, par un fatal accord,
Trouvent de quoi gagner en la vie, en la mort;
Bonne condition qui donne de quoi vivre
En lisant seulement quatre feuillets d'un livre;
Récitant tous les jours trois ou quatre oraisons,
Trouvent de quoi fournir aux frais de leurs maisons!
Que le bréviaire est bon dans le siècle où nous sommes !
Un pasteur est toujours le plus heureux des hommes.
Veut-on se marier? faut acheter un banc,

On en achète deux, le pasteur vous les vend;
Vous ne les auriez pas s'il manquoit une obole.
Comment nommer cela, si ce n'est monopole,

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