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des bollandistes modernes, consacrant ainsi l'apostolicité d'une Église qui « renoue la chaîne de ses pasteurs à saint Pierre, et présente un arbre généalogique dont les racines plongent dans les plaies du Sauveur. »> M. DE LA ROCHeterie.

Nos lecteurs ont encore présentes à l'esprit les pages émues et touchantes que M. le comte de Falloux a consacrées, il y a quelques mois, dans le Correspondant, à la mémoire de M. Cochin, et il n'en est pas un, nous en sommes persuadé, qui ne se soit proposé de les relire. Nous avons donc l'assurance de leur faire plaisir en leur annonçant qu'elles viennent d'être réunies en volume sous le titre même où elles ont paru ici : Augustin Cochin (1 vol. in-12, avec portrait. Paris, librairie Didier). Du reste, cette étude reparait telle qu'elle a été publiée à l'origine, l'auteur n'ayant pas trouvé dans les attaques passionnées dont elle a été l'objet, de motifs suffisants pour y rien changer.

M. le comte de Carné va publier à la librairie Douniol, sous le titre d'Étude sur la vie et les œuvres de M. de Chateaubriand, les deux articles de lui qui ont paru ici le mois dernier. Sa santé, en voie de rétablissement, lui a permis de donner tous ses soins à la réimpression de ce travail remarquable, où se trouve apprécié pour la première fois, avec une haute et sérieuse équité, un homme qui avait été jusqu'ici loué et critiqué sans mesure.

QUINZAINE POLITIQUE

9 novembre 1874.

Le retour de l'Assemblée est prochain, et au-devant d'elle volent mille questions haletantes. Des élections se sont faites dans le Pasde-Calais, le Nord, l'Oise et la Drôme : ce sont des duels où chaque coup touche aux destinées mêmes de la France; aussi les a-t-elle observés avec une attention passionnée. Enfin, tandis que les conseils généraux finissent leur œuvre, partout se prépare, avec une fièvre singulière, le renouvellement des conseils municipaux. Or, à tous ces signes d'activité et d'inquiétude, il faut bien reconnaître que, si notre pays a paru se reposer quelques mois, il sent aujourd'hui que déjà ce repos a cessé.

On ne saurait nier que, depuis un an, la loi ne règne un peu plus souverainement dans les conseils généraux : ceux mêmes qui supportent mal son empire sont moins hardis à la violer; ce n'est plus cette ingénieuse émulation d'autrefois, qui leur enseignait tant de sophismes et de ruses pour lui désobéir; et le gouvernement, pour sa part, ne les favorise plus de sa complaisance. Toutefois, on a pu remarquer avec quel empressement jaloux les radicaux se sont hâtés d'enfreindre la légalité, partout où les élections du 4 octobre leur avaient donné la victoire, et, pour la première fois, l'avantage de la majorité faire des vœux illicites, étaler leurs doctrines, jeter des défis à l'Assemblée, c'était pour eux comme un plaisir d'ostentation: ces discours et ces actes illégaux, on eût dit des prémices qu'ils se hâtaient d'offrir à la démocratie. Il n'y a guère eu quelque sagesse que là où les radicaux ressentaient un peu de crainte : dans les Bouches-du-Rhône, par exemple, M. Labadié n'a-t-il pas daigné inaugurer pacifiquement les travaux du conseil sans proclamer la république? Mais, pendant cette session, le trait principal de leur conduite, ç'a été l'injustice systématique des annulations par les

quelles ils ont invalidé, partout où ils avaient la puissance du nombre, les élections des conservateurs: on l'a surtout constaté dans l'Allier, dans l'Hérault et dans la Côte-d'Or; et, par cet abus du nombre, ils n'ont pas seulement attesté de nouveau leur goût de l'arbitraire, leur brutal despotisme, leur dédain du droit, leur méconnaissance de la liberté ; ils ont aussi permis de contester la bonté de cet article 16 de la loi de 1871 qui autorise les conseils généraux à vérifier leurs pouvoirs, sans qu'il y ait recours contre leurs décisions.

Les élections des conseils municipaux se feront le 22 novembre. On se rappelle que ceux d'aujourd'hui furent formés à l'heure douteuse où la Commune, entourée de feu et de sang, prétendait que chacun d'eux fût le sénat d'une république indépendante, l'un des trente-six mille gouvernements de la France. Cette folie, qui eût si vite été le meurtre de notre patrie, n'est plus, par bonheur, qu'un odieux souvenir. Mais on le sait bien les incertitudes du temps, la confusion des choses, les disputes et les ambitions de nos partis, sont telles actuellement que ces élections ne sauraient s'accomplir sans une sorte de bouillonnement des esprits dont les radicaux essayent de profiter sous un gouvernement provisoire, aucune élection ne peut, en effet, s'opérer dans les conditions d'ordre et de paix qui lui sont spéciales et qu'impose de lui-même un gouvernement régulier et définitif. Quoi qu'en dise M. Picard, on avait le droit de choisir pour ces élections une date antérieure à celle du jour où se réunira l'Assemblée; une loi n'a-t-elle pas déterminé l'électorat municipal, et n'est-ce pas assez pour composer les conseils municipaux, quelques fonctions d'ailleurs qu'on leur doive attribuer plus tard? On a eu raison aussi : car quel n'eût pas été le trouble de ces élections, s'il avait fallu les effectuer pendant ces débats constitutionnels, d'avance si orageux, où l'Assemblée peut se déchirer, et le gouvernement rester dans le vide, au milieu de partis irrités et soulevés l'un contre l'autre ? Combien il eût été dangereux de procéder aux élections municipales pendant une telle crise politique, les radicaux nous le démontrent par leur entreprise d'aujourd'hui : voyez circuler déjà dans les multitudes cet avis de la République française qui ne veut pour candidats que des républicains confessant leur foi au seuil du conseil municipal et prêts à célébrer leur déité à l'intérieur. Transformer les conseils municipaux en assemblées républicaines, voilà le dessein des radicaux; dessein qui préparerait et faciliterait, soit de leur propre gré soit à leur insu, l'avènement d'une autre Commune. En 1725, un prévôt des marchands de Paris, PierreAntoine de Castagnère, disait que les échevins sont seulement les << tuteurs » de la ville, et il les priait de déposer « leurs opinions po

litiques et philosophiques » avant de revêtir leurs robes. C'était la vérité sous la monarchie. C'est toujours la vérité, même sous la république; et les conservateurs, nous l'espérons, en sauront convaincre les populations. Ils le pourront surtout, s'ils veulent bien, non-sculement s'unir en face des radicaux, mais se montrer tolérants et modérés dans leur choix.

L'élection de M. Delisse-Engrand dans le Pas-de-Calais a irrité plus d'un parti. En a-t-elle vraiment satisfait un seul? Plus encore que bonapartiste ou septennaliste, M. Delisse-Engrand n'est-il pas un de ces hommes timides, dont le caractère est indécis, dont les opinions sont vagues et changeantes, que les événements entraînent et qui portent le courant de leur mobilité du côté où le flux de la fortune s'en va? Peut-être; et si le septennat ne pouvait s'établir que sur des volontés si flottantes, s'il avait pour vertu essentielle de n'attirer à lui que ces molles adhésions et ces incertains attachements, quelle en serait jamais la solidité ? Quoi qu'il faille penser du vrai sentiment politique de M. Delisse-Engrand, il faut noter avec satisfaction cet accroissement des suffrages recueillis dans le second scrutin: l'abstention est un mal qu'on ne doit jamais provoquer ni seconder, un mal dangereux aux conservateurs seulement, celui d'un peuple qui tombe et qui va périr par inertie. Dans le Pas-de-Calais, comme dans Maine-et-Loire, les deux partis ont revendiqué l'honneur d'être également les amis du septennat : ils attestent donc qu'il y a dans ce titre un bénéfice; ils témoignent ainsi qu'il y a dans le septennat une certaine puissance de popularité qu'ils jugent habile de se ménager près des populations. Nous le croyons comme eux, et nous disons aux conservateurs : « Cette force du septennat, rendez-la plus sûre d'elle-même et plus imposante; fixez-la, précisez-en la forme, munissez-la de garanties, organisez-en les moyens et les ressources. Sinon, elle ne sera ou bien qu'un jouet aux mains des partis, ou bien qu'un appareil dont chacun se servira pour masquer son ambition. » Nous disons aux républicains eux-mêmes : « Prenez garde de vouloir anéantir cette force du septennat; quelque affectation que vous ayez en public de lui témoigner du respect et du dévouement, vous outrez trop volontiers les conditions de votre concours pour qu'on ne soupçonne pas en vous le désir secret de rendre le septennat impossible; vous vous aliénez ainsi la bonne volonté des conservateurs; soyez moins hautains, diminuez vos exigences, si vous voulez avec eux empêcher que les césariens et les démagogues ne conquièrent le gouvernement de la France, à la faveur du septennat d'abord et malgré lui ensuite. Le septennat, dans les circonstances présentes, est votre refuge commun, un abri qui peut vous préserver du radicalisme qui briserait notre société et du bonapartisme

qui déshonorerait notre patrie; faites, par votre concorde, que le septennat ne soit plus une place ouverte où les bonapartistes entrent sous un déguisement et les radicaux par irruption. >>

Certes, les élections du 8 novembre ne laissent place à aucune contestation: rien nest moins équivoque, rien n'est plus significatif. Dans l'Oise, un cousin de Napoléon III, M. le duc de Mouchy, bat, avec une majorité considérable, ses deux compétiteurs; et encore, si nous en croyons les chiffres qu'on énonce ce matin, des deux candidats de la république, ce n'est pas le plus modéré qui trouve le plus de faveur, c'est l'utopiste et le démagogue; ce n'est pas M. Levavasseur, maire de Breteuil au temps terrible de l'invasion et défendant contre la rapacité et la cruauté du vainqueur les biens ou les personnes de ses concitoyens; non, c'est M. André Rousselle, l'émeutier du 31 octobre, qui, pendant que les Prussiens assiégeaient Paris, appelait le peuple aux armes et l'exhortait aux infâmes victoires de la guerre civile. Dans la Drôme, M. Madier-Monjau, célèbre déjà parmi les Montagnards de 1848, recueille à pleines mains les suffrages il a son rang marqué d'avance dans l'Assemblée, près des Ledru-Rollin et des Esquiros; les revenants de la république rouge montent à la lumière; saluez, vous tous qui n'avez pas peur de ces fantômes; plaise du moins à Dieu que ces ombres ne vous forcent pas bientôt à vous incliner plus bas, dans l'épouvante! Quant au Nord, la lutte a été plus égale et plus vive entre M. Parsy et M. Fiévet. Que le centre gauche applaudisse à M. Parsy, qui se présentait aux électeurs escorté de M. Testelin en même temps que muni d'une lettre de M. Thiers, soit : mais cette élection, dont les radicaux et les républicains se partagent l'honneur, dit-elle bien qui aura plus tard le profit? Au surplus, si le centre gauche estime que la nomination de M, Parsy compense celle de M. de Mouchy et celle de M. MadierMonjau, il n'est pas difficile pour l'avenir de la France, et, sans doute, il est téméraire aussi: car n'aura-t-il pas le même sort que dans l'Oise, partout où les radicaux et les bonapartistes lui disputeront le cœur de la foule au nom de la démocratie, ou césarienne ou républicaine? Pour notre part, nous l'avouons: ces élections nous paraissent d'assez effrayantes lueurs parmi les dernières dont se trouve éclairé le chemin de l'Assemblée.

C'est l'élection de l'Oise, département monarchique en 1871, qui nous a présenté le spectacle le plus instructif. Lequel? Desassemblées, clubs tumultueux, où la liberté de la parole était interdite par l'insulte, et où les Jacobins, à force de clameurs, contraignaient les Girondins à se taire: ce qui est un mode étrange de fraternité démocratique et d'égalité sociale. Des délégations formées on ne sait où ni comment, qui ne sont que la tyrannie occulte de quelques-uns et qui

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