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sucre diminue plus rapidement que celle de l'amidon (1)?

Jusqu'à présent nous avons considéré les vibrations solaires dans leur ensemble, sans remarquer qu'il y en a de plusieurs espèces, les unes produisant sur nous la sensation de lumière, les autres la sensation de chaleur. Ce sont les vibrations lumineuses qui interviennent spécialement dans le travail de dissociation de l'acide carbonique, d'où résulte la formation de l'amidon, des graisses et des acides (2). Mais ces composés, qu'un rayon de soleil a élaborés, peuvent réargir l'un sur l'autre sous l'influence des vibrations calorifiques; ainsi de l'action des acides sur l'amidon résulte la production des sucres (3). Or les vibrations thermiques, qui diffèrent

1. Pour n'en citer qu'un exemple, la patate, qui est la pomme de terre des pays chauds, renferme autant de fécule que ce dernier tubercule, mais elle est beaucoup plus riche en matières sucrées.

2. Pendant longtemps on a refusé à la lumière le pouvoir de faire et de défaire les combinaisons; ce rôle chimique de la lumière est aujourd'hui bien établi. La radiation lumineuse peut produire soit des décompositions (réduction de AgCl), soit des combinaisons (formation de HCl, par l'insolation); de même, il est prouvé que c'est elle qui dissocie l'acide carbonique et l'eau de l'atmosphère, et forme, avec leurs éléments, de nouvelles combinaisons. Il n'y a pas longtemps encore que l'on enseignait la vieille théorie de Réaumur, qui consiste à mesurer l'énergie de végétation en additionnant les moyennes de températures quotidiennes à partir d'un certain degré. D'abord, théoriquement, il faudrait additionner, non les températures, mais les carrés des températures; et puis cette manière de procéder est formellement contredite par l'expérience. Le maïs, qui demande, pour mûrir, 2968o à Quito, n'en demande que 2440 à Béchebronn, en Alsace; l'orge, qui exige 1793o à Bogota, n'en demande que 1509 à Ratisbonne et que 1288 à Revel: de pareils écarts condamnent cette théorie. Ce n'est pas la chaleur qui intervient ici, mais la lumière.

3. La transformation de l'amidon en sucre ou glycogénèse est une

des vibrations lumineuses par leur moindre vitesse, en diffèrent aussi par leur inégal coefficient d'absorption à travers l'atmosphère (1); et comme ce sont elles qui sont absorbées en plus grande quantité, il en résulte que, sous les latitudes élevées, où le rayon solaire a à percer les couches d'air sur une grande épaisseur, ces vibrations seront déjà presque éteintes, en arrivant à la surface du sol, alors que les vibrations lumineuses auront conservé la plus grande partie de leur puissance (2). Rien donc d'étonnant à ce que l'amidon continue à se produire en notable proportion, alors que le sucre ne s'élabore plus qu'en quantité insignifiante; l'on s'explique par là et la grande extension des plantes féculifères à la surface du globe et l'importance capitale des céréales dans l'alimentation humaine.

Nous sommes maintenant en mesure de répondre à cette question: comment varient les ressources alimentaires de l'homme? Le rôle de l'aliment est d'être brûlé,

fonction qui appartient aussi bien aux animaux qu'aux végétaux, comme l'a démontré Claude Bernard: dans les deux cas, la formation du sucre s'effectue sans le secours de la lumière.

1. Ce fait résulte des observations de Pouillet d'une part, de Bouguer d'autre part; l'expérience se fait tous les jours devant nous; nous distinguons les étoiles sur le fond assombri du ciel; mais nous n'avons pu encore apprécier leur état thermique; les vibrations lumineuses peuvent traverser notre atmosphère, les vibrations thermiques s'arrêtent en chemin, absorbées par les couches d'air.

2. La quantité de lumière reçue. en Suède, sous le 70° degré de latitude, étant représentée par 1, celle reçue en France, sous le 45e degré, est représentée par 1,15, et la quantité reçue à l'équateur par 1,20. Ces nombres diffèrent entre eux de quantités à peine appréciables, alors que la température, dans ces trois régions, varie énormément.

c'est-à-dire d'être transformé, à l'aide de l'oxygène inspiré, en des composés de forme plus ou moins complexe. Des trois éléments fondamentaux qui constituent l'aliment, le charbon et l'hydrogène servent de combustibles, l'oxygène est le principe comburant. La quantité d'oxygène renfermée soit dans l'amidon, soit dans la graisse, soit dans le sucre, soit dans l'acide, neutralise une partie du combustible que renferme l'aliment; c'est autant de moins que l'oxygène inspiré trouvera à brûler lorsqu'au moment de l'action chimique les trois éléments seront mis en présence. Ainsi, dans l'amidon, qui a pour formule C1H10O10, l'hydrogène peut être considéré comme brûlé d'avance, à l'état d'eau; un seul élément combustible reste libre, le charbon; l'amidon est donc simplement un composé d'eau et de charbon, et l'on voit, en même temps, que l'homme s'alimente avec du charbon, comme nos machines. La richesse d'un aliment varie en raison inverse de sa teneur en oxygène.

A mesure qu'on s'éloigne de l'équateur, la machine humaine ne trouve, pour sa consommation, que des quantités de charbon de plus en plus réduites; la production de l'amidon se ralentit, celle des graisses et des sucres diminue plus rapidement encore: or la graisse est le plus riche de tous les combustibles organiques et le sucre, sans renfermer plus de charbon que l'amidon, est un aliment plus facilement assimilable (1). Il est vrai

1. L'amidon est transformé en glucose par la digestion buccale, comme il résulte des expériences de Leuchs et de Miahle. Cette transformation est toute faite, si l'aliment aborbé est un glucose.

que les acides, à l'inverse des autres principes nutritifs, sont d'autant plus abondants qu'on s'élève en latitude; mais il n'y a pas là, comme on pourrait le croire, un gain pour les climats froids, car, si l'acide manque dans les régions chaudes, il est remplacé par du sucre; bien plus, ce gain apparent est une perte réelle, puisque l'acide est un aliment moins oxygéné que le sucre, moins nourrissant (1). Pour conclure, nous dirons que plus on s'éloigne de l'équateur, moins l'homme trouve à sa disposition des aliments pour réparer ses forces.

1. Les acides des fruits, comme l'acide citrique (C12H8014), si abondant dans le citron, l'acide tartrique (C8H6O2), que l'on trouve dans le raisin, l'acide malique (C8H6O10), qui donne à la pomme sa saveur, sont caractérisés par une forte proportion d'oxygène, comparés aux matières sucrées; on s'en assurera en mettant en regard de ces formules, celle du glucose, C12H1o010; voilà pourquoi on dit que les fruits de nos pays sont des aliments « rafraîchissants. >>>

CHAPITRE DEUXIÈME

VARIATIONS DE L'ÉNERGIE HUMAINE

L'énergie humaine croît à mesure qu'on s'éloigne de l'équateur.

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Récits des voyageurs : variations du travail humain. Renseignements de l'histoire; variations de la puissance militaire. Données de la statistique : variations de la mortalité. Cette variation de l'énergie sous toutes ses formes résulte de la variation de l'énergie solaire. La fructification diminuant de l'équateur au pôle, sous l'influence des vibrations solaires, l'homme éprouve des difficultés de plus en plus grandes pour trouver sa nourriture. Par suite de la décroissance des radiations solaires, l'homme doit dépenser une quantité de charbon de plus en plus considérable pour maintenir son corps à la température normale.

Le grand soleil, qui exalte la plante, amollit l'animal (1). Cette variation de l'énergie suivant la latitude est des plus faciles à constater sur l'homme, car de toutes les espèces, l'espèce humaine est la seule qui ait affronté tous les climats; elle est la seule vraiment cosmopolite. On a l'air de développer un lieu commun lorsqu'on parle

1. « L'inertie et le silence qu'on retrouve partout en plein midi dans les régions chaudes est une preuve de l'énervement des animaux.» (Herbert Spencer.) On peut faire la même remarque sur les animaux domestiques. Le chameau, en Afrique, le bœuf, dans l'Inde, le lama, au Pérou, sont d'une patience sans égale, et leur docilité est extrême.

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