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Ils triomphent contens de mes vaines douleurs.
Allez, jardins dressés par une main fatale,
Tristes enfans de l'art du malheureux Dédale,
Vos bois, jadis pour moi si charmans et si beaux
Ne sont plus qu'un désert, refuge de corbeaux,
Qu'un séjour infernal, où cent mille vipères,
Tous les jours en naissant, assassinent leurs mères. 1

XXXII. Sur le comte de Grammont.

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FAIT d'un plus pur limon, Grammont à son printemps
N'a point vu succéder l'hiver de la vieillesse;
La cour le voit encor brillant, plein de noblesse,
Dire les plus fins mots du temps,

Effacer ses rivaux auprès d'une maîtresse;

Sa course n'est au fond qu'une longue jeunesse,
Qu'il a déjà poussée à deux fois quarante ans.

XXXIII. Fragmens du Chapelain décoiffé.

EN cet affront, La Serre est le tondeur
Et le tondu père de la Pucelle...

2

Mille et mille papiers dont ta table est couverte
Semblent porter écrit le destin de ma perte.

3

5

1 Les seize premiers vers sont un fort bon commencement d'élégie, mais le reste, pour être dans le goût de l'antiquité, ne m'en paraît pas meilleur. S.-Marc. (Le n° xxxi est à Br., II, 310; S.-M., n. 12, P.; S.-S., IV, 503).

2 Les anciens éditeurs de Boileau n'ont point donné ces vers, et les éditeurs modernes les ont laissés dans la correspondance ( t. IV, lett. du 8 févr. 1705). M. Daunou (IV, 83 ) ignore s'ils paraîtront assez dignes de Boileau.

5 Ce sont les seuls vers de cette parodie que Boileau ait faits. Voy. tome I, VII préface ou catalogue; et tome IV, lettre du 10 décembre 1701 (ils sont à Br., II, 491; S.-M., II, 446; S.-S., II, 574).

ÉPIGRAMMES.'

I. A Climène.

TOUT me fait peine,
Et depuis un jour
Je crois, Climène,
Que j'ai de l'amour.

1 Suivant, ainsi que nous l'avons dit (p. 406), l'ordre de l'édition de M. Daunou pour les petites pièces de poésie, nous prenons comme lui le mot épigramme, non dans le sens général qu'il avait autrefois ( une inscription), mais dans l'acception moins étendue qu'il a communément, c'est-à-dire, comme désignant, d'après la définition même de Boileau ( Art poétique, II, 103, p. 202), une petite pièce de vers terminée par un trait satirique. Le titre courant mis dans les éditions de 1701 et 1713 aux pages où sont d'autres pièces, est plutôt l'ouvrage des imprimeurs que de Boileau lui-même, car il est impossible qu'il ait considéré comme épigrammes proprement dites, une ode, une fable, des chansons, etc., qui s'y trouvent comprises.

Nous n'abandonnerons l'ordre de M. Daunou que pour quelques épigrammes sur les dates desquelles il s'est trompé, selon nous, et dont il nous a semblé qu'on saisirait mieux le sens si l'on s'attachait strictement à leur série chronologique, tandis qu'on n'a pas la même raison, on l'a dit (p. 430), pour les poésies diverses.

Il faut toutefois observer qu'en conservant cet ordre nous renvoyons à l'article des Pièces attribuées les épigrammes dont l'authenticité nous a parų douteuse.

Enfin nous rapporterons à la note du dernier numéro (p. 476) des observations sur le talent de Boileau pour l'épigramme.

2 Br., n. 10; S.-M., n. 5, P.; S.-S., II, 516. — Il en est question au tome IV, lettre du 15 juillet 1702.

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- Elle a été supprimée aux Boil, class, et de

que cetle

la jeunesse. Un éditeur d'Amsterdam (1772, III, 170), soutient pièce n'étant épigramme que comme tous les couplets le sont, devrait plutôt être placée dans les poésies diverses.

Cette nouvelle

Vous met en courroux :
Tout beau, cruelle,

Ce n'est pas pour vous.

II. A une demoiselle.

5

N. B. Nous donnons cette épigramme à l'appendice de ⚫e volume, article des Pièces attribuées, n° I.

1

III. Sur une personne fort connue.

DE six amans contens et ron jaloux,
Qui tour-à-tour servaient madame Claude,
Le moins volage était Jean, son époux.

Un jour pourtant, d'humeur un peu trop chaude,
Serrait de près sa servante aux yeux doux,
Lorsqu'un des six lui dit : Que faites-vous?
Le jeu n'est sûr avec cette ribaude :

Ah! voulez-vous, Jean-Jean, nous gåter tous? 1

5

Br., I, 295; S.-M., n. 5o, E.; S.-S., II, 559. —L'éditeur des lettres de J.-B. Rousseau blâme vivement (p. 39) Brossette d'avoir publié cette épigramme (voy. sa note sur l'Art poét., ch. 1, v. 96, d'où nous l'avons tirée). Selon lui elle n'est pas l'ouvrage de Boileau mais d'une société de jeunes gens dont il était. « Jamais, dit-il, Boileau, n'eut ce style... » Mais comment s'en rapporter plutôt à cet éditeur qu'à Brossette, et surtout à J.-B. Rousseau ? « Je connaissais, dit ce dernier (p. 39), et je savais même par cœur la petite épigramme de M. Despréaux que vous avez la bonté de m'envoyer (l'envoi est à p. 34 ). On prétend que c'est un bon mot de M. Racine au comédien Champmeslé, dans le temps qu'il fréquentait la maison de celui-ci. M. Despréaux n'a point donné cette épigramme au public pour ne point donner prise aux censeurs trop scrupuleux, etc. ( la lettre est datée du 15 octobre 1715). Selon Brossette, c'est une imitation de l'élégant

badinage de Marot dont Boileau parle dans le même vers 96.

"

Gette épigramme est un peu leste pour le sévère Boileau; mais ce n'est pas la plus mal tournée du recueil. » Le Brun.

1

IV. Sur un frère aîné que j'avais, et avec qui j'étais brouillé. 2

De mon frère, il est vrai, les écrits sont vantés;
Il a cent belles qualités;

Mais il n'a point pour moi d'affection sincère.
En lui je trouve un excellent auteur,
Un poète agréable, un très bon orateur;
Mais je n'y trouve point de frère.

V. Contre Saint-Sorlain. 4

5

3

DANS le palais hier Bilain
Voulait gager contre Ménage,
Qu'il était faux que Saint-Sorlain "
Contre Arnauld eût fait un ouvrage.
Il en a fait, j'en sais le temps,
Dit un des plus fameux libraires,
Attendez.... C'est depuis vingt ans ;

6

1 Br., n. 47; S.-M., n. 46, E.; S.-S., II, 548. 2 P. C. O. D'après le manuscrit

française, et avec qui...

...

5

5

que j'avais, qui était de l'Académie

Il s'agit de Gilles Boileau. Nous en parlons au tome III, Explicat. généal., no 282, et art. des Erreurs de Brossette, no 17.

5 Éloges outrés... Voy. toutefois même no 282 et au tome III, la préface de la traduct. de l'Enéide, liv. IV.

4 Br., n. 3; S.-M., n. 19, E.; S.-S., 513. — V. O. 1685 à 1701. Il y a simplement épigramme, ou autre.

5 Orthographe de 1685 à 1713 ( pour Saint-Sorlin).

6 Vers 1 à 5. P. C. d'après Brossette. Mais voy. le même art. de ses erreurs, n° 17.

Hier un certain personnage

Au palais voulait nier

Qu'autrefois Boileau le rentier
Sur Costar eût fait un ouvrage.
Il en a fait, etc.

On en tira cent exemplaires.

C'est beaucoup, dis-je en m'approchant;
La pièce n'est pas si publique.

Il faut compter, dit le marchand,
Tout est encor dans ma boutique. ↑

VI. Sur la première représentation de l'Agésilas de M. de Corneille, que j'avais vue.

J'AI Vu l'Agésilas.
Hélas!

VII. Sur la première représentation de l'Attila.

APRÈS l'Agésilas,
Hélas!

Mais après l'Attila,
Holà. 2

10

1 Cette épigramme est une des meilleures et des mieux tournées de Boileau. Saint-Marc.

Le Brun.

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Elle serait assez plaisante, si elle n'était pas si délayée.

2 Br., n. 13 et 14; S.-M., n. 14 et 15, E.; S.-S., II, 504.-V. O. Ces deux épigrammes, insérées pour la première fois dans l'édition de 1701, ont été supprimées dans celle de 1713. Boileau aurait-il reconnu que, selon la remarque suivante de Voltaire, elles ne méritaient pas les honneurs de l'impression ?

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Holà a été mis à la deuxième, pour annoncer que la décadence du génie de Corneille se fait encore plus sentir dans Attila que dans Agésilas. Néanmoins, comme ce mot (Boileau l'employa dans cette intention) offre un peu d'ambiguïté, Corneille le prenait pour un éloge. Brossette, note du vers 177, sat. IX.- Attila est au-dessous des pièces de Danchet. Je m'en tiens au holà de Boileau. Je le loue de l'avoir dit, et je ne l'approuve pas de l'avoir imprimé, parce que cela n'en valait pas la peine. Voltaire, lettre à d'Alembert, 12 juillet 1762. — Boileau en disant ce holà parlait comme toute la France. La Harpe, Lyc., in-12, 1820, V, 3 , 321.

Le Brun est d'un avis bien différent. Selon lui le sel de cette épigramme ne répare point le malheur de l'avoir faite..... Ailleurs (Art poét., ch. 11, v.

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