Page images
PDF
EPUB

moindre veftige. Je croi devoir expofer l'accompliffement de cette fameufe prophétie, avant que de paffer à ce qui fuivit la prife de Babylone.

§. III.

Accomplissement de la prophétie, qui prédifoit la ruine totale de Babylone.

[ocr errors]

CETTE PREDICTION fe trouve dans plufieurs Prophètes, mais fur tout dans Ifaïe, chapitre XIII. depuis le verfet 19. jufqu'au 22., & chapitre XIV. verfets 23. & 24. Je l'ai raportée dans fon entier ci-devant, page 238. Il y eft marqué que Babylone fera entierement détruite comme le furent autrefois les villes criminelles de Sodome & de Gomorrhe: qu'elle ne fera plus habitée : qu'on ne la rebâtira jamais que les Arabes n'y drefferont pas même leurs tentes, & que les pasteurs n'y viendront point pour y faire repofer leurs troupeaux : qu'elle deviendra la retraite des bêtes fauvages, & des oifeaux nocturnes : qu'un marais couvrira le lieu qu'elle avoit occupé, enforte qu'il ne restera pas même de veftiges de l'endroit où elle aura été. C'est Dieu même qui

avoit prononcé cet arrêt, & il eft utile à la religion de vérifier avec quelle exactitude chaque article en a été fucceffivement accompli.

I. Babylone perdit d'abord la qualité de ville roiale. Les Rois de Perfe lui préfererent un autre féjour. Sufe, Ecbatane, Perfépolis, toute autre demeure leur plut davantage; & eux-mêmes ruinerent une partie de la ville.

II. a Strabon & b Pline nous ap- A . M. prennent que les Macedoniens qui fuc- 3880. céderent aux Perfes, non-feulement la négligerent, & ne furent occupés ni du foin de l'embellir, ni de celui de la réparer; mais qu'ils affecterent même de bâtir dans fon voifinage Séleucie, pour la faire abandonner, & pour lui ôter ce qui lui reftoit d'habitans. Il n'y a rien de plus propre à expliquer ce que le Prophète avoit prédit : Non habitabitur. Ses pro

2

pres

a Partem urbis Perfæ diruerunt, partem tempus confumfit, & Macedonum negligentia; maximè poftquam Seleucus Nicator Seleuciam adTigrim condidit,ftadiis tantùm trecentis à Babylone diffitam. Strab. lib. 16. p. 738.

6 In folitudinem rediit exhausta vicinitate Seleucia, ob id conditæ à Nicatore intra nonagefimum (ou quadragefimum) lapidem. P.in. lib. 6. cap. 26.

An. J. C.

96.

pres maîtres s'appliquent à la rendre déferte.

[ocr errors]

III. Les nouveaux Rois de Perfe qui devinrent maîtres de Babylone, acheverent de la ruiner en bâtiffant a Ctéfiphon, qui lui enleva ce qui lui reftoit d'habitans. Et il fembloit que depuis qu'elle avoit été frappée d'anathéme ceux qui devoient être fes protecteurs, devenoient fes ennemis ; & que tous croioient être chargés du foin de la reduire en folitude, mais par des voies indirectes, & fans emploier la violence : afin qu'il fût plus manifefte que c'étoit la main de Dieu,plutôt que celle des hommes, qui s'appliquoit à l'anéantir.

IV. Elle fut fi univerfellement abandonnée, qu'il ne refta plus que l'enceinte de fes murailles. Et elle étoit rédui*Il écrite à cet état au tems que * Paufanias voit fous écrivoit fes remarques fur la Grece. Illa fucceffeur autem Babylon, omnium quas unquam fol d'Adrien, afpexit urbium maxima, jam præter muros nihil habet reliqui. Paufan. in Arcad.

Antonin

pag. 509.

V. Les Rois de Perfe la voiant deferte en firent un parc, où ils enfer

merent

a Pro illa Seleuciam & Ctefiphontem urbes Perfarum inclitas fecerunt. S. Hieron. in cap. 13. Ifai.

merent des bêtes fauvages pour la chaffe. Elle devint ainfi, comme le Prophète l'avoit prédit, la demeure des animaux cruels & ennemis de l'homme, ou fugitifs & timides. Ses citoiens furent convertis en des fangliers, des léopards, des ours, des ânes fauvages, des cerfs, Babylone fut la retraite des bêtes funeftes, fauvages, ennemies de la lumiere. Re- Ifai. 13. quiefcent ibi beftia, & replebuntur domus 21. 22. illorum draconibus, &c.

[ocr errors]

An. J. C.

400.

S. Jérome nous a confervé cette In cap. précieufe remarque ; & il la tenoit If. 13. d'un religieux Perfan, qui avoit vû ✈. 22. ce qu'il lui avoit raporté. Didicimus à quodam fratre Elamita, qui de illis finibus egrediens, nunc Jerofolymis vitam exigit monachorum, venationes regias effe in Babylone & omnis generis beftias murorum ejus ambitu tantùm

contineri.

VI. Mais c'étoit encore trop que les murs de Babylone fubfiftaffent. Ils tomberent en plufieurs endroits & ne furent pas reparés. Le refte fuivit par divers accidens. Les bêtes qui fervoient aux plaisirs des Rois de Perfe, forcirent. Les ferpens & les fcorpions demeurerent; & elle devint un lieu redou

redoutable pour ceux qui auroient eu quelque curiofité pour vifiter fes antiquités. L'Euphrate qui la traversoit, n’aiant plus un canal libre, prit avec le tems son cours ailleurs; a & il ne reftoit au tems de Théodoret qu'un filet d'eau, qui couloit à travers les mafures, & qui n'aiant plus de pente ni d'écoulement libre, dégéneroit neceffairement en un marais.

VII. Par tous ces changemens, Babylone devint entierement déferte, & tous fes environs devinrent auffi affreux & auffi abandonnés que le lieu qu'elle avoit occupé & les b géographes les plus habiles ne favent aujourd'hui où le déterminer. Ainfi fut accompli à la Ifai. 14. lettre ce que Dieu avoit dit: Je couvri rai d'un marais le lieu qu'elle occupe maintenant. Je rechercherai avec foin jusqu'à fes moindres veftiges pour les effacer. Je ferai moi-même la recherche, dit le Seigneur, avec un oeil jaloux, pour décou vrir s'il ne reftera rien d'une ville ennemie de mon nom & de Jérufalem. Je balaierai

23.

[ocr errors]

a Euphrates quondam urbem ipfam mediam dividebat: nunc autem fluvius converfus eft in aliam viam, & per rudera minimus aquarum meatus fluit. Theod.in.c. 50. Jerem.v. 38. 39. b Nunc omnino deftructa, ita ut vix ejus feperfint rudera. Baudran,

« PreviousContinue »