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PART II.

SELECTIONS IN POETRY.

For a treatise upon the system of French versification, the student is referred to Part III. of this work. The subject can be studied to the best advantage in connection with the poetical selections in this portion of the volume, and this practical application of the principles upon which French verses are constructed, will be found to be a study both interesting and profitable. To facilitate the labors of both teacher and pupil in this direction, full references to the rules of versification will be given in the notes. Care must, however, be taken, in reading the poetry, not to acquire the habit of measuring it off in a monotonous, scanning style. As a means of obviating this, careful attention should be given to the principles of the tonic accent and the cesura (10-12), and especially to the feeling and sentiment which the verses are intended to inspire. This, indeed, is the true key to the proper reading of French poetry; without attention to it, the most perfect knowledge of the principles of versification could produce only a monotonous and artificial style, destitute of either sense or harmony. A knowledge of the rules and a due appreciation of the sentiment must go hand in hand.

The following lines by FRANÇOIS DE NEUFCHATEAU upon the true mode of reading French poetry may properly be inserted here. The measure is the hexameter, or twelve-syllabled verse, upon which the student should consult Part III., §§ 3; 4; 8; 9, R. 1; 30, R. 2; and upon the rhyme, §§ 13-27; 32, 1.

MANIÈRE DE LIRE LES VERS.

Arrête, sot lecteur, dont la triste manie
Détruit de nos accords la savante harmonie;
Arrête, par pitié! Quel funeste travers,
En dépit d'Apollon, te fait lire des vers!

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(241)

Ah! si ta voix ingrate ou languit, ou détonne,
Ou traîne avec lenteur son fausset monotone;
Si du feu du génie en nos vers allumé
N'étincelle jamais ton œil inanimé;

Si ta lecture enfin, dolente psalmodie,

Ne dit rien, ne peint rien à mon âme engourdie,
Cesse, ou laisse-moi fuir. Ton regard abattu
Du regard de Méduse a la triste vertu.
L'auditeur qu'ont glacé tes sons et ta présence,
Croit subir le supplice inventé par Mézence:
C'est un vivant qu'on lie au cadavre d'un mort:
Attentif à ta voix, Phébus même s'endort;
Sa défaillante main laisse tomber sa lyre.

C'est peu d'aimer les vers, il les faut savoir lire;
Il faut avoir appris cet art mélodieux,
De parler dignement le langage des dieux;
Cet art qui, par les tons des phrases cadencées,
Donne de l'harmonie et du nombre aux pensées;
Cet art de déclamer, dont le charme vainqueur
Assujettit l'oreille et subjugue le cœur.

"D'où vient, me diras-tu, cette brusque apostrophe? Lisant pour m'éclairer, je lis en philosophe.

Plus un écrit est beau, moins il a besoin d'art,
Et le teint de Vénus peut se passer de fard;
L'harmonieux débit que ta Muse me vante,
Ne séduisit jamais une oreille savante.
De cette illusion qu'un autre soit épris;
Mais la vérité nue a pour moi plus de prix.”

Eh quoi! d'une lecture insipide et glacée,
Tu prétends attrister mon oreille lassée!
Quoi! traître, à tes côtés tu prétends m'enchaîner!
A loisir, en détail, tu veux m'assassiner;
Dans les longs bâillements et les vapeurs mortelles
Ensevelir l'honneur des œuvres les plus belles;

Et toujours méthodique, et toujours concerté,
Des élans d'un auteur abaisser la fierté,

Tomber quand il s'élève, et ramper quand il vole!

Ah! garde pour toi seul ton scrupule frivole:
Sois captif dans le cercle obscur et limité
Qui fut tracé des mains de l'uniformité;
Aux lois de ton compas asservis Melpomène,
Et la douleur de Phèdre, et l'amour de Chimène;
Ravale à ton niveau l'essor audacieux

De l'oiseau du tonnerre égaré dans les cieux;
Meurs d'ennui, j'y consens; sois barbare à ton aise;
Mais ne m'accable pas sous un joug qui me pèse;
N'exige pas du moins, insensible lecteur,
Que jamais je me plie à ton goût destructeur.
Va, d'un débit heureux l'innocente imposture
Sans la défigurer embellit la nature;

Et les traits que la Muse éternise en ses chants,
Récités avec art, en seront plus touchants:
Ils laisseront dans l'âme une trace durable,
Du génie éloquent empreinte inaltérable,
Et rien ne plaira plus à tous les goûts divers
Qu'un organe flatteur déclamant de beaux vers.
Jadis on les chantait: les annales antiques
De Moïse et d'Orphée exaltent les cantiques.
Te faut-il rappeler ces prodiges connus?
Ces rochers attentifs à la voix de Linus?
Et Sparte qui s'éveille aux accents de Tyrtée ?
Et Terpandre apaisant la foudre révoltée?
Les poètes divins, maîtres des nations,
Savaient noter alors l'accent des passions.
L'âme était adoucie et l'oreille charmée,
Et même des tyrans la rage désarmée.
Ce fut l'attrait des vers qui fit aimer les lois.

L'art de les déclamer fut le talent des rois.

Les dieux mêmes, les dieux, par la voix des oracles, De cet art enchanteur consacraient les miracles.

Chez les fils de Cadmus, peuples ingénieux,
Que les sons de la lyre étaient harmonieux!
Que, dans ces beaux climats, l'exacte prosodie
Aux chansons des neuf Sœurs prêtait de mélodie!
On voyait, à côté des dactyles volants,

Le spondée allongé se traîner à pas lents.
Chaque mot, chez les Grecs, amants de la mesure,
Se pliait de lui-même aux lois de la césure.

Chaque genre eut son rhythme. En vers majestueux,
L'épopée entonna ses récits fastueux.

La modeste élégie eut recours au distique;
Archiloque s'arma de l'iambe caustique.
A des mètres divers Alcée, Anacréon

Prêtèrent leur génie, et leur gloire, et leur nom.
Pour nous, enfants des Goths, Apollon, plus avare,
A dédaigné longtemps notre jargon barbare.
Ce jargon s'est poli: les Muses, sur nos bords,
Ont d'une mine ingrate arraché les trésors.
O Racine! ô Boileau! votre savante audace
Fait parler notre langue aux échos du Parnasse,
Ce rebelle instrument rend des accents flatteurs;
Vous peignez la nature en sons imitateurs:
Tantôt doux et légers, tantôt pesants et graves,
Votre Apollon est libre au milieu des entraves;
Et l'oreille, attentive aux charmes de vos vers,
Croit de Virgile même entendre les concerts.

§ 48. MALHERBE, 1555-1628.

La poésie française atteignit son point de maturité et de perfection avant la prose: elle le dut en grande partie à MALHERBE. Les compositions qu'il a laissées ne sont pas nombreuses, et consistent en morceaux de peu d'étendue, tels que des odes, stances, paraphrases de psaumes; mais, par l'heureuse sévérité dont il fit preuve en jugeant les autres et en écrivant lui-même, il réforma son époque; il lui enseigna les qualités qui devaient distinguer les beaux vers; il fut surtout utile à notre langue, qui, maniée précédemment avec trop d'audace par quelques esprits aventureux, avait besoin d'être épurée et fixée.

Originaire de Caen, Malherbe, après avoir vécu sous six rois, mourut à Paris en 1628, un an avant que Corneille, qui profita de ses leçons, donnât au théâtre Mélite, la première de ses pièces. Il fut enseveli dans l'église Saint-Germain l'Auxerrois. Outre ses poésies, on a conservé de lui des lettres familières en prose, plus remarquables par la correction que par la facilité et l'abondance. Comme tous les réformateurs efficaces, il avait quelque chose d'absolu et de roide, qui messied dans le genre épistolaire. Il a traduit aussi un livre de Tite-Live, le 33°, qui fut découvert dans son époque, et le traité de Sénèque sur les Bienfaits. Par là on peut voir que les plus grands esprits ont toujours considéré la traduction comme l'exercice le plus propre à fortifier leur talent et à perfectionner leur style.

A HENRI IV: VEUX POUR CE PRINCE.
L'AUTEUR CÉLÈBRE LE RETOUR DE LA PAIX PUBLIQUE.

Tu vas nous rendre enfin nos douces destinées1:
Nous ne reverrons plus ces fâcheuses années
Qui pour les plus heureux n'ont produit que des pleurs.
Toute sorte de biens comblera nos familles ;
La moisson de nos champs lassera les faucilles,
Et les fruits passeront la promesse des fleurs.

La terreur de ton nom rendra nos villes fortes:
On n'en gardera plus ni les murs ni les portes;
Les veilles cesseront au sommet de nos tours.
Le fer, mieux employé, cultivera la terre;

Et le peuple qui tremble aux frayeurs de la guerre,
Si ce n'est pour danser, n'orra' plus de tambours.

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