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CHAPITRE DEUXIÈME

LES CIVILISATIONS ORIENTALES

PREMIÈRE PÉRIODE. - Civilisations hindoues : Ayodhya, Hastinapoura, Patalipoutra. Colonies hindoues. Civilisations dékaniennes Mahabalipour, Éléphanta. Civilisation singhalaise: Anouradjapoura. Civilisation khmer: Ong-kor. Civilisation javanaise :

Madjiapahit.

DEUXIÈME PÉRIODE. Civilisation chinoise: Nan-king, Hang-tcheou:

fou.

TROISIÈME PÉRIODE.

japonaise Yedo.

Civilisation mongole : Pe-king. — Civilisation

Infériorité et indépendance des civilisations orientales, vis-à-vis des civilisations occidentales.

Si la terre russe et la plaine sibérienne venaient à s'abaisser de quelques mètres, on verrait les flots des mers polaires faire irruption à travers les steppes et recouvrir toute la vallée de l'Obi, qu'ils transformeraient en une espèce de Méditerranée, allongée dans le sens du méridien, et dont les eaux iraient se confondre avec celles de l'Aral et de la Caspienne; en même temps, on verrait l'ancien monde se dédoubler nettement en deux continents distincts, le continent occidental, composé de l'Europe et de l'Afrique, et le continent oriental, qui, dans sa partie médiane, se trouverait relié au précédent par l'isthme iranien: quant à l'Océan qui établirait la

séparation entre les deux terres, il serait scindé en deux bassins, au sud la mer des Indes, au nord la mer ouralienne. Bien que l'élévation du niveau moyen des terres s'oppose à ce que ce dédoublement s'opère d'une manière apparente, la forme des reliefs est là pour témoigner que la distinction entre les deux continents existe réellement (1). Historiquement, l'Orient a été, comme l'Occident, le siège de civilisations nombreuses, dont plusieurs atteignirent un haut degré de prospérité.

PREIMÈRE PÉRIODE

De l'an 2000? avant notre ère à 1400 de notre ère.

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Civilisations hindoues. La contrée qui avait été la première illuminée en Occident fut l'Égypte; en Orient, ce fut l'Inde (2). Les géographes ont pris l'habitude de réunir sous ce nom d'Inde deux formations géologiques très distinctes c'est d'abord le plateau péninsulaire du Dékan, qui s'avance en pointe dans l'Océan indien, entre le golfe d'Oman et le golfe du Bengale; puis l'Hindoustan, qui forme la ligne d'attache de la presqu'île avec le continent, représenté par le massif de l'Himalaya, puissant rempart de granit et de gneiss, dont les cimes altières dominent tous les sommets du globe. Cette ligne d'attache est constituée par trois bassins fluviaux, celui de l'Indus à l'ouest, celui de Brahmapoutre à l'est, tous

1. Voyez page 86.

2. «< Les Hindous, dit Buckle, possèdent des traditions historiques plus anciennes qu'aucun autre peuple asiatique. »

deux allant du nord au sud, et, au centre, le bassin du Gange, dont le cours, dirigé presque normalement aux deux autres, tient à l'Indus par ses sources, au Bramahpoutre par ses embouchures: des trois artères, cette dernière est la plus importante et par l'aire de son bassin, et par la grandeur de son débit, et par la puissance de ses crues, et par la fertilité de sa vallée. C'est sur ses bords qu'est née et a grandi la civilisation hindoue.

Ala différence des cités égyptiennes, qui fournissent à l'archéologue des ruines nombreuses, dont quelquesunes sont fort bien conservées, les cités des bords du Gange n'ont laissé de leur passage que des traces insignifiantes : du moins, il en est ainsi jusqu'au vr° siècle avant notre ère (1). Pour toute la première phase de cette civilisation, nous en sommes réduits aux vagues traditions renfermées dans quelques poèmes. Les plus anciens

1. Les brahmanes adoraient le feu et le soleil, divinités trop puissantes pour être enfermées dans d'étroites enceintes les rites sacrés s'accomplissaient au milieu de la forêt. Plus tard cependant, on prit l'habitude de venir adorer la statue du dieu dans des cavernes creusées dans le roc à cet usage. Non loin de Patna, on a trouvé, dans les grottes de Gaya et de Bérar, des spécimens d'une architecture très ancienne. Malheureusement ce sont là des restes trop insignifiants pour qu'il soit possible d'en tirer des conclusions certaines sur l'état de la civilisation à cette époque. « Ce ne sont, pour la plupart, que de petites salles cubiques, taillées à grand-peine dans le roc, un granit syénitique, et complètement dépourvues d'ornements; une seule, la cave Lomâs Réchi, dans la colline de Barabar, présente quelques sculptures sur la façade. En général, leurs parois internes sont soigneusement polies, caractère que l'on ne remarque dans aucune autre grotte de l'Inde. Parmi ces caves, quelques-unes remontent à une antiquité fort reculée, et sont bien antérieures au bouddhisme.» (L. Rousselet.)

de ces recueils de vers, les Védas, ont été composés par les Aryas, à l'époque où ils habitaient le Pendjab. De là, leurs tribus envahirent le bassin du Gange, puis descendirent peu à peu le cours du fleuve au xv siècle avant notre ère, ils étaient maîtres de toute la vallée. Ils avaient trouvé là une civilisation en pleine efflorescence (1); et, s'il est vrai qu'ils forcèrent les vaincus à parler leur langue, pour tout le reste, les conquérants empruntèrent bien plus qu'ils n'apportèrent (2).

De toutes les cités qu'ils ont fondées ou qu'ils ont continué d'habiter, d'Ayodhya (Oude), la ville des brahmanes, d'Hastinapoura (Delhi), la ville des guerriers, de Vaïçali (Bakra), de Varanasi (Bénarès), il ne reste à peu près rien d'informes monceaux de briques indiquent seuls l'emplacement où elles ont vécu;

1. « Toutes les anciennes traditions des Aryas de l'Inde s'accordent à nous représenter les populations brunes des Coudras ou Kauçikas, qu'ils eurent à vaincre pour s'emparer du pays, comme très avancées en civilisation, possédant de grandes villes, une agriculture perfectionnée, une industrie florissante.... Par rapport à ces nations, les tribus aryennes, encore à l'état purement pastoral, constituaient, lorsqu'elles apparurent pour la première fois sur les bords du Gange, une véritable invasion de barbares. » (F. Lenormant.) Les Védas étant l'œuvre d'hommes étrangers à cette civilisation, ayant tout intérêt à la dénigrer, pour donner libre satisfaction à leur vanité, on peut sous ce rapport, leur accorder une entière créance.

2. Après la victoire, l'état social des Aryas est profondément modifié. A la place du régime patriarcal, on trouve une organisation fondée sur le régime des castes; ils adoptent les doctrines panthéistes et la croyance à la transmigration des âmes. A la vie pastoralę succède la vie urbaine.

mais les livres hindous sont pleins du récit de leurs luttes (1).

Lorsque, au vr° siècle, une religion nouvelle se fut élevée sur les ruines du brahmanisme, la vallée se couvrit de temples magnifiques, qui aujourd'hui pourraient fournir sur l'Inde antique les renseignements les plus précieux : malheureusement presque tous ont été détruits lors de la réaction religieuse qui se produisit il y a un millier d'années; le groupe de Sanchi est un des rares monuments qui ont pu échapper au massacre (2). L'épo

1. Le Mahabharata raconte « la grande guerre », survenue, au XIIIe siècle, entre la ville des brahmanes et la ville des guerriers, entre la dynastie solaire, représentée par le prêtre Vasichta, et la dynastie lunaire, personnifiée dans le roi Viçvamitra. D'abord les Kchatryas l'emportèrent, puis les partisans du pouvoir théocratique ; et à cette occasion, vers le xe siècle, fut promulgué le code de Manou, qui tend à consacrer la prééminence de la classe sacerdotale.

2. Ce groupe est situé dans la vallée de Bhilsa, entre le Gange et le Dékan; le monument principal est un tôpe ou tombeau, dont nous empruntons la description à un travail de M. Louis Rousselet sur l'Inde. « Le grand tôpe est un dôme hémisphérique de 32 mètres de diamètre, posé sur un soubassement cylindrique de 5 mètres de hauteur, avec une projection de 1 mètre 60 autour de la base. Cette projection forme une terrasse circulaire, à laquelle conduit un perron à double rampe : elle servait aux pérambulations des fidèles, qui venaient déposer des fleurs ou des offrandes sur le tôpe. La masse du tôpe se compose de briques de grandes dimensions, disposées par couches régulières; le revêtement extérieur est en dalles de grès blanc d'une épaisseur de deux pieds... Les diverses fouilles opérées à l'intérieur du tôpe n'ont amené la découverte d'aucune relique; d'où l'on a dû conclure que c'était un chaïtya dédié à l'Adi Bouddha ou esprit créateur. D'après la forme du tôpe et son apparence intérieure, le chaïtya doit remonter au vie siècle avant J.-C., peut-être même antérieurement à Çakya. Quant au revêtement de pierre, il ne date que du règne d'Açoka (260-222 avant J.-C.)

<< Il faut placer à la même époque l'érection de la colonnade cyclo

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