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vues lui font défaut, il possède au plus haut degré l'aptitude à un labeur pénible et régulier; comme animal domestique, comme bête de somme, il l'emporte sur l'Européen, et comme tel lui sera toujours préféré : il est l'ouvrier de l'avenir (1). Mais, au point de vue du développement de la civilisation, cette aptitude au travail n'est qu'une qualité de second ordre, de beaucoup primée par l'esprit d'initiative, le génie inventif, l'énergie intellectuelle, toutes ces puissances qui élèvent l'homme si haut au-dessus de la brute. S'il en était autrement, le bœuf, qui supporte patiemment le joug du matin au soir, le chameau qui travaille des semaines entières en se contentant d'une maigre pitance, l'emporteraient sur l'homme.

En résumé, nous voyons que l'infériorité des civilisations asiatiques provient de la pénurie de l'azote dans l'alimentation des individus, que cette pénurie a pour cause les influences hygrométriques, lesquelles dérivent elles-mêmes de la forme des terres, l'Orient et l'Occident étant inversement taillés (2). On se rend compte en

renferme 87 0/0 environ: c'est donc un excellent aliment de calorification.

1. « Les ouvriers chinois sont les meilleurs travailleurs; sans leur concours, la ligne du Pacifique n'aurait pu être achevée.... Les patrons, les maîtres, tous ceux qui ont besoin de bras, les recherchent; car ils rendent à peu près les mêmes services que les blancs pour moins de la moitié de salaire. » (Baron de Hübner.) Déjà leurs concurrents d'origine européenne ont jeté le cri d'alarme; mais ils auront beau faire, ils subiront le joug des travailleurs jaunes, et cela au grand avantage des consommateurs,

2. Le continent occidental comprend deux terres, l'Europe et l'A

même temps de l'état d'infériorité dans lequel la partie australe de la terre africaine est restée sous le rapport de la civilisation; car dans toute cette portion du continent, du moins dans la zone torride, l'aliment habituel, la banane, est encore plus pauvre en matière azotée que là graine de la céréale asiatique (1).

frique; de même, le continent oriental est double, il comprend l'Asie et l'Australie. A l'Occident la terre boréale est celle qui a la plus faible superficie, à l'Orient, c'est la terre australe; sous le rapport des aires, l'Europe fait pendant à l'Australie, l'Afrique à l'Asie.

1. Dans toute cette partie de l'Afrique, « les bananes sont récoltées en abondance, et sont avec le millet la principale nourriture des habitants. » (P. F. Bainier.) La banane renferme à peu près la même proportion de composés ternaires que le riz; mais elle ne renferme que 5,2 0/0 d'albuminoïde, tandis que le riz en contient 6,40/0.

CHAPITRE TROISIÈME

LE MILIEU AÉRIEN

Généralité de la fonction respiratoire.

Les variations de l'élément comburant résultent, non de modifications dans la composition chimique de l'atmosphère, mais des variations de la pression et de la densité de l'air avec l'altitude. Influence de ces variations sur l'homme. Les influences barométriques sont confinées aux régions chaudes du globe. Le Thibet. Les plateaux américains. Infériorité de la civilisation mexicaine relativement à la civilisation espagnole. Infériorité de la civilisation péruvienne relativement à la civilisation mexicaine. Subordination des influences barométriques aux influences hygrométriques.

Des deux gaz qui composent le milieu aérien, l'oxygène est le seul qui soit absorbé directement par les organismes; l'azote n'entre dans les tissus de la plante qu'à l'état de composé hydrogéné, et pour passer dans le corps de l'animal il doit revêtir une forme plus complexe (1). Les variations de la matière albuminoïde à la surface de la terre venant d'être étudiées, l'oxygène

1. L'azote entre dans la plante à l'état de composé binaire, de gaz ammoniac, AzH3, ou plutôt de composé ternaire, puisque le gaz est à l'état de solution ammoniacale, AzH'O; il entre dans l'animal à l'état de matière albuminoïde, composé quaternaire, dont la formule générale est CH"OPA.

nous occupera seul ici. Tous les organismes sans exception, les infiniment petits comme les infiniment grands, absorbent de l'oxygène; la planète respire aussi bien que le ciron (1). Sur notre terre, le gaz comburant est indispensable à tout ce qui vit, à la plante comme à l'animal, et entre les deux catégories d'êtres, il n'y a de différence que dans le degré (2); l'oxygénation est

1. Prenons comme exemple d'êtres microscopiques les organismes qui président aux fermentations, et que pour cette raison on a appelés ferments; la levûre de bière, qui est un de ces ferments, a, dit Pasteur, «< deux manières de vivre: elle est tout à la fois aérobie (vivant dans l'air) et anaérobie (vivant à l'abri du contact de l'air), suivant les conditions de milieu dans lesquelles on la cultive. » Dans les deux milieux, le ferment respire dans le premier cas, en empruntant directement à l'air son oxygène, dans le second en prenant cet élément aux corps ambiants, à la manière des tissus animaux, qui respirent en décomposant les globules oxygénés du sang qui les baigne.

La planète respire comme le ferment. L'écorce pierreuse, qui forme l'épiderme solide de la terre, absorbe peu à peu les particules gazeuses de l'atmosphère avec laquelle elle est en contact; l'oxygène de l'air se fixe de plus en plus, brûlé par les éléments métalliques qui composent le noyau; à l'époque actuelle, la plus grande partie de l'oxygène qui formait l'atmosphère primitive est condensée à l'état d'eau, de calcaire, de silice, d'argile. C'est une propriété de plus à ajouter à celles que nous avons signalées pour montrer l'analogie qui existe entre notre planète et les êtres vivants. En voici la récapitulation forme arrondie, tissus à composition complexe, mélange des parties solides et des parties fluides; travail chimique continu; respiration; phases successives d'évolution; mobilité, périodicité dans les mouvements.

(2) Jusqu'à ces derniers temps on a cru que chez la plante la respiration est une fonction intermittente; on enseignait que le végétal absorbe l'acide carbonique pendant le jour, l'oxygène pendant la nuit. Les expériences de M. Corenwinder ont prouvé que la plante respire à toute heure de la journée; c'est la fonction chlorophyllienne qui seule est périodique, puisqu'elle n'entre en activité que sous l'influence des rayons solaires.

moins active chez le végétal, qui, amassant plus qu'il ne consomme, tient en réserve des aliments pour l'animal, véritable appareil de combustion (1). De cette grande importance de la fonction respiratoire, il résulte que la moindre variation survenue dans le milieu aérien, relativement à son pouvoir comburant, peut entraîner les plus graves désordres dans l'organisme.

L'atmosphère étant un simple mélange, et non une combinaison, il semble que la proportion des deux éléments qui la composent doit subir de perpétuelles variations; pourtant l'observation a prouvé que l'oxygène se trouve à peu près en égale quantité aux divers points de la surface terrestre. L'expérience est facile à faire en petit. Introduisons un peu d'azote dans une éprouvette, en employant le procédé usité dans les laboratoires: le gaz, par suite de sa grande élasticité, se répand uniformément dans l'intérieur de l'éprouvette, sans pouvoir s'échapper au dehors, les parois du vase, formées par les mailles serrées des molécules du verre, s'opposant à la fuite de ses atomes. Si l'on fait alors pénétrer de l'oxygène dans le récipient, il arrivera que ce dernier gaz, pas plus que le premier, ne pourra franchir la muraille de verre; mais il rencontrera devant lui un obs

(1) Les deux conceptions vraiment scientifiques de l'être vivant sont celle de Descartes et celle de Lavoisier. Pour le premier, les organismes sont des mécanismes, des transformateurs de mouvement; pour le second, ce sont des phénomènes d'oxydation lente, l'être vivant est une lampe qui se consume. La conception mécanique et la conception chimique sont vraies toutes deux, et Mayer a fait ressortir la relation qui les unit, en montrant que la chaleur, produit de l'action chimique, n'est que du mouvement.

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