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toutes deux dans l'Adour, l'une à Bayonne, l'autre un peu audessous de Guiche. Enfin, la quatrième et la plus orientale de ces rivières est le Cesson, qui se perd, près de Sauveterre,

gave d'Oloron.

Dans l'ancienne géographie de la France, ces quatre vallées étaient assez irrégulièrement partagées en trois cantons ou petites provinces, dont la plus occidentale se nommait Labourd, la plus orientale Soule, et celle du centre basse Navarre. Prises collectivement, ces trois provinces se nommaient le Pays Basque, étant habitées, comme elles sont encore en très-grande partie, par les Basques, population totalement distincte, par la langue et par les mœurs, des Gascons, ses voisins français, tandis qu'elle reconnaît pour frères ses voisins espagnols, les habitants de la Biscaye, du Guipuzcoa et de la haute Navarre 1. »

Les Basques français, au nombre d'environ cent quarante mille, occupent donc un peu plus du tiers du département des BassesPyrénées. Leur pays est borné au nord par l'Adour, au sud par la chaîne des Pyrénées, à l'ouest par l'Océan, à l'est par une ligne courbe longeant les limites des cantons de Sauveterre, Navarrenx, Sainte-Marie-d'Oloron et Aramitz; il comprend l'arrondissement de Mauléon et la majeure partie de celui de Bayonne 2.

La Soule et le Labourd n'ont pas de communautés distinctes dans leur sein. Le Labourd compte environ soixante mille Basques

Histoire de la Gaule méridionale sous la domination des conquérants germains. Paris, Paulin, 1836, in-8o, t. II, p. 339, 340.

Pour plus de précision, prenez la carte du département des Basses-Pyrénées. En allant du sud au nord et de l'est à l'ouest, voici la liste des communes qui forment chez nous la lisière du Pays Basque, c'est-à-dire les derniers villages où l'on parle sa langue, ceux au delà desquels on se trouve en Béarn ou en Gascogne :

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Thore (Promenade sur les côtes du golfe de Gascogne, etc. A Bordeaux, de l'imprimerie de A. Brossier, août 1810, in-8°, chap. III, § I, p. 278) présente les Biarrots, ou

homogènes, la Soule environ trente mille, homogènes encore, et la basse Navarre quarante-cinq mille, partagés en trois communautés anciennement distinctes sous les noms de Cize, Ostabaret et Mixe, mais aujourd'hui formant, avec la Soule, l'arrondissement de Mauléon. La Soule atteignait, à l'ouest, le pays de Mixe, à trois kilomètres environ de Saint-Palais; la basse Navarre s'étendait également vers l'ouest jusqu'à treize kilomètres environ de Hasparren et douze de Bidache. Le pays de Cize formait la base sud-est de la basse Navarre, l'Ostabaret le centre, le pays de Mixe l'extrémité nord-est. Le Labourd à l'est, la Soule à l'ouest, encadraient la basse Navarre., en contact seulement au nord avec la Gascogne et le Béarn.

S'il faut en croire M. le vicomte de Belsunce, qui a omis de citer ses autorités, les Labourdins et les Souletins sont, de temps immémorial et seuls, premiers propriétaires du territoire qu'occupent les Basques français. Le sol actuel de la basse Navarre était leur domaine avant l'expulsion des bas Navarrais de l'Alava, vers le commencement du VIIe siècle. Ceux-ci, vaincus par les Visigoths, préférèrent renoncer à leurs possessions d'Espagne plutôt qu'à leur indépendance: leurs frères cis-pyrénéens, labourdins et souletins, leur offrirent une généreuse hospitalité; et, après les avoir aidés, à quelque temps de là, dans une glorieuse mais infructueuse expédition pour les faire rentrer dans l'Alava, ils leur cédèrent libéralement tout le territoire compris entre les terrains déjà peuplés et cultivés par eux . Ainsi, aux deux familles déjà existant en deçà des Pyrénées, s'adjoignit une troisième famille, dont le territoire reçut le nom de basse Navarre, ou Navarre

habitants de Biarritz, comme parlant basque; mais il est dans l'erreur. Cette langue ne commence qu'à Guétary, après Anglet, qu'il nous montre (p. 127) passant, en 1525, une transaction en gascon avec le corps de ville de Bayonne. Au reste, plus loin (p. 321), il dit que les Biarrots parlent presque tous ce patois.

'Histoire des Basques depuis leur établissement dans les Pyrénées occidentales jusqu'à nos jours. Bayonne, imprimerie et lithographie de P. Lespès, 1847, in-8°, t. II, p. 215, 216. Selon D. de Vic (Hist. gén. de Languedoc, liv. VI, chap. LXXXII, ann. 601, t. I, p. 321), les Gascons ou Wascons, qui habitaient la Biscaye et la Navarre, ayant passé les Pyrénées, s'approprièrent d'abord ce qu'on appelle la basse Navarre, puis « les pays de Labourd et des Basques. » M. Fauriel, t. II, p. 341, combat cette opinion. On trouvera tout ce qu'il faut croire sur ce point, dans le t. I des Annales del reyno de Navarra, du P. Joseph de Moret, liv. III, chap. I, § I, no 3; édit. de MDCC. LXVI., p. 83, col. 1.

du Nord, pour le distinguer de la Navarre espagnole, dont il ouvrait la route par le col de Roncevaux, et aussi parce que, plus Espagnols que les Labourdins et les Souletins, depuis longtemps installés dans la Gaule, les bas Navarrais maintinrent avec la Navarre espagnole des liens plus étroits que la Soule et le Labourd, habitués déjà de longue date à vivre dans l'isolement et de leur vie propre. Les sentiments résultant d'une communauté d'origine et de langue, et non un penchant vers l'Espagne, faisaient cependant que le Labourd et la Soule s'intéressaient aux affaires d'au delà des Pyrénées et s'y associaient souvent, tantôt pour aider leurs frères, tantôt pour en obtenir un appui et des secours contre des voisins, trop nombreux, qui les pressaient en France; mais quand la lutte, prenant de plus grandes proportions, s'établit entre les deux couronnes, jamais nos Basques ne manifestèrent de penchant vers l'Espagne, ni n'encouragèrent ses rois à pénétrer chez nous par leur pays. Une partie de la population cependant était, je le répète, au moins aussi espagnole que française, à ce point que les bas Navarrais jouissaient, de l'autre côté des Pyrénées, des mêmes priviléges que les sujets de la couronne de Castille, et que nombre de personnes de la merindad de Saint-Jean-Pied-de-Port étaient encore en possession d'emplois, de bénéfices et de dignités, dans ce royaume et dans celui de Navarre, en 1621, époque de la publication d'un livre qui me semble l'œuvre de la même politique dont la maison de Savoie s'est toujours montrée animée envers les habitants de la Bresse et du Bugey 2.

1

Un autre volume, publié plus tard chez nous dans un intérêt différent, nous apprend qu'à la fin du siècle dernier les Souletins jouissaient en Espagne des mêmes priviléges que les bas Navarrais. Quiconque voulait s'établir dans ce pays, n'avait qu'à prouver quatre générations d'origine basque pour être reconnu et reçu

Drecho de naturaleza que los naturales de la merindad de San Juan del Pie del Puerto tienen en los reynos de la corona de Castilla. Sacado de dos sentencias ganadas en juyzio contencioso, y de otras escrituras autenticas, por Don Martin de Vizcay, presbytero. Con licencia. En Çaragoça: por Juan de Lanaja y Quartanet. Año 1621, in-4o esp.

Le P. Joseph de Moret (Investigaciones históricas de las antiguedades del reyno de Navarra, liv. I, chap. III, § V, no 16; édit. de MDCC. LXVI., p. 76) ne voit dans cette naturalisation des bas Navarrais qu'une récompense accordée par Charles-Quint à leur fidélité.

dans tous les tribunaux comme gentilhomme, et admis dans les ordres qui exigent des preuves de noblesse 1.

Les Basques espagnols sont au nombre d'environ sept cent mille. La Navarre, le Guipuzcoa, l'Alava, la Biscaye et une partie des Asturies, tel est le territoire qu'ils occupent. Plus encore que le nôtre, qui pourtant ne s'y épargne pas, le gouvernement espagnol travaille, et pour cause 3, à faire disparaître le plus promptement possible la langue basque des quatre provinces. Déjà, à ce qu'assurait un Navarrais d'Olite, cet idiome a, depuis. vingt ou vingt-cinq ans, perdu environ huit lieues de territoire dans la Navarre espagnole. Il avait parlé le basque avec les enfants de son âge à Olite, il y a trente-cinq ou quarante ans, et aujourd'hui il faut remonter dans la Navarre sept ou huit lieues au nord de cette localité, une demi-lieue plus loin que Pampelune *, pour entendre parler cette langue dans les villages, où son empire s'étend non sans quelques interruptions .

Les autres provinces la conservent mieux, quoiqu'il ne soit

↑ Essai sur la noblesse des Basques, pour servir d'introduction à l'histoire générale de ces peuples. Rédigé sur les mémoires d'un militaire basque le chevalier de Béla), par un ami de la nation (D. Sanadon). A Pau, de l'imprimerie de J. Vignancour, M. DCC. LXXXV., in-8o, § V (Priviléges des Basques), p. 244. - Cet ouvrage a été traduit en espagnol, sous ce titre : Ensayo sobre la nobleza de los Bascongados, etc., traducido por D. Diego de Lazcano, presbytero. Tolosa : M. DCC. LXXXVI., en la imprenta de D. Francisco de la Lama, in-8°. Abella, qui a consacré sept lignes à D. Diego de Lazcano, dans le t. II du Diccionario geográfico-histórico de España, sect. I, t. II, p. 586, col. 1, art. Tolosa, n'avait sûrement pas lu le titre que nous venons de transcrire, autrement il n'aurait point commis la faute d'attribuer à son compatriote un ouvrage dont il n'était que le traducteur.

Nodier, après avoir dit qu'il avait été sérieusement question de détruire le bas breton, et probablement toute autre langue suspecte de lèze-gallicisme, s'emporte en éloquentes invectives contre les auteurs de ce beau projet. Voyez ses Notions élémentaires de linguistique, etc. Paris, Eugène Renduel, 1834, in-8°, chap. XIII, p. 261, 262.

On devine que nous voulons parler du caractère indomptable de ce peuple, qui faisait dire au célèbre Gonzalo Fernandez de Córdova, qu'il préférerait avoir des lions à garder que des Biscayens à gouverner. Voyez Zurita, Anales de Aragon, liv. IV, chap. XXXVII.

S'il faut en croire Esteban de Garibay (Compendio historial d'España, liv. IV, chap. IV), de son temps on parlait basque dans cette cité, dans toute la merindad, et généralement dans une grande partie du royaume de Navarre, aussi bien que dans la ville et dans l'évêché de Bayonne; mais je suis fondé à révoquer en doute la première partie de cette assertion, surtout depuis la publication de la chronique d'Anelier, qui fait à chaque instant parler des bourgeois de Pampelune et des gens du peuple, dans la guerre civile de 1276, et qui ne donne pas même à supposer qu'en fait de langue courante il soupçonnât l'existence d'une autre que la sienne. Il n'est pas inutile d'ajouter que les noms basques qu'il cite sont en minorité.

5 Par exemple, dans la Romanzado, vallee de la merindad de Sangüesa, et dans l'al

pas sans exemple qu'elle ait disparu en certains endroits. C'est ainsi que dans les villes et dans le ressort de Portugalete, de Valmaseda et de Lanestrosa, qui font partie de la Biscaye, on ne parle plus que le castillan, bien que les noms de la plupart des villages soient basques et donnent à entendre qu'à une certaine époque on parlait, dans le pays, l'antique idiome d'où ils avaient été tirés 1.

La même observation s'applique à la province d'Alava, où le basque se montre à chaque pas dans le nom de localités dont les habitants ont cessé de le parler. Joaquin Josef de Landazuri, à qui cette remarque n'a point échappé, rapporte qu'au commencement du XVIIIe siècle, cette langue était encore celle de Nanclares, à deux lieues de Vitoria 2. Le nom de Zayas de Bascones, que porte un petit village des environs d'Osma, dans la province de Burgos, permettrait d'insinuer que son usage s'étendait peut-être encore plus loin, si le nom des Basques, ou Vascons, ne se retrouvait dans nombre d'autres localités situées à une assez grande distance des quatre provinces 3. Quoi qu'il en soit, nous acceptons le résultat donné par un écrivain de Vergara, qui assure qu'il n'y a qu'un demi-million d'habitants du Pays Basque qui parlent l'escuara".

Quelle est cette langue? Nous allons essayer de l'exposer dans le chapitre suivant.

miradia de Navascues, qui est voisine, on a toujours parlé castillan ou roman, tandis que les habitants de la vallée d'Urraul, qui touche le Romanzado, ne font usage que du basque. Cette circonstance, jointe à l'antipathic qui règne entre ces deux populations, et à la répugnance qu'elles éprouvent à s'unir par des mariages, donne à penser que les ancêtres des habitants du Romanzado étaient, sinon romains, du moins originaires du midi de la Navarre, et que leur vallée doit son nom à la langue que parlaient ces étrangers. Voyez Diccionario de antiguedades del reino de Navarra, por D. José Yanguas y Miranda, t. III. Pamplona, 1840, in-4o esp., p. 276, art. Romanzado.

'Diccion. geogr.-hist. de España, etc., sect. I, t. II, p. 487, col. 2, art. Vizcaya.

Los Compendios históricos de la ciudad y villas de la M. N. y M. leal provincia de Alava, etc. En Pamplona, en la imprenta de Miguel de Coscuella, año de 1798, in-4o esp., p. 146, 147. Voyez encore p. 193.

* Investigaciones históricas del reyno de Navarra, por el P. Joseph de Moret, liv. I, chap. III, §I, no 1, et § V, no 19; édit. de MDCC. LXVI., in-fo, p. 67 et 78.-Averiguaciones de las antiguedades de Cantabria, etc., autor el P. Gabriel de Henao. En Salamanca, por Eugenio Antonio Garcia, año de 1689, in-folio, liv. I, chap. LIII, not. 79, p. 505.

De l'Eusquère et de ses erdères, ou de la langue basque et de ses dérivés, etc. Paris, librairie de Poussielgue-Rusand, 1841-1843, in-8°, t. I, p. 20. ( Du Pays eusqueldun.)

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