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MONTESQUIEU

PEINT

D'APRÈS SES OUVRAGES,

Par BERTRAND BARERE, ex-Député
du Département des Hautes-Pyrénées,
à la Convention nationale.

par

q

IMPRIMÉ EN SUISSE,

ET REIMPRIMÉ EN FRANCE

L'AN CINQUIEME DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

a b c d e f g h i
j B k l m n o p

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AUX

HOMMES LIBRES.

J'A1 pensé que la gloire d'un éloge public étoit

autant une dette nationale que la dette de tout républicain envers le génie de Montesquieu; & j'ai écrit ce difcours, laiffant à l'affemblée natio nale le foin & le devoir d'acquitter le peuple français envers la mémoire de ce grand homme, par les honneurs du PANTHEON.

J'ai pensé que l'orateur qui réussiroit à présenter dignement à l'admiration des hommes libres & à la reconnoiffance de fes concitoyens, les travaux & les bienfaits de la philofophie de l'auteur de l'Esprit des Lois, fans diffimuler quelques erreurs de fa politique & leur dangereufe influence, fans imputer à fon génie indépendant, les opinions monarchiques que lui arracherent le temps où il vécut, & le gouvernement fous lequel il écri vit, auroit bien mérité de la république, & fecondé les vues de fes fondateurs.

Ce n'eft pas une chofe indifférente, après la tourmente révolutionnaire, après les fyftêmes

ív

arbitraires & vagues, après les mouvemens agraires, de reporter le peuple français vers des idées d'ordre & de juftice, vers des théories régulieres de police & de légiflation, vers les bafes folides de la fureté des perfonnes & du respect des propriétés. On ne peut célébrer Montesquieu fans produire tous ces utiles effets, & fans rappeler toutes fes maximes tutélaires : cette pensée a échauffé mon zele, & adouci le fouvenir de mes infortunes.

J'offre cet ouvrage, compofé dans les angoif fes des prifons, & continué dans l'obscurité d'un exil arbitraire, à cette portion eftimable d'hommes libres, dont aucune oppreffion ne peut changer l'opinion civique, qu'aucune tyrannie, fût-. elle couverte même du manteau populaire, ne peut jamais détourner des principes de la république, qui eft le genre de gouvernement où regnent les mœurs & les lois, où l'égalité des droits & le bonheur n'eft pas une chimere, où la liberté, la justice & la propriété ne font pas

de vains noms.

J'écris pour ces hommes conftans & fermes, qui, dans tous les pays, fous tous les gouvernemens, cultivent leur raifon, & veulent uniquement le bonheur de leurs femblables. Ces hommes

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font plus nombreux qu'on ne penfe, même fous le defpotifme. La nature en a déposé par-tout de ces hommes-là; il y en a auprès des ferrails du grandfeigneur, à côté des hordes militaires des puiffances du nord, dans les glaces de la Ruffie, comme dans les climats brûlans de l'Afrique, fous les yeux même de l'inquifition portugaife, & jufques dans le capitole de Rome facerdotale. Il en exifte dans tous les pays de ces ames indépendantes & fortes, qui méditent les ouvrages de Montefquieu, qui vénerent fon génie & chériffent fa gloire,

Tous ces hommes me pardonneront fans doute d'offrir dans cet ouvrage l'analyse de quelques livres de l'Esprit des Lois, & de rappeler à la mémoire de fes admirateurs, une foule de traits contre le despotisme, de pensées pour les républiques & de bafes pour la législation. Ces traits & ces pensées ont été confacrés comme maximes dans les affemblées nationales, ont inspiré dans plufieurs pays une légiflation plus parfaite ; ils ont été traduits dans plufieurs langues qu'ils ont enrichies; ils ont été tranfmis dans une foule d'ouvrages que l'Esprit des Lois a fait naître. Les rappeler, c'eft inftruire.

D'ailleurs comment louer un grand penfeur,

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