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Le Chat et le Miroir;

Fable par Florian.

Philosophes hardis, qui passez votre vie
A vouloir expliquer ce qu'on n'explique pas,
Daignez écouter, je vous prie,

Ce trait du plus sage des chats:
Sur une table de toilette

Ce chat aperçut un miroir;

Il y sante, regarde, et d'abord pense voir
Un de ses frères qui le guette.

Notre chat veut le joindre: il se trouve arrêté;
Surpris, il juge alors la glace transparente
Et passe de l'autre côté,

Ne trouve rien, revient, et le chat se présente.
Il réfléchit un peu: de peur que l'animal,
Tandis qu'il fait le tour, ne sorte,
Sur le haut du miroir il se met à cheval,
Une jambe par-ci, l'autre par-là, de sorte
Qu'il puisse partout le saisir.
Alors, croyant bien le tenir,
Doucement vers la glace il incline la tête,
Aperçoit une oreille, et puis l'autre: à l'instant,
A droite, à gauche il va jetant

Sa griffe qu'il tient toute prête;

Mais il perd l'équilibre, il tombe et n'a rien pris.
Alors, sans davantage attendre,

Sans chercher plus longtemps ce qu'il ne peut comprendre,
Il quitte le miroir et returne aux souris.

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Que me sert," se dit-il, „de percer ce mystère?

Une chose que notre esprit,

Après un long travail, n'entend ni ne saisit,

Ne nous est jamais nécessaire."

Le rhume guéri;

Chanson cacophonique.

Allant au bal dans notre rue,
J'avais un habit des plus beaux,
Lorsque par une noire nue
Je fus mouillé jusques aux os.
Jamais je ne vis de ma vie
Tomber autant d'eau de là-haut.
Etant sorti sans parapluie,

Il m'eût plus plu qu'il plût plus-tôt.

Depuis cet an, sur ma poitrine
Un rhume affreux s'était fixé,
Lorsque ma sœur Alexandrine
M'ordonna l'usage du thé.
Ce remède de demoiselle
M'attira les soins les plus doux:
Comment vas-tu?" me disait-elle;
,,Ton thé t'a-t-il ôté ta toux ?"

Grâce à ces attentions aimables,
Je guéris avant le printemps,
Et pour éviter cas semblable,

Je crains l'eau par le plus beau temps.
Je prends de moi un soin extrême,
Et pour raffermir mes poumons,
J'ai déjeuné ce matin même

Du dos de deux dodus dindons.

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Je passais récemment dans un obscur canton
Où l'on m'a conté pour notoire,

Ce petit fait touchant qui rappelle l'histoire
De la vache de Fénelon.

Un prélat, homme simple et bon,
Respecté, mais surtout chéri dans son domaine,
En se rendant un jour à la ville prochaine,
Rencontre sur sa route un beau petit garçon
Qui lui parut en grande peine.

Il allait tristement du coteau vers la plaine,
Guidant son modeste troupeau,

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Et caressait en pleurant un agneau.
Pauvre agneau!" disait-il, tu n'auras plus de mère;
Elle est perdue au fond du bois;

Hélas! ma brebis la plus chère
Aujourd'hui n'entend plus ma voix.

Oh! quand je vais rentrer, quel chagrin pour mon père!"

Le prélat s'était arrêté;

Et tandis qu'à sa plainte amère

L'enfant s'abandonnait, il l'avait écouté. „Pauvre petit," dit-il avec bonté;

Tu retournes à ta chaumière:

Si tu n'y trouvais plus ta mère,

Dis-moi, que ferais-tu ?" - „Je pousserais des cris." -,,Et tes cris, mon enfant, pourraient-ils te la rendre?" Si ma mère pouvait m'entendre,

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Elle accourrait près de son fils."

„Tu le crois; hé bien donc, cela devrait t'apprendre Par quel moyen tu peux ramener ta brebis."

Sur le prélat le petit pâtre
D'abord jette un regard surpris;
Puis tout-à-coup il a compris;

Il saisit son agneau folâtre,

Contre son sein le presse doucement,
Et le force à pousser un triste bêlement.
Deux ou trois fois il renouvelle
Cette épreuve, quoiqu'à regret,
Et voilà que dans la forêt
On entend la brebis qui bèle;

Le petit de nouveau l'appelle,

Et la pauvre brebis, aux cris de son agneau,
Comme une tendre mère inquiète et fidèle,
Accourt rejoindre le troupeau.

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Le matin;

par A. Mandrou.

Petit enfant, le soleil brille:
Ouvre les yeux à ses rayons ;
Ton oiseau déjà s'égosille
Pour t'éveiller par ses chansons.
Entends-tu? Dès qu'il voit l'aurore
Rougir le nuage au lointain,
D'une voix joyeuse et sonore
Il chante l'hymne du matin.

Enfin je te vois me sourire;
Tu t'éveilles, mon tendre amour!

Un baiser, et puis viens me dire
Ta prière de chaque jour.
La nuit s'est doucement passée
Sous la protection du Seigneur;
Viens, mains jointes, tête baissée,
Lui faire hommage de ton cœur.

Demande-lui, mon petit ange,
De te conserver la santé:
Tout ici-bas périt et change,
Mais toujours veille sa bonté;
Qu'il t'accorde l'obéissance
Et de tes fautes le pardon,
L'application, l'intelligence,

La crainte et l'amour de son nom.

Demande-lui qu'il te conserve
A l'amour de tes bons parents;
Que dans ta famille on le serve
Avec des vœux toujours constants;
Enfin, qu'il nous fasse la grâce,
Quand ici nous ne serons plus,
D'avoir ensemble notre place
Au chœur bienheureux des Elus!

Le fusil et le lièvre;

Fable par Imbert.

D'un orme épais un chasseur ombragé
Dormait couché sur une gerbe,
Tandis que son fusil chargé
A ses pieds reposait sur l'herbe.

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