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CHRISTIAN HUYGENS

Christian Huygens Van Zuylichem appartenait à une des familles les plus distinguées de la Hollande. Son père, Constantin Huygens, seigneur de Zuylichem, conseiller secrétaire des, princes d'Orange, était tout à la fois mathématicien et poëte. Sa mère, Suzanne Van Haerle, sortait aussi d'une famille noble. Son grand-père, Camille Huygens, littérateur et homme d'État, était un gentilhomme du Brabant. Les talents, la noblesse et la fortune semblaient héréditaires dans la famille de Christian Huygens. Il eut, en outre, le bonheur de venir au monde dans un siècle où une foule de découvertes nouvelles et de vastes conceptions, allumaient, en quelque sorte, le feu du - génie chez les hommes déjà disposés par la nature à produire. de grandes choses.

« Les vues de Descartes, dit Bailly, furent une occasion de progrès et une source de lumière. On a beau s'élever contre les systèmes, c'est par eux que nous avançons, c'est par eux que les pas sont doublés dans la carrière des sciences; il en naît souvent des guerres; mais dans l'histoire de l'humanité, c'est le seul cas où les guerres soient utiles. Les esprits, en se heurtant, produisent des étincelles qui éclairent les combattants. On observe, on raisonne, soit pour attaquer, soit pour défendre; les observations s'accumulent, et la raison se perfectionne (1). »

Le père de Christian, homme fort instruit et écrivain de mérite, voulut diriger lui-même l'éducation intellectuelle et

(1) Histoire de l'astronomie moderne, liv. V.

T. IV.

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morale de son fils. On lit dans la biographie latine placée en tète des œuvres de Huygens:

Christian Huygens passa sa vie entière dans les études mathématiques, non pas exclusivement livré aux parties purement spéculatives de la science, mais occupé aussi à rapporter aux usages de la vie ce que les théories ont de plus délicat. C'est à ce genre d'étude qu'on le vit s'appliquer, dès son enfance, ayant à peine atteint l'âge de neuf ans. On le vit, sous la direction de son père, faire des progrès étonnants dans la musique, dans l'arithmétique, dans la géographie, et, en même temps, étudier avec application les lettres grecques et latines (1). »

Par l'attention persévérante qu'il donnait à des machines qu'il tachait d'imiter aussi exactement que son àge le permettait, il montra, à l'âge de treize ans, combien son génie était propre à la mécanique, science à laquelle il se livra par la suite avec tant de succès (2).

A l'âge de quinze ans (en 1644), il aborda l'étude des mathématiques. Il eut pour professeur dans cette science un mathématicien belge, nommé Stampioen. Ce Stampioen pouvait n'être, comme Descartes le fait entendre, qu'un médiocre mathématicien, sans être cependant tout à fait dépourvu de mérite comme professeur; car, au point de vue de l'enseignement, ce qui importe, c'est bien moins la grande érudition que l'excellence de la méthode. Le docteur Hoefer aurait pu, dans son article biographique sur Huygens (3), s'abstenir, sans inconvénient, de parler du témoignage peu favorable laissé par Descartes sur Stampioen. A la vérité, dans l'article (signé Maurice) de la Biographie universelle de Michaud, il est fait également mention de l'opinion défavorable exprimée par Descartes sur Stampioen; mais le rédacteur, plus équitable, ajoute que ce professeur fit faire en peu de temps de grands progrès à son élève. On sait, d'ailleurs, que Descartes, dans des moments d'humeur, était quelquefois prompt à por

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(1) In studiis mathematicis integram consumpsit vitam, non tantum speculatio nibus deditus, sed harum disciplinarum subtilissima ad vitæ usum referens. Ab ipsa infantia huic studio applicavit animum; vix natus annos novem, ipso patre duce, in musicis, arithmeticis, geographicis, miros et vix credibiles progressus fecit, latinis et græcis litteris interim animum applicans. (Hugenii via, Opera varia, t. Ier.)

(2) ◄ Anno ætatis decimo tertio, quum ingenium studio mechanices esset aptum, quod tanta deinde hominum utilitate excoluit, in examinandis machinis, has que, quantum infanti liceat, initando demonstravit. >>

(3) Nouvelle biographie générale de Firmin Didot.

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ter contre ses adversaires des jugements défavorables, mais sur lesquels il revenait facilement, quand on lui montrait qu'il s'était trompé. C'est ce qui lui était arrivé à l'égard de Fermat, et le grand géomètre toulousain avait alors répondu : M. Descartes ne saurait m'estimer si peu, que je ne m'estime encore moins (1). Lorsque Descartes connut mieux Fermat, il lui écrivit qu'il honorait extrêmement son mérite, et qu'il avait reçu avec joie la lettre par laquelle le mathématicien de Toulouse lui faisait la faveur de lui promettre son amitié. »

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Si Descartes eût pu mieux connaître Stampioen, peut-être eut-il trouvé que le mathématicien belge était, sinon un grand géomètre, du moins un habile professeur. Tous les savants dont les noms sont restés dans le domaine de l'histoire doivent être jugés avec une égale impartialité. Mais revenons à Huygens.

A l'âge de seize ans, il fut envoyé à l'Université de Leyde. Là il suivit le cours de Vinnius sur l'explication du droit civil, tout en continuant, sous le professeur Schoten, ses études mathématiques. Il donna dès lors la preuve qu'il était né avec un génie capable de se plier aux études les plus variées, car bientôt il acquit, parmi les mathématiciens, une réputation bien au-dessus de son age (2).

Il suivit aussi, pendant les années 1646, 1647 et 1648, des cours de droit à Bréda (ville des Pays-Bas), profitant des avantages que lui offrait une école nouvellement instituée et déjà célèbre, dont la direction avait été, en partie, confiée à son père, Constantin Huygens.

L'année suivante, c'est-à-dire en 1649, il retourna à La Haye, d'où il partit bientôt, pour suivre le comte de Nassau, chargé d'une mission politique. Il visita, avec ce diplomate, le Holstein et le Danemark. Son grand désir eût été de continuer sa route jusqu'en Suède, pour voir Descartes, qui s'y trouvait alors; mais cela lui fut impossible, parce que le comte de Nassau,

(1) Lettre au P. Mersenne.

(2)« Sequenti anno Academiam petiit quæ Leidæ est apud Batavos. Ibi Vinnium jus civile explicantem audivit, et magistro Schotenio studium matheseos continuavit, ingeniique ad hæc studia nati varia tunc temporis dedit specimina, brevique famam inter mathematicos, annos superantem, acquisivit. (Hugenii vita.)

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