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logue à celui dont on vient de parler, bien plus que de savoir les fardeaux qu'ils pourraient porter sans bouger de place. Cette nouvelle manière d'envisager les forces est donc au moins aussi naturelle et aussi importante que la première. Et comme il est sensible qu'élever un poids de 100 kilog. à 1,000 mètres de hauteur est la même chose, dans cette manière d'évaluer les forces, qu'élever 200 kilog. à 500 mètres seulement : il suit que les forces, sous ce nouveau point de vue, doivent être considérées comme en raison directe des poids à élever, et des hauteurs auxquelles il faut les porter, ou autres travaux comparables à celui-là (1). » Dans le premier cas, l'auteur est conduit à prendre la vitesse; dans le second, le carré de la vitesse. Les deux manières d'évaluer les forces sont ici parfaitement distinctes, mais on peut demander, comme chez d'Alembert, s'il est indifférent d'employer l'un, ou l'autre.

Selon M. Cournot, qui résume les considérations émises par M. Coriolis dans son calcul de l'effet des machines, 1829; selon M. Cournot, «ce qui nous intéresse dans une force d'impulsion, ce n'est pas la vitesse initiale communiquée au corps, mais la distance à laquelle un corps de masse donnée..... pourra être transporté dans un temps donné en

(1) Princ. de l'équilibre et du mouvement, art. 55, ann. 1803.

force d'impulsion (1). » Considérée de la plus générale, l'idée de M. Cournot, ne se rend peut-être pas bien compte, e être qu'il faut distinguer dans la force essif de l'effet momentané. L'effet sucde même nature que l'élévation d'un e certaine hauteur, la force y est proe au carré de la vitesse; l'effet instanle même nature que la pression, dont t et renaît sans cesse, la force y est elle à la simple vitesse. Dans une llerie, par exemple, s'il s'agit de tel dese, la force sera comme la vitesse; s'il out déterminé, elle sera comme le carré

uit que Leibnitz se trompait en voulant mesurer de cette dernière façon. Ceregarde comme « une loi de la nature erselle et la plus inviolable, qu'il y a parfaite équation entre la cause pleine er; loi qui ne dit pas seulement que les proportionnels aux causes, mais de aque effet entier est équivalent à sa Or, pouvait-il ne pas songer qu'il y a de rencontres où l'on ne considère

p. de la Mécan. de Kaler, art. 400, ann. 1834. p. 197.

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qu'une circonstance de l'effet, et dès lors il serait absurde de l'employer à évaluer la cause pleine, c'est-à-dire la force. Faute d'une pareille réflexion, il s'embarrassait dans le cas suivant : «<< Quoiqu'un corps 2 avec une vitesse 1, et un corps 1 avec une vitesse 2, s'arrêtent ou s'empêchent mutuellement d'avancer, néanmoins si le 1 peut élever une livre à deux pieds de hauteur, le 2 pourra élever une livre à quatre pieds de hauteur. Ce qui est paradoxe, mais indubitable après ce que nous venons de dire (1). » Il est évident que le corps 2 se trouve arrêté par le corps 1 avant d'avoir déployé toute la force qui l'anime, c'est-à-dire, pour appliquer ici la distinction fondamentale que nous avons établie, que la force de ce corps, ainsi que celle du corps 1, ne sont évaluées que par un effet instantané; et parce qu'elles y sont égales, faut-il qu'elles le soient dans leur effet successif, qui en diffère essentiellement?

Les adversaires de Leibnitz erraient bien plus encore que lui, puisqu'ils rejetaient dans tous les cas l'évaluation par le carré. Celles de leurs objections auxquelles on n'a jamais répondu d'une manière satisfaisante tombent sur des effets instantanés. Prenons-en une au hasard, de Maclaurin. «Que deux personnes, dit-il, l'une sur un vaisseau qui s'a

(1) Ibid., p. 199.

vance avec un mouvement uniforme et une vitesse comme 2, l'autre en repos sur le bord de la mer, jettent deux corps égaux A et B, avec des efforts égaux, dans la direction du mouvement du vaisseau, et que le corps B, qui était en repos, gagne une vitesse comme 8, le corps A s'avancera dans le vaisseau avec une vitesse comme 8 aussi, et dans l'air avec une vitesse comme 10, somme de la vitesse du vaisseau et de sa vitesse respective dans le vaisseau. La force du corps A avant qu'il eût cette augmentation, était comme 4, selon M. Leibnitz, sa vitesse ayant été comme 2. L'augmentation de la force qu'il reçoit est égale à celle du corps B, c'est-à-dire à 64; donc la force totale sera 64+4=68. Mais parce que la vitesse est comme 10, sa force doit être comme 100, et ces deux forces sont contradictoires. Ainsi leurs forces ne peuvent pas être comme les carrés de leurs vitesses (1). » Non, elles ne le peuvent pas être ici, puisqu'il n'est question que de l'intensité de la vitesse, et c'est avec raison que Maclaurin triomphe. Les partisans de Leibnitz, comme S'Gravesande (2), qui ont voulu montrer le carré dans le choc des corps, où il s'agit uniquement aussi de la vitesse, n'ont commis que des paralogismes.

(1) Démonstration de la loi du choc des corps, art. 9, ann. 1724, (2) Essai d'une nouvelle théorie du choc des corps, 1722,

Nous entendons maintenant en quoi l'un des deux partis pouvait dire qu'on doit tenir compte du temps, et l'autre en quoi on ne le doit point. La nature de l'effet successif étant indépendante de telle ou telle durée, il est clair que le temps n'y entre point. Si M. Cournot parle du temps donné dans les lignes citées, ailleurs il avoue que cet élément n'entre pas essentiellement dans l'estimation du travail, considéré comme effet produit ou à produire (1). Mais comme cette nature exige une durée quelconque, puisque sans elle nulle succession possible, le temps, sous ce rapport, y entre nécessairement.

Leibnitz donc eut tort de ne distinguer que deux sortes de forces: la force morte, ou de pression, d'équilibre, laquelle tend à produire un mouvement et ne le produit pas, et la force vive, qui le produit (2). Il devait encore distinguer dans la force vive celle qui à chaque instant produit son effet tout entier, et celle qui ne le produit que successivement, c'est-à-dire, la force vive simple, qui rend sans cesse tout ce qu'elle a, et la force vive proprement dite, qui ne le rend que par degré. La

(1) Ibid., art 419.

(2) « Vis dupla est alia elementaris, quam et mortuam appello, quia in ea nondum existit motus, sed tantum sollicitatio ad motum, qualis est globi in tubo, aut lapidis in funda, etiam dum adhuc vinculo tenetur; alia vero vis ordinaria est, cum motu actuali conjuncta, quam voco vivam. » Op., t. III, p. 318.

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