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ranger sous un chef, appréciateur des bonnes et des mauvaises lois. N'en est-il ainsi, alors tel député prend sa bêtise pour sa conscience et la met dans l'urne. L'opposition dite de conscience consiste à flotter entre les partis, à ronger son frein, à voter même, selon l'occurrence, pour le ministère, à se faire magnanime en enrageant; opposition d'imbécillités mutines chez les soldats, de capitulations ambitieuses parmi les chefs. Tant que l'Angleterre a été saine, elle n'a jamais eu qu'une opposition systématique on entrait et l'on sortait avec ses amis; en quittant le portefeuille on se plaçait sur le banc des attaquants. Comme on était censé s'être retiré pour n'avoir pas voulu accepter un système, ce système étant resté près de la couronne devait être nécessairement combattu. Or, les hommes ne représentant que des principes, l'opposition systématique ne voulait emporter que les principes, lorsqu'elle livrait l'assaut aux hommes.

L'opposition me suit.

Ma chute fit grand bruit: ceux qui se montraient les plus satisfaits en blâmaient la forme. J'ai appris depuis que M. de Villèle hésita; M. de Corbière décida la question : « S'il ren« tre par une porte au conseil, dut-il dire, je «sors par l'autre. » On me laissa sortir: il était tout simple qu'on me préférât M. de Corbière. Je ne lui en veux pas ; je l'importunais, il m'a fait chasser : il a bien fait.

Le lendemain de mon renvoi et les jours suivants, on lut dans le Journal des Débats ces paroles si honorables pour MM. Bertin :

C'est pour la seconde fois que M. de Cha

VII.

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«<teaubriand subit l'épreuve d'une destitution

« solennelle.

« Il fut destitué en 1816, comme ministre

d'État, pour avoir attaqué, dans son immortel « ouvrage de la Monarchie selon la Charte, la « fameuse ordonnance du 5 septembre, qui

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prononçait la dissolution de la Chambre introuvable de 1815. MM. de Villèle et Corbière « étaient alors de simples députés, chefs de l'opposition royaliste, et c'est pour avoir «< embrassé leur défense que M. de Chateau« briand devint la victime de la colère minis«térielle.

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En 1824, M. de Chateaubriand est encore «< destitué, et c'est par MM. de Villèle et Cor«< bière, devenus ministres, qu'il est sacrifié. « Chose singulière ! en 1816, il fut puni d'avoir « parlé; en 1824, on le punit de s'être tu; son « crime est d'avoir gardé le silence dans la dis« cussion sur la loi des rentes. Toutes les dis

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grâces ne sont pas des malheurs; l'opinion

publique, juge suprême, nous apprendra

<<< dans quelle classe il faut placer M. de Cha<«<teaubriand; elle nous apprendra aussi à qui « l'ordonnance de ce jour aura été le plus fa« tale, ou du vainqueur ou du vaincu.

Qui nous eût dit, à l'ouverture de la ses«sion, que nous gâterions ainsi tous les résul<<< tats de l'entreprise d'Espagne? Que nous « fallait-il cette année? Rien que la loi sur la « septennalité (mais la loi complète) et le bud« get. Les affaires de l'Espagne, de l'Orient et « des Amériques, conduites comme elles l'étaient, prudemment et en silence, seraient « éclaircies; le plus bel avenir était devant « nous; on a voulu cueillir un fruit vert; il << n'est pas tombé, et on a cru remédier à de la précipitation par de la violence.

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«La colère et l'envie sont de mauvais conseil« lers; ce n'est pas avec les passions et en mar« chant par saccades que l'on conduit les États.

« P.-S. La loi sur la septennalité a passé, « ce soir, à la Chambre des députés. Ou peut « dire que les doctrines de M. de Chateaubriand

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