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de s'occuper de fes avantages, & la néceffité, non moins preffante, de reproduire dans le mariage des citoyens qui la perpétuent. En effet, difoit-il, il convient au fage de laiffer fur la terre un être pour remplacer. Malheureusement Epictète n'étoit point marié, & le philofophe Démonax, auquel il prêchoit le mariage, feignant d'être touché de la vérité de fes préceptes, lui fit cette réponse, propre à détruire tout l'effet de pareilles leçons. « J'y confens, lui dit-il, pourvu que vous me donniez votre fille ».

Ce Démonax, dont Lucien nous a laiffé une vie intéreffante, étoit de ces philosophes, qui, com

me Horace, ne s'attachoient à aucune fecte particulière, & puifoient dans les unes & dans les autres tout ce qu'ils croyoient y trouver de meilleur. On lui demandoit un jour quels étoient les philofophes de l'antiquité qu'il eftimoit le plus, «Je refpecte Socrate, dit-il, j'admire Diogène, & j'aime Aristipe ».

Il prétendoit, comme Epictète, que le bonheur confiftoit dans la liberté, non dans cette liberté effrenée qui rompt tous les liens & toutes les relations de la fociété, mais cette liberté qui, nous foumettant à nos devoirs, nous affranchit des troubles importuns de la crainte & de l'efpérance. L'amour de la liberté n'avoit point produit en

lui ce fentiment d'intérêt perfonnel, qui, à la longue, détruit tous les autres. Il tenoit à fa patrie, & cela paroiffoit jufques dans fes moindres actions. On raconte qu'un jour qu'il différoit de descendre dans le bain, parce qu'il le trouvoit trop chaud, quelqu'un l'accufa d'avoir peur. «Peut-il être utile à la patrie, que je me brûle, répondit-il dites-le-moi, & je ne crain drai plus ».

Les Stoïciens, qui ne s'écartèrent point de la doctrine de leur chef, admirent ces fages principes de fociabilité, qu'on peut re garder comme les vrais fondemens de la bonne morale les autres donnèrent dans des écarts plus ou

moins abfurdes & plus ou moins

pernicieux.

On prétend que Zénon, âgé de plus de quatre-vingts ans, fe donna la mort, après une chûte où il fe caffa le doigt. Les Stoïciens avoient pour principe que la vie & la mort font au nombre des choses indifférentes; que l'ame dụ fage remonte au feu célefte, d'où elle tire fon origine; & qu'il doit ceffer de vivre lorfqu'il ceffe d'être utile au tout. Quant aux ames des autres hommes, ils les faifoient errer quelque tems dans l'air, d'où ils les conduifoient dans la lune pour achever de fe purifier.

Les fucceffeurs de Zénon, qui ont eu le plus de réputation, font

Cléanthe, Chryfippe & Pofidonius. Cette fecte a eu parmi les Romains d'illuftres partifans.

CHAPITRE XII.

Des Pyrrhoniens ou Sceptiques. LA diverfité des opinions, dans

les différentes fectes; femble avoir produit celle des Pyrrhoniens, ou Sceptiques, c'est-à-dire, chercheurs, parce que, tandis que tous les autres donnoient leurs principes pour des vérités inconteftables, il étoit dans l'efprit de ceux-ci de ne pouvoir s'affurer de rien, de manière que, convaincus que tout n'étoit qu'illufion, ou que s'il y avoit quelque réalité dans le monde, elle feroit

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