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spectacles; et l'harmonie la plus douce est le son de la voix de celle que l'on aime,

L'agrément est arbitraire la beauté est quelque chose de plus réel et de plus indépendant du goût et de l'opinion.

L'on peut être touché de certaines beautés si parfaites et d'un mérite si éclatant, que l'on se borne à les voir et à leur parler.

Une belle femme qui a les qualités d'un honnête homme, est ce qu'il y a au monde d'un commerce plus délicieux : l'on trouve en elle tout le mérite des deux sexes.

Il échappe à une jeune personne de petites choses qui persuadent beaucoup, et qui flattent sensiblement celui pour qui elles sont faites : il n'échappe presque rien aux hommes, leurs caresses sont volontaires; ils parlent, ils agissent, ils sont empressés, et persuadent moins.

Le caprice est dans les femmes tout proche de la beauté, pour être son contre-poison, et afin qu'elle nuise moins aux hommes, n'en guériraient pas sans ce remède.

qui

Les femmes s'attachent aux hommes par les faveurs qu'elles leur accordent : les hommes guérissent par ces mêmes faveurs.

Une femme oublie d'un homme qu'elle n'aime plus jusques aux faveurs qu'il a reçues d'elle.

Une femme qui n'a qu'un galant croit n'être point coquette: celle qui a plusieurs galans croit n'être que coquette.

Telle femme évite d'être coquette par un ferme attachement à un seul, qui passe pour folle par son mauvais choix.

Un ancien galant tient à si peu de chose qu'il cède à un nouveau mari; et celui-ci dure si peu, qu'un nouveau galant qui survient lui rend le change.

Un ancien galant craint ou méprise un nouveau rival, selon le caractère de la personne qu'il sert.

Il ne manque souvent à un ancien galant auprès d'une femme qui l'attache, que le nom de mari : c'est beaucoup; et il serait mille fois perdu sans cette circonstance.

Il semble que la galanterie dans une femme ajoute à la coquetterie. Un homme coquet au contraire est quelque chose de pire qu'un homme galant. L'homme coquet et la femme galante vont assez de pair.

Il y a peu de galanteries secrètes : bien des

femmes ne sont pas mieux désignées par le nom de leurs maris que par celui de leurs

amans.

Une femme galante veut qu'on l'aime; il suffit à une coquette d'être trouvée aimable et de passer pour belle. Celle-là cherche à engager; celle-ci se contente de plaire. La première passe successivement d'un engagement à un autre ; la seconde a plusieurs amusemens tout à la fois. Ce qui domine dans l'une, c'est la passion et le plaisir; et dans l'autre, c'est la vanité et la légèreté. La galanterie est un faible du cœur ou peut-être un vice de la complexion : la coquetterie est un déréglement de l'esprit. La femme galante se fait craindre, et la coquette se fait haïr. L'on pent tirer de ces deux caractères de quoi en faire un troisième, le pire de tous.

Une femme faible est celle à qui l'on reproche une faute; qui se la reproche à ellemême; dont le cœur combat la raison; qui veut guérir, qui ne guérira point, ou bien tard.

Une femme inconstante est celle qui n'aime plus: une légère, celle qui déjà en aime un autre : une volage, celle qui ne sait si elle aime

et ce qu'elle aime; une indifférente, celle qui

n'aime rien.

La perfidie, si je l'ose dire, est un mensonge de toute la personne : c'est dans une femme l'art de placer un mot ou une action qui donne le change, et quelquefois de mettre en œuvre des sermens et des promesses qui ne lui coûtent pas plus à faire qu'à violer.

Une femme infidèle, si elle est connue pour telle de la personne intéressée, n'est qu'infidèle: s'il la croit fidèle, elle est perfide.

On tire ce bien de la perfidie des feinmes qu'elle guérit de la jalousie.

Quelques femmes ont, dans le cours de leur vie, un double engagement à soutenir, également difficile à rompre et à dissimuler: il ne manque à l'un que le contrat, et à l'autre que le cœur.

A juger de cette femme (1) par sa beauté, sa jeunesse, sa fierté, et ses dédains, il n'y a personne qui doute que ce ne soit un héros qui doive un jour la charmer: son choix est

(1) Mademoiselle de Luynes, sœur de M. de Luynes, correcteur des comptes.

fait; c'est un petit monstre qui manque d'esprit.

Il y a des femmes déjà flétries, qui, par leur complexion ou par leur mauvais caractère, sont naturellement la ressource des jeunes gens qui n'ont pas assez de bien. Je ne sais qui est plus à plaindre, ou d'une femme avancée en âge qui a besoin d'un cavalier, ou d'un cavalier qui a besoin d'une vieille.

Le rebut de la cour (1) est reçu à la ville dans une ruelle, où il défait le magistrat même en cravate et en habit gris, ainsi que le bourgeois en baudrier, les écarte, et devient maître de la place: il est écouté, il est aimé : on ne tient guère plus d'un moment contre une écharpe d'or et une plume blanche, contre un homme qui parle au roi et voit les ministres. Il fait des jaloux et des jalouses; on l'admire, il fait envie ; à quatre lieues de là, il fait pitié.

Un homme de la ville est pour une femme de province ce qu'est pour une femme de la ville un homme de la cour.

A un homme vain, indiscret, qui est grand

(1) Le baron d'Aubigné.

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