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valles inégaux, mais pourtant diftin gués l'un de l'autre fuivant de juftes proportions, forme régulièrement par le mélange des fons aigus avec les graves, différens concerts. Il n'eft pas poffible en effet, que de fi grands mouvemens se faffent fans bruit; & c'eft conformément aux loix naturelles, que des deux extrêmes

tave avec le plus grave. Ces huit fons, 5 comme l'on voit, font féparés de huit intervalles, fuivant certaines proportions; de manière que du mi au fa, fe trouve la » distance d'un demi ton; du mi au fol, celle d'une tierce mineure; du mi au la, ceile » d'une quarte; du mi au fi, celle d'une quinte; du mi à l'ut, celle d'une fixte mineure; & du mi au ré, celle d'une fep» tième mineure; lefquels avec l'octave fon » en tout fept accords.

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où fe termine l'affemblage de tous ces intervalles, l'un fait entendre le fon grave, & l'autre le fon aigu. Par cette raifon, l'orbe des étoiles fixes, comme le plus élevé, & dont le mouvement eft le plus rapide, doit rendre un fon très-aigu; pendant que l'orbe de la lune, comme le plus bas de tous ceux qui fe meuvent, doit rendre un fon des plus graves. Car pour la terre, dont le globe fait le neuvième, elle demeure immobile, & toujours fixe au plus bas lieu, qui eft le centre de l'univers. Ainfi les révolutions de ces huit orbes, deux defquelles ont même puiffance, produifent fept différens fons ; il n'y a prefque rien dont le nom

bre fepténaire ne foit le noud.

On a imité cette harmonie célefte, foit avec des inftrumens, foit avec la voix ; & les grands muficiens (1) fe font par-là ouvert un chemin pour revenir ici; de même que tous ces fublimes génies, qui pendant le cours d'une vie mortelle ont cultivé les fciences divines.

Que fi cette harmonie ne s'entend point fur la terre, c'est qu'un fi grand bruit a rendu les hommes fourds. Auffi le fens de l'ouïe eft le plus foible & le plus obtus de tous les fens. Il eft arrivé de même au peuple qui habite auprès des

(1) Amphion, Linus, Orphée, &c.

cataractes du Nil, d'être affourdi par l'épouvantable bruit que fait ce fleuve en fe précipitant du haut des montagnes. Et quant à ce prodigieux fon, que toutes les fphères enfemble forment en fe mouvant avec tant de rapidité, vos oreilles ne font non plus capables de le recevoir, que vos yeux de foutenir l'éclat du foleil, fi vous le regardez fixement.

Tout en m'occupant de ces merveilles, je ne laiffois pas de jeter toujours de tems en tems les yeux fur la terre. Vos regards, me dit l'africain, cherchent encore, à ce que je vois, l'habitation des mortels. Mais quoi? puifqu'elle vous paroît fi petite, comme effective

ment elle l'eft, n'ayez pour elle que du mépris, & ne regardez jamais que le ciel. Qu'eft-ce après tout que cette renommée, & de quel prix eft cette gloire, où il vous eft poffible d'atteindre? Vous voyez que la terre eft peuplée dans un bien petit nombre d'endroits, qui font chacun de peu d'étendue, & fi fort coupés par de vaftes folitudes qu'ils nous paroiffent

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d'ici comme des taches répandues de loin en loin fur votre globe. Tellement que ceux qui habitent la terre, difperfés comme ils le font, & non point fur une même ligne, mais ceux-ci d'un côté, ceux-là de l'autre, ne peuvent avoir de commerce enfemble, ni par

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