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53. Des leçons

, ap

la trente,troifiéme Olympiade
paifa une fédition à Lacédémone par
la mufique.

Cicéron [o]nomme un certain Cleombrotus, qui n'aiant éprouvé aucune adverfité, fe précipita dans la mer, par l'effet feul de la lecture de ce traité de Platon. Les fouverains philofophi d'aujourd'hui n'auroient aucune apques d'Hé- préhenfion, que la morale d'un Hé, géfias,appellé l'orateur de la mort,leur enlevâr leurs fujets en foule, comme autrefois. Prolémée en eut de l'inquié tude, & fut contraint d'interdire tout enfeignement à ce dangereux philofopher.

gelias.

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Agamemnon partant pour Troie, laiffa près de fa femme Clytemnestre [r] un musicien; auquel il étoit très expreffément recommandé de ne pas fortir du mode [s] Dorique. Pendant la vie de ce muficien, Egyfthe attaqua vainement la chafteté de cette reine; mais à peine le muficien fut-il mort, qu'elle écouta une paffion, qui la précipita dans les plus affreux forfaits.

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La danfe étoit plûtôt un amufe- La danse ap
ment de l'imagination, que des yeux. pellée une
Simonide l'appelle une poëfie muette. Poëfie muet-
Longus [] décrit une danfe de Pan-
tomimes, qui imitoient les vendan-
geurs, ceux qui portent la hotte,
ceux qui foulent les raifins, ceux qui
empliffent les tonneaux, ceux qui
boivent le vin doux.

Mellaline dans la faifon des ven-
P 2

57. Ballet de Meffalline.

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[p]Le théatre des Grecs, du pére Bru-
moi, t. 2. p. 208.

[q] Plutarch. de muficâ.
[r] Hom. Odyff. y. v. 266.

[s] Le mode Dorique étoit propre à calmer
& modérer les paffions; le Phrygien au con-
traire étoit impétueux, convenable à la guer-
re & aux combats, capable de transporter

de ravir Fefprit hors de foi, le Lydien peu approuvé par Platon, comme trop aigu, fer. voit aux paffions les plus vives à la d'anfe le Mixte-Lydien, dont l'invention eft at

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tribuée à Sappho, étoit emploïé pour émou-
voir la pitié, & exprimer les fentiments
triftes plaintifs Apulée fait une au-
tre diftinction de la musique ancienne
en cing fortes des chants; TEolien fimple:
Afiatique diverfifié; le Lydien lamentable;
le Phrygien belliqueux; & le Dorique gra-
ve. Apul. floridor. lib.x.

Les anciens ont encore divifé la musique
en Harmoniques Chromatique Diatoni
que. La prémiére efpéce écoir la musique la
plus travaillée & la plus difficile; elle fervois
à exprimer les mouvements les plus vifs de
la poësie dramatique, comme celle qui pou-
voit agir le plus puissamment fur l'imagi
nation. La Chromatique étoit la plus ten-
dre la plus douce, elle fervoir aux poë-
fies lyriques avec l'accompagnement des flut
tes. Par la Diatonique, on entendoit la
plus mále & la plus fimple, elle fervois
aux recitatifs.

[r] Longus dans fes paftorales, liv,2.

58.

ronomic.

danges [x] danía un ballet autour des représentations des preffoirs & des ruif feaux de vin, dont fon palais étoit rempii. Une troupe de Bacchantes ceintes de peaux de tigres, paroiffoit troublée par l'yvreffe. Meffaline au milieu de ces femmes, armée d'un thyrfe, les cheveux bouclés & flottants fur les épaules, avoit à côté d'elle Silius couronné de lierre.

Les anciens avoient une efpéce de De la Chei- danfe, appellée Cheironomie [x], qui confiftoit dans les geftes & dans les mouvements des bras & des mains [y]: un pareil spectacle nous paroîtroit bien froid.

Jamblique [z] rapporte que la Cheironomie étoit un des exercices des Pythagoriciens.

Juvénal [4] dit de Bathylle: Lorf que le gracieux Bathylle exprime dans une Cheironomie l'hiftoire de Léda; & ailleurs [b] if fait mention d'un écuïer tranchant, qui danfoit en fer vant fur table, & qui exerçoit une efpéce de Cheironomie, en coupant les viandes avec tant d'adreffe, & de légéreté, qu'il fembloit faire voler le couteau dont il fe fervoir.

Cette efpéce de danfe eft décrite par [c] Caffiodore dans ce paffage: On ajoû ta les mains parlantes des acteurs, leurs doigts expreffifs, leur filence éloquent,' leur langage muet, inventions de la mufe Polymnie, qui a montré, que les hommes pouvoient manifefter leurs penfées fans l'organe de la voix.

D'un panto

Néion.

Un Pantomime du temps de Ne.› 59. ron [d] avoit fi bien représenté par mime da fa danfe & par fes geftes, l'hiftoire temps de de Mars & de Venus furpris & en-1 chaînés par Vulcain, qu'un prince de Pont, qui étoit à la cour de Néron, lui demanda ce danfeur, ajoutané qu'il avoit des voifins, qui parloient une langue inconnue, & que ce Pantomime feroit le meilleur de touts les interprétes, pour fe faire entendre d'eux.

C'eft à caufe de l'impreffion que la mufique & la danfe font fur l'imagination, que Platon [e] ordonne qu'elles foient examinées par les confervateurs des loix. Chacun doit être fon cenfeur particulier, & veiller avec foin à écarter tout ce qui eft capable de féduire fon imagination, & d'y introduire l'erreur.

[] Meffalina non aliàs folutior luxu, adulto Autumno, fimulachrum vindemia per domum celebrabat. Urgeri præla, fluere lacus, & fœminæ pellibus cinctæ affultabant, ut facrificantes vel infanientes Baccha. Ipfa crine flexo, thyrfum quatiens, juxtaque Silius hederâ cinctus gerere cothurnos, jacere caput, ftrepente circùm procaci choro, Tac. annal, lib. 11.

[x] Suid, in voce. Xelpovojesiv.

Ey] Kai auros indar aixafe, wpXsμm μὲν ν ν γὰρ πώποτε τετ' ἐμαθιν. ἐλειρινό μεν δε, ταυτα γὰρ ἡπιςάμην. Etant de retour au logis, je ne dan(ai pas à la verité, ne l'aïant jamais appris; mais je mis à gefticuler des mains, car c'étoit un exercice, dont j'étois inftruit. Xenoph, in fympof.

[z] Jamblich. in Pythag.

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[a] Chironomon Ledam molli faltante Bathyllo, Juven, fat. 6.;

[b] Structorem intereà, ne qua indignatio defit,

Saltantem fpectes, & Chironomounta volanti

Cultello, donec peragat mandata magiftri

Omnia. Juven. fat. 5:

[] His funt additæ.orchiftarum loquaciffimæ manus, linguofi digiti, clamofum Glentium expofitioracita, quamnu fa Polymnia reperiffe narratur, oftendens homines poffe & fine oris affatu velle fuum declarare. Caffiodor. lib. 4. epift 51, [d] Lucien, de la danfe. [e] Plat. de legib. lib. 7...

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117

LIVRE CINQUIÈME.

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t

DE LA

POLITIQUE.

CHAPITRE PREMIER.

Des différentes fortes de
gouvernements sro
do

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SOMMAIRE.

1

1. Les opinions politiques font partie de
Thiftoire de l'efprit humain. 2. Com
bien de différentes espèces de gouver

25

nements. 3. De la Démocratie. 4. De
Ariftocratic. Du gouvernement de
l'ancienne Rome. 6. Du gouvernement
mixte.7. De's Amphyctions.8, Dugon-
vernement defpotique. 9. De la monar
ebie elective, de l'hereditaire.io. De
la monarchie en general. 1 1. Du gou-
vernement de France. 12. Desparle
ments. 13. Des états generaux.

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とい

OUTS les philofophes célébres[Jont regardé la politique comme une des branches[b] de la philofophie. C'est l'objet le plus etendu & les plus important de la fagelle humaine. On ne doit donc

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pas être étonné de rencontrer dans un
même ouvrage les fables débitées par
les anciens Naturaliftes,ou les illufions

desfciences occultes, avec des differta-
tions fur ce que les fociétés des hommes
ont de plus augufte: l'hiftoire de l'esprit
humain comprend des fujets fi éloignés
les uns des autres.:

Nous examinerons dans ce chapitre
les différentes opinions fur les gouverne
ments, & ce que l'efprit humain a in-
venté & pratiqué en ce genre. Autant
que les avantages de toute une fociété
d'hommes l'emportent fur ceux d'un
particulier, autant la politique excelle
au deffus des autres fciences; mais il n'y
en a aucune où il fe foit introduit des
abus fi pernicieux, & dont les maximes
aient été fi corrompuës.

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περὶ μοναρχίας
La Pythagore, Platon, Ariftote, Ciré-re, Thalles dans Plutarq. wiel povapias by
rin Albert le grand, Jaint Thomas, Gr. ont δημοκρατίας και όλιγαρχίας, dans Agrippa,
y
traite de la politique
de vanitate fcientiarum, cap. 55. dans Puf
fendorf, du droit de la nature des gens, liv.
&
ch
7 5. dans Denys d'Halic, liv. 4. dans Dion
Caffius,liv.52 dans Hobbes, de imperio,cap 10.

[6] Cum tertia pars philofophiæ præcepta quæreret, non folùm ad privatæ vitæ rationem, fed etiam ad rerum publicarum rectionem relata Cic de finib. lib. 5.

[] La question des différentes formes de gouvernements fe trouve traitée dans Hérodo

in Leviath c. 19.dans Bodin, républ. p.7 13. dans Barclai, Argenis liv. 1. c.

.

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nation repréfentée par des députés, qu'elle choifit & qu'elle change à fon gré, & aufquels elle donne tel pouvoir qu'elle juge à propos,comme en Hollande, l'état eft [d] Démocratique. Lorfque l'autorité fouveraine eft exercée par les plus nobles & les plus puiffants citoïens, qui tiennent leur autorité de leur naissance, de leurs richeffes, ou de quelque autre distinction indépendante du choix du peuple, comme à Venife, l'état fe nomme Ariftocratique. Lorf que l'autorité toute entiére & la plénitude du pouvoir légiflatif réfide dans le monarque feul, en forte néanmoins que ce pouvoir abfolu foit un pouvoir pas ternel, qui doit fe propofer l'avantage des fujets, & qui eft tempéré par l'obi fervation des loix fondamentales de l'état, & des formalités anciennes, obliga. tion dont le monarque n'eft comptable qu'à Dieu, comme en France, le gou vernement eft pur Monarchique. Lorf que l'autorité eft totalement feigneu riale,qu'il n'y a d'autre relation du Souverain à fes fujets, que celle d'un maître à des efclaves, que la propriété des biens appartient au Souverain, & qu'il peut difpofer de la vie des fujets, fans y être autorifé par des motifs de juftice, le gouvernement eft Defpotique, com me en Turquie. Enfin lorfqu'il y a dans l'état plufieurs puiffances, qui ne font pas entiérement fubordonnées à une au,

[d] Démocratique est tiré des mots Grecs Shuoc, peuple, & paros, puissance. Arifto cratique, du mot Grec äetam, qui excellent, & du méme mer κράτος. Monarchique,de μόνος Seul, & apkn, commandement. Defpotique, du mot Grec, Sardens, maitre.

[] Bodin, de la républ. liv 2.

[f] Nam cunctas nationes & urbes populus, aut primores, aut finguli regunt. Tac, annal. lib. 3.

[g] Quidquid fcrutere, nec cœtum aliquem jocialem, fine ullâ harum forma.

torité unique, & dont le concours eft néceffaire pour faire & pour changer les loix, comme en Allemagne, le gou vernement eft mixte.

Bodin foutient [e] qu'il n'y a que trois fortes de gouvernements; & c'est auffi l'avis de [f] Tacite & de Jufte [g] Lipfe. Bodin met au nombre des Démocraties tout gouvernement appellé Mixte, fe fondant fur ce que dans ces gouvernements, la nation ou le corps qui la représente a la fouveraine autorité. Mais ce principe n'eft pas fans exception. En Pologne, par exemple, Pautorité eft partagée entre le roi & la nobleffe,& non-feulement le peuple n'a pas une autorité fupérieure, mais il n'entre même en aucun partage de l'autorité.

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La diftinction du gouvernement Monarchique & du Defpotique n'eft pas généralement admife. Plufieurs ne reconnoiffent qu'une espece de gouvernement monarchique, qui dégénére en tyrannie, fi les loix y font enfreintes ils foutiennent que l'abus d'un gouvernement n'en conftituë pas une efpéce différente, à moins qu'on ne veuille auffi diftinguer l'Ochlocratie [h] du gouvernement Democratique, & l'Oligarchie [] du gouverne ment Aristocratique; mais cette opinion me paroît mal fondée, car la tyrannie, ou l'abus de quelque gouvernement que ce foit ne furent jamais

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1113

1 :、 8

rum reperies, nec in eo aliam præter iftas. Mifcentur inter fe, fateor, & remittuntur aut intenduntur; fed fic ut propendeat & præponderet femper aliqua pars, à quà jure ei nomen Juft. Lipf. politic. lib.2.c.z. [b]Ochlocratie vient du mor Grec OЯos, qui fignifie la confufion d'une populace.

[i] Oligarchie eft dérivée du mot Gree iyo quifignifie un perit nombres comme lorfque les Triumvirats dépouilloient le fénat Romain de l'autorité qui lui appartenoit.

4

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autorifés par la conftitution même du gouvernement, ni reconnus comme légitimes, au-lieu que dans les roïaumes d'Orient & d'Afrique, le Defpotifme eft fondé fur la perfuafion générale des peuples, que tout appartient en propre à leurs fouverains, & qu'il a droit de difpofer de leurs vies fans autre motif que fa volonté.

Il eft vrai que fous le gouvernement monarchique, nul ne peut réfifter au roi, mais s'il abufe de la vie & des biens de fes fujets, s'il détruit les loix fonda-: mentales, il ne viole pas moins tours les principes du gouvernement, quoique fes fujets ne foient pas les juges ; & que par conféquent ils ne foient pas en droit de fortir de la foumiffion, & de lui oppofer la force. L'infraction des loix fondamentales ne peut durer qu'autant de temps que dure la violence, ou tout au plus pendant la vie d'un roi qui n'eft qu'ufufruitier de fa couronne. Legouvernement Defpotique n'a aucunes maximes femblables. Les principes de ces deux gouvernements font donc effentiellement très différents, & même encore plus oppofés entr'eux, que ceux des trois efpéces de gouvernement qui font admifes par touts les philofophes, politiques, ou jurifconfultes.

Les hommes n'ont pû imaginer aucune forme de gouvernement qui ne se rapporte à l'une des cinq que je viens d'expliquer. Aucune d'elles n'eft exempte de touts inconvenients & de touts dangers: il eft ordinaire aux hommes de régler leurs opinions à ce fujet fur les préjugés de leur naiffance & de leur éducation: & c'eft la feule matiére où il leur foit avantageux de fe déterminer par des préjugés.

[k] TraduƐt, du P.Brumoi, dans le théatre des Grees, t. 2. p. 540.

[1] Thésée en conformité de ces fentimens,

Aime l'état tel que tu le vois être';
S'il eft roïal, aime la roïauté;
S'il eft de peu, ou de communauté,
Aime l'auffi, quand dieu t'y a fait naître.

Mon deffein n'eft pas d'attaquer cette diverfité d'opinions. Mais lorsqu'on eft une fois bien convaincu de ce principe, que tout homme doit avoir la foumiffion la plus fidelle pour le gouverne ment légitime qu'il trouve établi,il n'est pas défendu, il eft utile même d'examiner, fans aucun deffein d'innovation ou de défobéiffance, ce que que chaque gouvernement peut avoir de bon & de défectueux: & rien ne peut contribuer: davantage au bien public dans chaque fociété, qu'une connoiffance parfaite de la nature de fon gouvernement,qui engage également toute forte de magiftrats au bon ufage de leur autorité, & touts les fujets à l'obéïffance.

Dans les fuppliantes d'Euripide, le député de Thébes [k] difpute contre Théfée, fur les avantages de l'état Monarchique & du républicain.L'envoïé commence; il infifte fur le choix des magiftrats d'une Démocratie, qu'il compare à un coup de dez; fur l'abus de l'éloquence, qui tourne l'efprit des citoïens comme il lui plaît, & qui les fait paffer du blanc au noir;fur l'aveuglement d'une multitude inconfidérée, enfin. fur l'adreffe des méchants à s'élever aux prémiers emplois. Il eût été peu fûr pour Euripide de faire l'objection plus forte, & d'emploïer des traits plus marqués.

Thérée déclare (que rien ne lui paroît plus pernicieux que le gouvernement Monarchique; que les loix fe taifent fous un fouverain, au-lieu qu'elles parlent également en faveur du pauvre & du riche dans un gouvernement Dé

fe démit de l'autorité fouveraine, qu'iltransfera au peuple.

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De la Dé

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