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84.

cles des Ro

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Le fallon auffi merveilleux que ma-au-haut des portiques, étoient des ré-
gnifique de Néron imitoit les conver- fervoirs d'eaux de fenteur, qui étant
fions du ciel [n] par le mouvement répandues en forme de rofée par une in-
circulaire de fes lambris & de fes plat-finité de petits tuïaux, fervoient nonTM
fonds: & repréfentoit les diverfes fai feulement à répandre une fraîcheur
fons de l'année [], qui changeoient agréable, mais encore à exhaler les
à chaque fervice, & faifoient pleuvoir parfums les plus exquis.
des fleurs & des effences fur les convi-
ves. Héliogabale [p] enchérit autánt
für Néron, que Néron fur Lucullus.
Agrippine à un fpectacle d'un com-
bat naval donné par Claude [4] parut
avec des habits d'or trait, fans foie,
ni aucune autre matiére.

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On trouve dans les anciens auteurs

Des specta- des descriptions fuperbes des fpecta mains. cles, qui prouvent également le luxe prodigieux des Romains,& à quelle perfection ils avoient porté les arts.

M. Æmylius Scaurus étant Edile [*], fit construire un théâtre, dont la fcéne avoit trois étages de hauteur, & étoit ornée de trois cents foixante colonnes. Le prémier étage de la fcé ne étoit tout de marbre: le fecond étoit entiérement incrufté d'une Mo. Laïque de verre, forte de magnificen ce inconnue jufqu'alors, & inufitée depuis. Le troifiéme & dernier étage étoit d'une boiferie dorée. Les colonnes du prémier étage avoient de hau teur trente-huit piés. Trois mille fta

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Les Romains creufoient des lacs immenfess qu'ils entouroient de bâtiments magnifiques. Plufieurs milliers de gla diateurs étoient obligés de combattre dans des galéres, & de représenter un combat naval.

Jules Céfar donna le premier [] cette forte de spectacle, & fit creuser un lac où l'on vit combattre des galé res de toute forte de grandeurs qui res préfentoient des flottes de Tyr & d'Egypte. Le peuple courut avec tant d'emer preffement à ce fpectacle, qu'il y cut plufieurs perfonnes étouffées, & entr'autres deux fénateurs. Toute la dé coration des théâtres [t]étoit quelquefois d'argent, d'autres fois le théâtre étoit couvert [#] d'or.

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feaux, il est toujours vrai de dire, que par la navigation il a ouvert des routes, que la nature avoit renduës impraticables.

Un Icare, du temps de Néron [z], aïant tenté un vol réel dans les airs, tomba après s'être élevé fort haut & fe tua. Son fang jaillit jufques fur l'empereur.

Jean Baptifte Dante de Péroule a volé, & s'eft café la cuiffe...

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Le même accident arriva à un homme de Calabre, dont Campanella [a] fait mention.

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Combien d'hommes élevés fur les ailes de l'orgueil, ou de l'opinion ont fait des chûtes encore plus funeftes!

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CHAPITRE DIXIE'ME.

Des Sens, & de l'Imagination.

SOMMAIRE.

A. Pythagore, Platon, & autres ons fontenu les idées innées. 2. Raifons de Proclus pour ce fentiment. 3. Réponse aux arguments de Platon & de Proclus. 4. Objections contre Lopi nion de Platon & de Proclus. 5. Seconde opinion: que nos ames produifent par elles mêmes les idées Troifieme opinion, que l'esprit confidere en lui-même, ce qu'il eft capable d'imaginer. 7.Opinions d'Abelard, du P. Benbours. 8. Opinion de Démocrite. 9. Système du P. Malle

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[z] Supt. in Ner.c.12.

[a Calaber paucis antè annis volavit, fed dam fiftere volatum cupit, crus

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branche. 10. Réponse à la principa

le preave du P. Mallebranche. 11.
Objections contre le fytéme du P.
Mallebranche. 12. Opinion de Def
Gartes. 13. Sentiment d'Ariftote.
1.4. En quelle fignification on ne dois
pas rejeter les idées innées.15.Exem-
ples des idées abftraites qui viennent
des fens. 16. Nos fenfations s'étendent
plus loin que notre entendement. 17.
Tours d'adreffe inconcevables. 18.
Lame ne reçoit de vives impreffions
des objets qu'à proportion qu'ils agif-
fent fur les fens, 19. Pourquoi no,
tre efprit eft peu propre aux scien
ces. 20. Defordre caufe dans les fen-
› fations. 21. Erreurs des fenfations.
22. Le cerveau le plus merveilleux
de touts les laboratoires. 23. Expli-
cation de la mémoire. 24. Differen-
ce de la mémoire, & de la rémini-
fcence. 25. Des habitudes. 26. Les
habitudes fe formant plus aifément
dans les enfants, 27.Origine du pé-
dantifme. 28. Mouvement machinal
des efprits animaux. 29. Industrie
néceffaire à l'ame pour exciter quel-
ques mouvements dans fon corps. zo.
Des combats des passions. 31. L'ha-
bitude plus forte que la nature, 32.
La bête dépourvnë de liberté ne peut
fe déterminer entre deux objets qui
l'attirent également. 33. Doutes au
fujes de la glande pinéale, & des ef-
prits animaux. 34, Il n'y a point
de relation entre les fens. 35. Probli-
me de Locke 36. Raisons contre la
folution du probléme. 37. Les fems qui
manquent, fuppliés par une plas
grande fagacité des autres 38.
Moien d'apprendre la musique à n
M 2

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fourd. 39. Facultés des fens fort iné gales. 40. Les fens ne connoiffent pas les chofes en elles-mêmes. 41. Variations dans le fens de la visë. 42. Effets du microfcope. 43. Différentes illufions de la vue par les miroirs. 44. Plufieurs caufes trompent les fens. 45. Les paffions altérent ou fufpendent les fens. 46. Nous ne fça vons fi le nombre des fens eft complet. 47. Opinion du P. Mallebranche fur les corps. 48. Certitude des fens fuivant quelques philofophes. 49. Des illufions de l'imagination. 50. Effets de l'imagination. 51. L'imagination des anciens paroît avoir été plus fufceptible des violentes impreffions. 2. Effets du dialogue de Phadon: 53. Des leçons philofophiques d'Hégéfias 54. Des Eumenides d'Efchyle. 55. De la mufique des anciens. 56. La danse eft appellée une poësie muette. 57. Ballet de Meffaline. 58. De la Cheironomie. $9. D'un Pantomime du temps de Néron.

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Es fens, & l'imagination ont des

traiter féparément. Ce font les fources de toute opinion. Les philofophes ne peuvent même convenir entr'eux, fi les fens & l'imagination doivent être regardés, comme deux principes de nos opinions diftincts & féparés, ou comme un feul & même principe: c'eft à-dire, fi l'entendement peut produi. re par lui-même quelque idée, ou s'il

n'en a aucune, qui ne lui ait été tranfmife par les fens [a]. Cette queftion fe rapporte doublement à l'hiftoire de l'efprit humain, foit parce qu'elle est elle même un exemple de variété & de la bizarrerie de quelques opinions phtlofophiques, foit parce qu'elle tend à déméler l'origine.des opinions, autant que la foibleffe de l'efprit humain le peut permettre.

autres on:

nées.

Pythagore, Timée, Socrate, Pla- Pythagore ton, & toute l'Académie ont foute- Platon, & nu que nous apportions en naiffant foutenu les nos idées, & qu'elles étoient nées avec idées innous, & au dedans de nous. Platon dans plufieurs des fes dialogues fonde cette doctrine, fur ce que l'entendement humain ne pourroit ramaffer & concevoir cette variété innombrable de notions, qu'il eft capable de fe repréfenter, pendant un temps aufli borné, & auffi court, que celui pendant lequel il a l'ufage des fens matériels, furtout étant enveloppé & appefanti par la maffe de notre corps;qu'il faut donc qu'il ait apporté ces notions déja produites, & formées en lui; ce que Platon confirme par l'expérience, con

n'apprenons pas ce qu'on nous enfeigne, & que nous ne faifons que nous en fouvenir.

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aux argu

Platon &

vérité eft reconnue par touts les hommes, & dans touts les fiécles, que des idées fi fixes, & fi conftantes ne peuvent tirer leur origine des fens, qui font foibles & fujets à l'erreur, que c'eft renverfer l'ordre des chofes naturelles & élever la matiére au deffus des fubftances fpirituelles, que de prétendre, que l'entendement reçoive toutes les

- idées des chofes fenfibles.

Les philofophes, qui tiennent un fen. Réponse timent oppofé, réfutent ces arguments ments de de Platon & de Proclus, en difant,qu'au de Proclus. lieu de furcharger l'entendement humain d'un travail auquel la vie ne puiffe pas fuffire, c'eft faciliter les opérations, que de lui fournir dans les chofes fenfibles & matérielles l'origine de toutes fes idées; que la prétendue réminifcence alléguée par Platon, eft une chimére; que les idées éternelles & immuables, non plus que celle de l'infini, ne font Foint incompatibles avec la foibleffe des fens, comme on l'expliquera bientôt; que fi nos fens font foibles, nos idées font informes & confufes; qu'il n'y a aucun renversement de l'ordre naturel dans l'hypothéfe qui attribuë aux fens l'origine de toutes fes idées; que c'eft au contraire par l'exemple des chofes fenfibles & matérielles, que l'entendement eft inftruit à maintenir & à conferver chaque fubftance dans la prérogative de dignité & de prééminence, qui lui appartient.

Objections

raton, &

Ces philofophes, après avoir réponcontre l'o du aux arguments de Platon & de Propinion de clus, combattent leur fentiment par de Proclus. Ces objections, que c'eft véritablement accabler les facultés de l'entendement, que de les furcharger de ce nombre infini d'idées créées en même temps que lui qu'il apporte envenant au monde,& qui lui font continuellement inhérentes; que cette hypothéfe eft deftituée

de toute vraisemblance; car quel ufa. ge l'ame peut-elle faire de ce magasin infini d'idées? y puifera-t-elle au hazard? elle ne rencontrera pas l'idée qui fe rapporte aux impreffions, que les fens font en même temps fur elle; & lorfqu'un loup fera préfent, elle imaginera un moulin, ou toute autre chofe. L'ame choifira-t-elle dans ce magafin infini l'idée qui fe rapporte à la fenfation qui fe fait en même temps en elle? mais comment reconnoîtra-t-elle entre tant d'objets, celui dont elle n'a encore aucune idée ? C'eft un cercle d'erreurs, qui ramène à la même difficulté.

S. Seconde 0

nos ames

mêmes les

Le même vice de raifonnement eft objecté à la feconde opinion, qui con- pinion que fifte à dire, que nos ames ont la puif- produitene fance de produire par elles-mêmes, & par ellesde créer, pour ainfi dire, leurs idées. idées. Car il n'arriveroit prefque jamais, que les idées produites par un entendement, fe rapportaffent ni à la fenfation préfente, ni aux idées d'un autre entendement: & comme un peintre, quelque habile qu'il foit dans fon art, ne peut repréfenter un objet qu'il n'aura jamais vû, & dont il n'a aucune idée, en forte que le portrait qu'il voudroit en faire, ne peut être semblable à cet objet inconnu; ainfi l'ame ne peut pas former l'idée d'un objet qui fe préfente à fes fens, à moins qu'elle ne le connût auparavant, c'est-à-dire, qu'elle n'en eût déja l'idée. Que fi elle en a déja l'idée, il lui eft inutile d'en produire une nouvelle, & il refte la même difficulté de fçavoir quelle a été l'origine de cette prémiére idée.

confidere

Une troifiéme opinion eft que l'ef Troifiéme prit confidére en lui même tout ce qu'il opinion eft capable de concevoir & d'imaginer. que l'efprit Cette explication paroît à la plupart en lui-mêdes philofophes, encore plus frivole, eft capable s'ilfe peut, que les précédentes. H d'imaginer.

me ce qu'il

7.

d'Abelard,

hours.

faudroit, pour qu'elle cût lieu, que l'entendement contint touts les êtres, & que fa capacité renfermât tout ce ,qui eft intelligibile. Le fentiment inté rieur de l'entendement, qui connoît fa foibleffe & fes bornes, ne lui permet pas de s'attribuer une étendue fi vafte, nirien quien approche.

lité de fubftances réelles & animées, puifqu'elles nous font éprouver leurs effets utiles ou nuifibles; que quelquesunes font fi étendues, & fi vaftes, qu'elles renferment le monde entier. C'est ce que Cicéron appelle un galimathias plus digne de la patrie [d], que de l'efprit de Démocrite.

Bayle dit [e] que le fentiment du P. Mallebranche, n'eft qu'un développement, & une réparation du dogme de Démocrite. Il déligne le P. Mallebranles che par l'un des plus fublimes efprits du fiècle, qualité qui lui appartient à très jufte titre.

Abelard fe fondant fur les paroles Opinions de faint Paul, qui portent que nous & du P.Bou-Voions par un miroir en cette vie,a fait de cette expreffion de l'apôtre une hypothéfe finguliére, difant que touts les hommes ont un miroir dans la tête; que les efprits fubtils ont un miroir fort é clatant & fort net, qui leur repréfente diftinctement les objets; au lieu que les efprits groffiers ont un miroir tout terni, où les idées ne font tracées que confufément. Le pére Bouhours [b] tâ che de donner quelque air de vraifemblance à cette opinion, en ajoutant qu'Abelard a voulu dire, que la bile mélée avec le fang forme dans le cerveau une efpéce de glace polie & luifante, à laquelle la mélancholie fert comme de fond. Il feroit difficile de décider, quel eft le plus bizarre du texte, qu du commentaire.

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Syftéme du

branche.

Le fyftéme du P. Mallebranche [f], eft que notre ame n'apperçoit rien qu'en Pére Malle Dieu; d'où il fuit, que les idées de nos ames font des portions de la fubftance infinie de Dieu, en tant qu'elle eft intelligible. Le P. Mallebranche ajoute, que nous ne voions pas notre ame en Dieu, ce qui fait, que nous n'en avons point d'idée, & que nous ne la connoiffons, que par la confcience; que nous ne pouvons pas voir tout ce qui eft en Dieu qu'il eft impoffible, par exemple, à un aveugle-né, de voir en Dieu les couleurs; que fi nous pouvions . tout voir en Dieu, nos connoiflances fetoient générales & indéfinies; que nous ne voions donc en Dieu, que 10. les objets, qui font impreffion fur Répanfe nos fens.

la principa le prenve

La plus forte preuve du P. Malle- du P. Mal branche eft, que l'infini ne peut être lebranche

[b] Le Pére Bouhours, entret, d'Arifte d'Eugéne, du bel efprit.

[] Tùm cenfet (Democritus) imagines divinitate præditas ineffe univerfitati rerum tùm principia, mentefque quæ funt in eodem univerfo, deos effe dicit: tùm animantes imagines, quæ vel prodeffe nobis folent vel nocere: cùm ingentes quafdam imagines tantafque

univerfum mundum complectantur extrinfecus. Quæ quidem omnia funt patriâ Democriti, quàm Democrito digniora. Cic. de nat deor. lib. 1,

[d] La patrie de Démocrite était Abdére fort décriée pour la ftupidité de fes habitants. [e] Bayl, diet, crit. not. O fur Démocr. [f] Recherch. de la vérit, liv. 3.part. 2. ch 7.

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