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Intervalle entre l'ambassade de Berlin et l'ambassade de LonBaptême de M. le duc de Bordeaux. Lettre à M. Pasquier. Lettre de M. de Bernstorff.— Lettre de M. Ancillon. Dernière lettre de madame la duchesse de Cumberland.

J'arrivai à Paris à l'époque des fêtes du baptême de M. le duc de Bordeaux. Le berceau du petit-fils de Louis XIV dont j'avais eu l'honneur de payer le port a disparu comme celui du roi de Rome. Dans un temps différent de celui-ci, le forfait de Louvel eût assuré le scop

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tre à Henri V; mais le crime n'est plus un droit que pour l'homme qui le commet.

Après le baptême de M. le duc de Bordeaux, on me réintégra enfin dans mon ministère d'État: M. de Richelieu me l'avait ôté, M. de Richelieu me le rendit; la réparation ne me fut pas plus agréable que le tort ne m'avait blessé.

Tandis que je me flattais d'aller revoir mes corbeaux, les cartes se brouillèrent: M. de Villèle se retira. Fidèle à mon amitié et à mes principes politiques, je crus devoir rentrer dans la retraite avec lui. J'écrivis à M. Pasquier:

« Monsieur le baron,

<< Paris, ce 30 juillet 1821.

« Lorsque vous voulûtes bien m'inviter à pas« ser chez vous, le 14 de ce mois, ce fut pour « me déclarer que ma présence était nécessaire « à Berlin. J'eus l'honneur de vous répondre

«

que MM. de Corbière et de Villèle paraissant

<< se retirer du ministère, mon devoir était de

«<les suivre. Dans la pratique du gouvernement représentatif, l'usage est que les hommes de << la même opinion partagent la même fortune. « Ce que l'usage veut, monsieur le baron, l'hon<< neur me le commande, puisqu'il s'agit, non « d'une faveur, mais d'une disgrâce. En consé« quence, je viens vous réitérer par écrit l'offre << que je vous ai faite verbalement de ma dé<< mission de ministre plénipotentiaire à la cour « de Berlin : j'espère, monsieur le baron, que « vous voudrez bien la mettre aux pieds du roi. « Je supplie Sa Majesté d'en agréer les motifs, « et de croire à ma profonde et respectueuse << reconnaissance pour les bontés dont elle avait daigné m'honorer.

« J'ai l'honneur d'être, etc.

« CHATEAUBRIAND. »

J'annonçai à M. le comte de Bernstorff l'évè

nement qui interrompait nos relations diplomatiques; il me répondit :

« Monsieur le vicomte,

Bien que depuis longtemps je dusse m'at«tendre à l'avis que vous avez bien voulu me << donner, je n'en suis pas moins péniblement « affecté. Je connais et je respecte les motifs

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qui, dans cette circonstance délicate, ont dé<< terminé vos résolutions; mais, en ajoutant de « nouveaux titres à ceux qui vous ont valu dans « ce pays une estime universelle, ils augmen« tent aussi les regrets qu'on y éprouve par la « certitude d'une perte longtemps redoutée et « à jamais irréparable. Ces sentiments sont vi«vement partagés par le Roi et la famille royale, « et je n'attends que le moment de votre rappel « pour vous le dire d'une manière officielle.

« Conservez-moi, je vous prie, souvenir et « bienveillance, et agréez la nouvelle expres«sion de mon inviolable dévouement et de << la haute considération avec laquelle j'ai « l'honneur d'être, etc., etc.

. Bernstorff.

Berlin, le 25 août 1921. »

Je m'étais empressé d'exprimer mon amitié et mes regrets à M. Ancillon sa très-belle réponse (mon éloge à part) mérite d'être consignée ici :

<< Berlin, le 22 septembre 1821.

« Vous êtes donc, monsieur et illustre ami, << irrévocablement perdu pour nous? Je pré« voyais ce malheur, et cependant il m'a af«fecté comme s'il avait été inattendu. Nous « méritions de vous conserver et de vous pos« séder, parce que nous avions du moins le fai<< ble mérite de sentir, de reconnaître, d'admi« rer toute votre supériorité. Vous dire que le

Roi, les princes, la cour et la ville vous re« grettent, c'est faire leur éloge plus que le vô« tre; vous dire que je me réjouis de ces re

grets, que j'en suis fier pour ma patrie, et « que je les partage vivement, ce serait rester «fort au-dessous de la vérité, et vous donner «< une bien faible idée de ce que j'éprouve. Per« mettez-moi de croire que vous me connaissez

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