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ture des choses, qui dépend de ces particules telles qu'elles ont été faites d'abord, changerait infailliblement. L'eau et la terre, composées de vieilles particules usées et de fragments de ces particules, ne seraient pas à présent de la même nature et contexture que l'eau et la terre qui auraient été composées au commencement de particules entières. Et par conséquent, afin que la nature puisse être durable, l'altération des êtres corporels ne doit consister qu'en différentes séparations, nouveaux assemblages et mouvements de ces particules permanentes; les corps composés étant sujets à se rompre, non par le milieu de ces particules solides, mais dans les endroits où ces particules sont jointes ensemble et ne se touchent que par un petit nombre de points (1). » Huyghens croit aussi nécessaires des atomes d'une dureté infinie (2). La nature des choses n'aurait rien d'immuable en effet si, comme l'enseigne Descartes, l'union de leurs parties ne consistait que dans le repos, et si ces parties n'étaient déterminées que par le mouvement, et ne différaient que de grandeur et de figure. Mais dès l'instant qu'on les suppose constituées d'étendue et d'activité, la force propre

(1) Opt., quest 31, trad. de Coste.

(2) Christiani Hugenii aliorumque sæculi XVII virorum celebrium exercitationes mathemat. et philos., 1833, p. 134.

que chacune possède suffit pour la maintenir dans l'état que la nature exige. Les atomes se trouvent aussi inutiles en physique, qu'inadmissibles en philosophie.

Maclaurin affirme qu'il << ne connaît dans un corps d'autre façon de perdre sa force qu'en la communiquant à un autre (1). » « Il peut paraître d'abord, dit Carnot, que cela doit souffrir exception dans le cas où il y a des points fixes dans le système; mais le fait est que, dans la nature, il n'existe réellement aucun point véritablement fixe. Ces points, regardés comme fixes, pour la facilité des calculs, ne sont que des masses très-considérables, et qu'on regarde comme infinies à l'égard des autres corps du système. Ainsi le point d'appui sur lequel tourne un levier est lié au globe de la terre, il est censé ne faire qu'un avec elle, il paraît fixe et ne l'est pas, et les quantités de mouvement perdues par les corps suspendus à ce levier sont gagnées par le globe même de la terre, où elles deviennent insensibles et inappréciables pour nous. Ce qui fait que nous regardons ce point d'appui comme réellement fixe et capable de détruire les forces qui lui sont imprimées, et qu'on est obligé, en mécanique, de tenir compte de ces forces, comme si elles dérogeaient, en effet, à cette éga

(1) Exposit., liv. II, ch. 1, art. 5

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LE CARTESIANISME.

lité constante entre l'action et la réaction en se

contraire (1). »

Concluons que le mouvement, encore moins force, ne périt point dans le choc des corps, ma que Descartes a eu tort de croire que, dans cha cune de ses lois, il se conserve sous la mêm forme. Ce qui n'empêche pas que la quantité d mouvement varie dans la nature. Puisque les corp sont actifs, et qu'il n'agissent pas toujours, il y e a tantôt plus, tantôt moins. Rien de plus sensibi chez les animaux et chez l'homme. Comme on n peut guère supposer que tous les corps aient ét créés en même temps, ni que ceux de l'homme des animaux ne meurent qu'en apparence, on es obligé d'avouer que la force aussi augmente et d minue. Newton et Clarke, qui, dans le choc, nier la décomposition du mouvement des corps en mo vements latents de leurs parties, soutiennent qu le mouvement diminue sans cesse dans l'univers et qu'il faut que Dieu l'y rétablisse (2). La con séquence est juste, mais si étrange qu'elle aurait d leur ouvrir les yeux sur la fausseté du principe. A reste elle s'accorde avec ce que dit Newton, que « le irrégularités produites par l'attraction entre le corps célestes seront sujettes à augmenter jusqu'à c

(1) Principes de l'équilibre et du mouvement, p. 63.

(2) Opt., quest. 31, p. 588. Op. Leib., t. II, part. 1, p. 127, 186.

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tème ait besoin d'être réformé (1). « Ils ibnitz, une plaisante idée des ouvrages de on eux, Dieu a besoin de remonter de emps sa montre, autrement elle cesserait n'a pas eu assez de vue pour en faire un nt perpétuel. Cette machine de Dieu est mparfaite, selon eux, qu'il est obligé de la de temps en temps par un concours exire, et même de la raccommoder, comme er son ouvrage; qui serait d'autant plus naître, qu'il sera plus souvent obligé d'y et d'y corriger. Selon mon sentiment, la rce et la même vigueur y subsistent touassent seulement de matière en matière, s lois de la nature et le bel ordre préétabli. s, quand Dieu fait des miracles, que ce pour soutenir les besoins de la nature, mais de la grâce. En juger autrement, ce seune idée fort basse de la sagesse et de nce de Dieu (2). » Déjà le calcul prouve erturbations des astres se compensent, et e de la prétendue nécessité d'une main ce; bientôt les études microscopiques, le fluides invisibles, celui des mouvements les parties des corps, dont, pour le dir

hæc naturæ compages manum emendatricem tandem sit » Opt., quest. 31, p. 577.

I, part. 1, p. 110.

en passant, M. Poisson s'occupait à la veille de sa mort, mettront aussi au néant la nécessité imaginaire d'une création périodique de nouvelles forces.

Leibnitz ne se borne pas à conclure de la notion de la force que la quantité de celle-ci dans le monde diffère de la quantité du mouvement; en 1686, il le prouve par l'évaluation qu'il en fait. « Selon M. Descartes et les autres mathématiciens, il ne faut pas moins de force pour élever un corps d'une livre à la hauteur de quatre aunes, que pour élever un corps de quatre livres à la hauteur d'une aune; d'où il suit que le simple tombant de la hauteur quadruple, acquiert précisément la même force que le quadruple tombant de la hauteur simple; car l'un et l'autre acquerraient une telle force, que les obstacles externes étant ôtés, ils pourraient remonter d'où ils seraient descendus. De plus, Galilée a démontré que la vitesse qu'un corps acquiert, en tombant de la hauteur de quatre aunes, est le double de la vitesse qu'il acquiert en tombant de la hauteur d'une aune. Multipliant donc le corps d'une livre par sa vitesse, c'est-à-dire 1 par 2, le produit ou la quantité du mouvement sera comme 2, et multipliant le corps 4 par sa vitesse, c'est-à-dire 4 par 1, le produit, ou la quantité du mouvement sera comme 4; donc l'une de ces quantités est la moitié de l'autre, quoique peu auparavant les for

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